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 Wild like you, wild like me ~

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MessageSujet: Wild like you, wild like me ~   Wild like you, wild like me ~ EmptyMar 16 Juin 2020 - 13:08

Wild like you, wild like me ~ CARNET


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CHAPITRE I.
Je suis quelqu'un sans origine, sans histoire, sans pays et j'y tiens.

Il était une fois un coyote qui courait dans les champs, à demi-dissimulé par les herbes hautes balayées par le vent.

Que lui était-il arrivé ? Oh rien, il avait juste envie de courir. Voyez-vous, dans son ancien village, il errait régulièrement devant le même mur de pierre un peu fendu, à la sortie du cimetière. Comme un canidé en cage qui s'inflige continuellement la même promenade. Il allait et il venait, et à chaque fois il voyait cette même fissure, dans ce même mur. Et un beau jour, il s'aperçut qu'il avait les poils à peine plus gris. Cela ne lui plut guère. Il songea qu'un jour, ce mur l'enterrerait. Oh, pas exprès, pas consciemment ; mais ce mur fendu ne s'écroulerait pas avant lui. Et cela le terrifia.

Il se mit à courir. Et il découvrit qu'en courant droit devant lui, il ne prenait plus la mesure de rien. Il se sentit mieux. Il se sentit libre. Et sa course se poursuivit, jusqu'à cette journée dans les herbes hautes, balayées par le vent.

Le coyote avait oublié que, même s'il ne voyait plus nettement ce qui l'entourait, ses rencontres ne partageaient pas ce délicieux flou artistique. Elles le voyaient, et elles se rendirent vite compte d'une chose. A courir si vite, il avait laissé derrière lui ses poils gris, ses poils bruns, ses poils noirs et ses poils blonds. C'était un coyote nu qui se promenait dans leur champ. Le vieux Bill alla chercher sa carabine, et le fit détaler sans demander son reste.

Et voilà comment j'ai quitté la Louisiane.

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CHAPITRE II.
Dussé-je mentir, voler, tricher ou tuer, je jure devant Dieu que je ne connaîtrai jamais plus la faim.

Il était une fois une petite marionnette sans fils, pas encore peinte, pas encore costumée, posée sur l'étage vide d'une maison de poupée en construction. Seul un mot était inscrit sur le toit, en arc de cercle, en lettres gothiques : Pensionnat.

Ce ne serait pas un spectacle joyeux. Ces lettres ne seraient pas peintes d'or. Et cette marionnette n'aurait pas un joli costume, émaillé de couleurs vives et de motifs flamboyants. Tout cela serait très noir, très gris, très sinistre, et très poussiéreux.

C'est alors que Candy vint s'asseoir à côté de la petite marionnette. Candy était un enfant de seize ans, qui ne voyait pas du tout la différence entre eux : ce visage blanc, sans peinture, ne le dérangeait pas. Il voulait juste discuter. Il avait plein de projets pour plus tard.

Il voulait acheter des crocodiles et les élever dans une ferme. Mais il ne les tuerait pas. Il aurait des attractions, pour impressionner les touristes. Des wagons de fête foraine qui plongeraient dans l'eau au milieu des crocodiles. A l'écouter, petit à petit la marionnette prit vie.

Candy cita soudain un vieux film en noir et blanc. Douze hommes en colère. Et la marionnette sentit ses mains bouger. Puis ses pieds. L'artisan le lui avait dit, en lui montrant ce film : c'est une bonne boussole. Les gens qui aiment ce film, probablement, ils t'aimeront. Et ceux qui auront quelque chose à lui reprocher, méfie-toi d'eux.

Des fils d'argent étaient apparus, transparents comme les fils d'araignée, et la soulevaient pour danser. Ils dansèrent ensemble, et le pensionnat de bois blanc s'illumina de mille couleurs.

