Perdu entre deux vies

Perdu entre deux vies

Prologue

L’adolescent se réveilla en sueur, le cœur battant, essoufflé. Il se demandait ce qu’il faisait là : au milieu d’une pièce inconnue. Une chambre ? La sienne ? Non ! Une autre âme dormait ici ; un deuxième garçon. Qui était-il ? Pourquoi se trouvait-il en ce lieu, dans cette chambre ?
Et surtout qui était-il, lui ?
Il ne se souvenait de rien ! Son nom, son âge, sa vie. Rien ne lui revenait en mémoire. Il était une coquille vide. Comme si son existence ne commençait que maintenant. Avec ce garçon qui se réveillait à son tour...
L’adolescent, interdit, ne bougea pas, essayant même de calmer les battements de son cœur et sa respiration, comme si elles allaient le trahir. Un geste futile. Il s’en rendit compte au moment où le jeune homme, qui sortait de sous sa tonne de couvertures, hurla.
— Putain ? C’est quoi cette merde ?

Le deuxième garçon remit ses draps sur lui pour protéger son corps, nu. Il ne laissa voir que ses cheveux bruns et une partie de son visage.  
— Thomas, qu’est-ce qui t’arrive ? demande la mère du brun, de l’autre côté de la pièce.
Thomas regardait l’adolescent en face de lui : l’intrus avait une expression totalement apeurée. Des yeux grands ouverts ; un tremblement incontrôlé. Il paniquait.
— Rien, maman, je me suis juste cogné en me levant.
— D’accord… Je dois partir, pour toute la journée… termine la maman du brun, qui devait surement aller travailler.
Thomas, depuis cette rencontre, n’a toujours pas compris pourquoi il avait menti à sa mère. C’était comme si quelque chose l’en empêchait. Peut-être à cause du visage enfantin de l’inconnu ? Son expression inquiète ? Il n’en savait rien, mais il ne pouvait s’empêcher de sourire devant lui.
— Bonjour, moi c’est Thomas, et toi ? Se présente-t-il à l’inconnu pour essayer d’en savoir plus sur lui.
Pour toute réponse, Thomas eut droit à un haussement d’épaules et un regard fuyant de la part de l’inconnu.
La peur et la honte.
— Tu ne sais plus comment tu t’appelles ?

L’adolescent haussa encore des épaules. Sa lèvre se baissa un instant comme s’il s’excusait. Oui, il avait totalement oublié son passé. Sa vie, son nom. Il désirait le lui faire comprendre, qu’il n’était pas là pour lui faire du mal, mais le seul mot qu’il put dire fut, avec un fort accent anglais :
— Désolé !
— Ne t’inquiète pas ! affirma Thomas, en attendant, je vais t’appeler blonde.

Caché par sa couette, Thomas s’habilla en toute vitesse. Par chance, ses vêtements d’hier, n’étaient pas tombés du matelas et ainsi, il pourrait les remettre, même s’il le fit avec un visage dégoûté. Lui qui n’aimait pas porter deux fois ses affaires, allait être servi. Il descendit alors de son lit, mal à l’aise, avec l’envie d’enlever ses vêtements et d’en remettre d’autre aussitôt. Il tira sur son tee-shirt, comme si ce dernier lui collait déjà à la peau.
— Désolé, je vais me changer. J’suis pas fan des nudes, surtout si c’est moi qui suis nu.

« Nudes » ce mot s’inscrivit dans la tête de l’adolescent, sans vraiment savoir pourquoi. La phonétique résonna dans son esprit, s’amusa à se modifier pour former autre chose. Non plus un mot, mais un prénom : Newt.
— Je m’appelle Newt, piailla-t-il, avant d’entrer dans la salle de bain et de se mettre à rougir…
Il ressortit aussitôt avant de terminer avec un :
— Désolé…
Newt ferma les yeux, se sentit mal à l’aise un instant avec les images de Thomas. Il le voyait et revoyait sous cette douche.

Thomas arrêta ses gestes, quand la voix de Newt le sortit de sa rêverie. Il ne pensait même plus à l’eau qui coulait sur sa tête, tellement il était gêné par cette entrée en catastrophe. Il demeura sous les jets un court instant puis s’habilla après s’être séché. Il posa la main sur la poignée et resta planté sur place, sentant son énervement grandir et son cœur battre la mesure. Des images s’imposent à lui, des scènes où il se vengeait de tout cela. Une idée germa dans son esprit : une vengeance qui prendrait surement du temps. C’est avec ce plan en tête, qu’il ouvrit la porte, prêt à lui apprendre les règles de base du savoir-vivre.
— Newt ? demande-t-il sans plus aucune once colère — cette dernière ayant disparût une fois en face de lui —, tu devrais apprendre à frapper avant d’entrer quelque part.
Quelques gouttes continuèrent de tomber de ses cheveux en batailles, n’ayant pas eu le temps de les essuyer, ni même de se coiffer.
— Désolé, s’excuse Newt, en baissant la tête.
Thomas leva les yeux au ciel, tout en gardant un sourire, espérant à ne pas devoir faire l’éducation de Newt comme un père.
— Bon, je suppose que je vais devoir te réapprendre la vie !