Candy n'avait pas de famille, il n'avait nulle part où rentrer pour les vacances de Noël, donc la marionnette décida de l'inviter chez ses parents. Un petit cottage en bois vernis et fausse ardoise, entouré de fleurs en papier. Son petit coeur d'automate battait dans sa poitrine. C'était la première fois qu'il...

Et c'est ainsi que ma soeur a rencontré son futur mari.

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CHAPITRE III.
Pour certains, rien n'est écrit avant qu'ils ne l'écrivent eux-mêmes.

C'était une vilaine piqûre. Le gamin n'aurait jamais imaginé que ça ferait aussi mal. Sinon, il ne serait pas entré dans sa boutique. Il en pleurait. Les larmes roulaient sur ses joues, épaisses et chaudes comme une pluie d'été, et la tatoueuse se marrait en esquivant chaque sanglot pour éviter de briser la ligne. Elle finit par dessiner le grand aigle kitsch au travers de son torse, le même que sur le blouson de motard qu'il semblait avoir trouvé dans une friperie, et qui commençait déjà à donner des signes d'autodestruction imminente.

"Joli cuir que tu as là. Je parle du blouson," rectifia-t-elle en voyant le gamin tourner vers elle son regard d'un brun clair, presque doré.

Enfin, gamin... Ils devaient avoir le même âge, mais elle, elle bossait depuis deux ans et elle avait sa propre boutique. Ce petit con aux cheveux roses ne pouvait sûrement pas en dire autant, il avait l'air fragile comme une crevette. Un bras de fer et elle l'aurait cassé en deux. Elle rajusta une longue mèche de cheveux noirs, de ce noir bleuté polynésien qui fascinait le gamin depuis son arrivée, sous sa casquette à l'envers, et se remit au travail avant qu'il puisse rassembler ses idées. Il ne savait pas quoi répondre.

Est-ce qu'il devait parler du fait que ce blouson lui venait de son père, et que son père était mort ? Est-ce qu'il devait expliquer tout ce que ça signifiait pour lui, de voir cette vieillerie tomber en poussière ? Et que le cuir de sa peau allait devoir lui servir d'armure le jour où ce doudou d'adulte ne serait plus là pour le faire ? Et qu'il ne pleurait pas seulement à cause de l'aiguille ? Bah. Il n'allait quand même pas se plaindre dans le giron d'une inconnue. Elle l'aurait fichu dehors. Elle n'avait pas l'air du genre à se laisser faire. Elle avait l'air... En fait, il avait vu un film sur Gauguin deux nuits plus tôt, et elle avait l'air de ces beautés mystérieuses sur les tableaux de sa période océanique.

"T'es sûr, tu ne veux pas les couleurs ? Je peux te faire exactement le même effet."

"J'ai pas de fric," sourit le gamin en essuyant ses joues maigres. Ça, ce n'était pas une plainte, c'était juste une information. "Juste le message sur le parchemin. REFUSE TO LOSE."

"T'inquiète, ça fait partie du prix," sourit la jeune femme en s'appliquant. Refuser de perdre. C'était kitsch, mais au moins elle pouvait apprécier le sentiment. Il y avait quelque chose d'estimable dans cette maxime complètement stupide. Elle s'inclina lentement contre le torse légèrement ensanglanté, qui se soulevait d'une respiration tremblante ; elle laissa courir ses doigts sur les côtes du maigrichon, et déposa un baiser sur ses lèvres. Le gamin resta paralysé. Il s'attendait à tout sauf à ça. Mais il en avait besoin. Cette nuit-là, ils combattirent la solitude tous les deux, bravement.
Et pour un temps, le vieux spectre recula, surpris.
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MessageSujet: Re: Wild like you, wild like me ~   Wild like you, wild like me ~ EmptySam 20 Juin 2020 - 13:45



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CHAPITRE IV.
Je voulais que tu comprennes quelque chose, que tu voies ce qu'est le vrai courage, au lieu de t'imaginer que c'est un homme avec un fusil dans la main.

Il était une fois une acrobate rusée et un vieux mage du bayou. Ils avaient produit quelques progénitures par des méthodes naturelles, mais monsieur gagnant en âge, ils s'étaient inquiétés de n'avoir plus ce qu'il faut, et s'étaient tournés vers les charmes du vaudou pour soutenir leur quête d'une tribu nombreuse.

Il s'avéra que les charmes en question étaient trop efficaces ; ou alors, leur souci premier n'avait pas lieu d'être. En moins de deux ans, trois enfants naquirent, deux petites jumelles pas exactement identiques qu'on appela respectivement Theodosia et Timothea ; puis un petit Scipion qui terminait la brochette en beauté. Il avait les gènes de maman, ce qui la ravissait. Par certaines nuits, ils allaient en promenade ensemble.

Les jumelles étaient surnommées Thea et Theo. Elles ne se ressemblaient pas vraiment ; Theo ressemblait surtout à Scipion, et on les croyait toujours triplés. Aux yeux des autres, c'étaient les enfants de la magie. Ils étaient chéris et couvés, ce qui les insupportait. Theo et Scipion se faisaient passer l'un pour l'autre, pour faire des blagues. Jamais il ne couperait ses cheveux longs, jamais ; c'était un pacte sacré, pour que Theo et lui puissent toujours se faire passer l'un pour l'autre, s'ils en avaient besoin.

Lors des visites médicales obligatoires, tout le monde rentrait dans son rôle : vieux rétrogrades aux idées poussiéreuses, la carabine pas loin, la Bible sur le bord de la fenêtre, le gouvernement aux chiottes, prêts à alerter le voisinage pour un lynchage improvisé. "Non, vous ne verrez pas nos filles toutes nues ! Sainte Mère de Dieu !" Le médecin repartait sans demander son reste, et ils riaient tous ensemble.

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CHAPITRE V.
La vérité c’est comme une couverture trop petite. Tu peux tirer dessus de tous les côtés, tu auras toujours les pieds froids.

Il était une fois une petite fille qui aimait les dinosaures. Elle s'appelait Theodosia, mais tout le monde l'appelait Theo.

Elle aurait aimé plus que tout recevoir un oeuf de dinosaure pour son anniversaire. Puis elle comprit que c'était impossible, et elle demanda un oeuf d'alligator. Puis elle comprit que c'était impossible, et elle demanda un oeuf de tortue.

Son frère vola pour elle une petite tortue de terre et la lui ramena en cachette ; quand les parents s'en aperçurent, ils avaient déjà fait pas mal de kilomètres, il était un peu tard pour la rendre, ou pour les disputer. Ils gardèrent la tortue. Elle vit encore aujourd'hui, et elle les enterrera tous.

Dix ans plus tard, son frère ramena un garçon à la maison. Theo l'aima tout de suite, et il l'aimait aussi. Il rêvait d'avoir une ferme d'alligators. Bientôt, ils s'installèrent ensemble. Elle ne regrettait qu'une chose : son frère ne venait pas la voir. Ils s'étaient querellés pour une bêtise, une histoire d'enfants. Normalement, il n'était pas rancunier, personne dans la famille ne l'était. Mais cette histoire-là avait fait du bruit. Un serment était un serment.

Ils élevaient des alligators, tout petits depuis la couveuse, ils les nourrissaient, ils les mesuraient ; quand ils étaient assez grands, ils les tuaient, les dépeçaient, et préparaient la peau. "Il y avait une grande demande pour le cuir tanné à l'ancienne, par l'éleveur."

Son frère n'était pas mécontent qu'ils n'aient pas d'enfants. Ça avait l'air d'un drôle d'endroit pour en éduquer. La tortue, c'était suffisant. Et ils se disputaient de plus belle, dans les bars au parfum de rhum au long du fleuve boueux, tandis que les vieux frappaient sur le pavé leurs cannes et leurs spectator shoes, sur un air de blues.

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CHAPITRE VI.
Les cons ça ose tout. C’est même à ça qu’on les reconnait.

Il était une fois une nuit sans lune, une longue route pâle et grise, et des ennuis de moteur. C'était quelque part au Nord de la Californie, près de ce parc aux grands arbres rouges qu'un homme sans imagination a nommé Redwood. Comté de Humboldt – ça, c'est un homme intéressant ; dommage qu'il soit mort depuis 1859 – avait une riche histoire d'aventuriers arrivés pour faire fortune, vite déçus, et devenus trafiquants. Et le voyageur se dit que, quitte à être bloqué sur place, il pouvait aussi bien se renseigner sur ce qu'on trafiquait d'intéressant dans le coin. Les temps avaient changé, pas vrai ?

C'est ainsi qu'il entendit parler de la Molécule. C'était très mystérieux, des on-dit, des ne-dites-pas-que-je-vous-l'ai-dit, mais ça l'intéressait. Le voyageur aimait les substances hallucinogènes, comme on aime les ours blancs : on sait vaguement que ça existe et on en est content, même si, objectivement, même si on nous en collait un dans les mains, on n'en aurait pas l'usage. Il approuvait le concept, disons-le comme ça. Et il aurait bien voulu pouvoir participer, mais que voulez-vous, il était trop solide. Il aurait voulu, comme disent les jeunes, se mettre minable et se payer des bad trips. Tous les chamans disent que c'est bon pour la santé mentale.

L'ennui, c'est que le monsieur qui aurait eu de tels projets était inapprochable. Mais tant pis, le voyageur pouvait bien s'arrêter un temps dans sa ville et donner de petits spectacles, ça ne dérangerait personne. Au pire il ne se passerait rien. Au pire il se passerait quelque chose. C'est ça, les voyages. Et la pièce retomba du bon côté. Oh, il se passa quelque chose. Quelque chose d'énorme et de complètement imprévu. Mais pour vous en parler, il faut d'abord que je vous parle de l'Arbre. De la Pioche, et du Sablier.
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MessageSujet: Re: Wild like you, wild like me ~   Wild like you, wild like me ~ EmptyLun 22 Juin 2020 - 13:42



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CHAPITRE VII.
Le coup le plus rusé que le diable ait jamais réussi, c’est de faire croire à tout le monde qu’il n’existait pas.

Le marionnettiste était mort depuis un moment maintenant. Les particules de chansons qui le composaient étaient retournées à la terre. Mais le voyageur se souvenait de ce qu'il disait : des gens qui te regardent droit dans les yeux, tu en trouveras assez. Cherche-toi quelqu'un qui regarde dans la même direction que toi.

Titiana s'était trouvé un amoureux. Ils s'entendaient bien ; il la laissait écrire partout sur son corps et lui piquait ses bijoux, elle lui teignait les cheveux et ils s'envoyaient en l'air dans la baignoire... toute la famille attendait un mariage.

Elle avait hérité d'une de ces baraques blanches, mangées par l'humidité, et elle y avait installé son chien. Elle en avait adopté un autre pour son amoureux. Ils les appelaient leurs bébés, pour rire. Le chien de Titiana s'appelait Peas, celui de son amoureux s'appelait Carrots. Ils n'étaient pas respectivement vert et orange. Ils étaient blanc et noir. Je sais, très décevant.

Les photos souvenir:

Un jour, elle lui dit : j'aimerais que tu viennes planter un arbre, dans le jardin. Elle savait qu'il allait partir. Il savait que c'était son cadeau de départ. Il prit la pioche et resta face à la terre noire, pleine de cailloux. Il fallait donner le premier coup. Impossible. Impossible. Il s'évanouit.

Une semaine plus tôt, elle avait fait quelque chose qu'elle ne faisait jamais : elle s'était installée avec lui devant un film, sans chercher à grimper sur ses genoux pour initier un rapport plus physique. Elle regardait l'écran, droit devant elle. Pour la première fois, comme disait le marionnettiste en son temps, elle regardait dans la même direction que lui. Il appréciait. C'était un bon film. Et soudain elle avait déclaré :

"On attend un bébé."
Il avait espéré, contre toute attente, qu'elle parlait d'adopter un troisième chien. Ils avaient continué à regarder droit devant eux, l'écran argenté qui scintillait, hypnotique. Deux gamins terrifiés. Elle avait attendu, et il avait fini par murmurer :
"Mais non !"
"Bon, très bien. On n'en attend pas, alors."
Elle était partie promener les chiens. Elle ne s'intéressait pas vraiment à ce film, de toute façon. D'ailleurs le voyageur avait continué à regarder sans voir, à écouter sans entendre, et soudain il avait reconnu le générique. Déjà fini. Il avait éteint le poste, et le salon avait replongé dans l'obscurité.

Et il ne peut plus regarder le Comte de Monte-Cristo, aujourd'hui. Alors il triche : il regarde V pour Vendetta.
You find your own tree.

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CHAPITRE VIII
Je suis désolé que papa et toi vous soyez déçus que je laisse les jeux olympiques s'immiscer dans mes études.

Je me rappelle soudain que, dans mon enfance, j'avais un sablier. Maigre héritage que ma mère avait reçu d'un ancêtre du Nord, rempli d'un sable fin et blanc, d'une plage ou d'un désert très loin d'ici. On aurait dit des cendres.

Je regardais le sable descendre et je pleurais de réaliser que, même en souhaitant de toutes mes forces, il ne changeait jamais de direction. Il ne remontait jamais. Il tombait toujours. J'étais tout petit. Ça me faisait peur. Mais une conviction inexplicable me disait qu'un jour, le sable changerait de direction. Petit à petit, je me suis consolé tout seul et j'ai arrêté de pleurer. Je regardais le sablier avec un petit sourire entendu. J'avais compris la blague.

Je l'ai toujours. Le voilà. Oh, je ne m'en sers pas pour mesurer le temps. Ce n'est pas une chose que je fais, de toute façon ; j'aime mieux utiliser les astres, ça me vient plus naturellement. Je le garde pour une grande occasion. Vous savez ce que je ferai, ce jour là ?

Je le briserai. Je lancerai le sable dans les airs, comme un nuage doré, et il ne retombera jamais. Ce sera un jour de grand vent, plus libre que tous les autres. Le sable s'envolera, et de là-haut, il verra les grandes plaines qu'il a traversées, les rivages dont il est né. Il se rappellera des forges souterraines qui ont créé sa matière minérale. Et il comprendra pourquoi.

Il y a des gens qui brisent des verres, ou des bouteilles de champagne. Le verre, c'est du sable fondu, non ? Mon rituel n'est pas plus bête qu'un autre.

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CHAPITRE IX.
On ne voit pas plus loin que les choix qu'on ne peut pas comprendre.

Il était une fois, une petite ville dans les hauteurs de la sierra. Le voyageur y était arrivé en suivant la route de Long Valley, il s'était baigné dans une putain de jolie source chaude – pardon madame, mais c'est un sacré souvenir. Il était tombé sur un écriteau qui interdisait la chasse, et il avait fait la moue.

Plein de jolis chalets au bord des lacs, des touristes partout et des sapins, des bêtes sauvages au long des fossés, la Sherwin Range en fond. Une petite station d'altitude bien perchée. S'il n'avait pas le droit de tirer sur une bête féroce venue l'asticoter, ce n'était peut-être pas le meilleur endroit où arrêter sa roulotte ; mais d'un autre côté, les touristes l'attiraient, tel un moustique.

Un bûcheron l'avait renseigné. Oh non, les ours ne lui poseraient pas de problèmes ici. Le vieux Steve les disciplinait en haussant la voix et au pire, en leur tirant des balles de caoutchouc. Ou en leur balançant un coup de spray au poivre. Une poubelle bien scellée, et tout se passerait bien... il n'y avait pas eu d'incident depuis plus de dix ans, pas de quoi abattre l'ours en tout cas. Et s'il avait trop peur, il pouvait toujours aller à San Francisco, ou à Los Angeles, c'était tout juste à une heure d'avion.

Ce type se moquait de lui. Le voyageur fit mine de le prendre au sérieux.
"Avion ? Fossett s'est écrasé ici ! Non merci !"
Le bûcheron hausse un sourcil. Il ne comprend pas. Le voyageur insiste :
"Steve Fossett, le milliardaire aventurier !"

Il avait la vingtaine quand c'est arrivée, et c'était partout à la télévision, même à l'autre bout du pays. Mais le bûcheron n'est pas impressionné. Des milliardaires, il en voit assez se fouler la chevilles sur les pistes de ski, en hiver, et se faire rapatrier en geignant.

Plus tard dans la soirée, alors qu'il investissait son emplacement, le voyageur rencontra le vieux Steve. Pas milliardaire pour un sou, cheveux longs mal attachés, blouson de ranger, vieux t-shirt délavé, vieux jeans tachés d'avoir rampé dans les buissons... mais un aventurier à part entière. Le bonhomme avait garé son 4X4 près de la roulotte, et le regardait installer ses stands. Il restait silencieux, pensif, et le coyote avait le sentiment d'être observé par un grand prédateur trop bien nourri pour l'attaquer.

"Pas de sucreries en libre service ? Ça, c'est un coup à avoir un ours sur le dos."

"Non non," sourit le voyageur gracieusement. Il dépliait de grands paravents de bois, peints et vernis avec art, et les arrangeait en petits cabanons. L'automate diseur de bonne aventure... la pêche aux canards, le stand de tir... Il précisa, pour avoir l'air renseigné sur la vie locale :

"Des balles de caoutchouc. Comme les vôtres."

Le vieux Steve se contenta de hocher la tête.

"Chouette métier que vous faites là. Et les peaux, vous en faites quoi ? Quand vous les trouvez morts... quand ils se font taper par une voiture ou que sais-je..."

"Je les rends à la terre. J'emmène la carcasse dans un endroit sauvage. Je brûle de la sauge et je dis une prière. La peau ? J'en ai vu assez, des peaux. J'ai été chasseur pendant des années, avant."

"Moi j'ai fait un peu de taxidermie," répliqua le voyageur, mais il voyait bien que le vieux Steve ne plaisantait pas, donc il préféra se taire. Il avait un côté ours, ce vieux. Il valait mieux ne pas le brosser dans le sens contraire du poil.

L'hiver arrivait. Bientôt le marché de Noël et les touristes d'hiver. La petite vie tranquille du forain suivait son cours, et la nuit, il s'enroulait dans deux couvertures, oh, pas parce qu'il avait peur des bruits ambiants ! Elle commençait à être froide, la Californie. Et puis, il préférait être nu sous une bonne couette que bien habillé sous un drap léger, c'était sa philosophie personnelle.

Et le voyageur revit le vieux, accroupi dans les bois, au dessus d'une souche mangée de lierre qui ne le tenait pas bien à l'abri. Il chantait. C'était une prière indienne. Pas de sauge, c'était rassurant, ni l'odeur d'une carcasse. Mais un ours qui s'éloignait entre les arbres, gras et brillant, prêt pour sa grande sieste. Le vieux Steve lui disait bonne nuit. La Mammoth Mountain forée de puits de mine jetait sur la scène un regard bienveillant. La région parlait. Elle chantait quelque chose, elle aussi. Mais le voyageur n'écoutait pas, il était trop distrait, il suivait son spectacle, sans réaliser où celui-ci allait le mener. Il avait à peine braconné, un collet par-ci par-là, et ne s'était pas fait prendre.

Dès la fin de la saison de ski, alors que les ours affamés sortaient de leurs tanières, il se remit en route avec la longue caravane des touristes, descendant la vallée en direction de la côte.
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