Brrrrrr [Andy Turing FT Caracole O'brien]

Brrr

Les yeux grand ouverts, j’écoute la vie s’écouler autour de moi : le vent, les grillons. Les voitures démarrent doucement, comme pour indiquer le manque d’envie de sortir. Le chien non loin de chez moi jappe content de la promenade à venir et les gens se lèvent pour partir au travail. Et moi, aujourd’hui, je vais les imiter, j’attends la sonnerie du réveil pour aller me présenter à ma chef de stage et l’impatience me gagne à nouveau. Pourquoi j’ai tout cuisiné hier, j’aurais dû comprendre que je ne dormirais pas de la nuit à cause de l’impatience. Le boulot de mes rêves est à portée de mes mains et cela m’a empêché de fermer l’œil.

Les Tic tac continuent de résonner à mes oreilles et le son que je désirais écouter arrive brusquement.

Dring !

Je me lève, d’un coup, totalement habillé, prêt et descends directement de l’étage pour atteindre la cuisine. Je fonce vers le frigo et prends mon plat : un gâteau au chocolat – même si à côté, j’ai préparé le repas pour toute la journée et celle de demain – l’impatience m’avait totalement gagnée et j’ai dû m’occuper pour penser à autre chose. En sortant le dessert, la joie m’envahit en une seconde et m’emporte déjà au loin. J’essaie d’imaginer la personne qui m’aidera. Selon les explications de Willem et d’Amance, elle est assez joviale, surtout si on lui apporte de la nourriture. Je regarde mon gâteau maison, content du résultat. Pour le goût, je verrais bien ce qu’elle dira… Mais je pense qu'il sera bon.

Quand maman se lève, je lui souris et attends qu’elle termine son repas pour prendre la voiture avec elle. Je sais qu’en tant que loup, je pourrais me déplacer aussi vite à pied, mais j’aime bien passer un peu de temps avec elle. En route on discute de tout et de rien. Elle me questionne sur mes amis, sur mon petit ami. Je réponds à chacune de ses demandes jusqu’à ce qu’elle me dépose sur le trottoir. De son côté, ma mère ne peut pas se permettre d’arriver en retard à son travail (l’ancien de papa) et repart aussi vite pour ouvrir à ses clients habituels.

À peine sortie de la voiture, que je rencontre Stiles. Nous discutons quelque minute ensemble et nous nous séparions pour accomplir nos taches. Quelque jour plus tôt, il m’a expliqué que ses études se passent à l’autre bout du pays et qu’on se parlerait moins, j’essaie donc de rester le plus de temps possible avec lui. Surtout que c’est grâce à lui si j’ai pu définir mon projet de travail, aidé un peu de Therence, ainsi, Willem a pu m’aider à trouver un stage.

J’entre et me dirige directement chez le patron. En chemin, je salue les rares employés présents et écoute sans le vouloir leur conversation. J’apprends qu’une personne va recevoir un cadeau, ou qu’un autre mange sans mâcher. Arrivée devant sa porte, je toque. Un « entrée » se fait entendre. Ni bienveillant ni malveillant. Neutre. J’ouvre alors et me trouve en face du patron, qui sans attendre, appelle une personne.
— TURING ! BUREAU.

Ayant oublié de couper mon ouïe, je sursaute au cri. Mon tympan a sûrement explosé, mais il se répare doucement : d’abord j’entends un bourdonnement puis les paroles des gens me reviennent de plus en plus distinctes, comme si rien ne s’était passé. Soigné, je bloque mon don et me tourne vers le patron ; l’homme m’observe et sourit. Son sourire n’est pas aussi neutre que son « entrée » et me donne l’impression d’une bêtise à venir. Le sourire me rappelle un peu celui de Therence, quand il a manigancé son attaque contre Tobias ; mais je ne sais pas pourquoi, le sourire de Therence me paraît moins étrange que celui-là… Sûrement, car il est plus jeune ?

Une femme, tout à coup entre dans la salle et après avoir posé une seconde le regard sur moi, farfouille des yeux la pièce. Je me permets de l’examiner. Elle sera, pendant une semaine, mon maître de stage. Je sens en elle l’essence typique des êtres surnaturels, mais je n’arrive pas à savoir de quelle espèce. Son odeur ne me dit rien… Mais, par-dessus tout cette fragrance paranormale, je vois en elle, comme une espièglerie enfantine. Ses réactions ne ressemblent à rien aux adultes que j’ai côtoyés. Que cherche-t-elle ainsi ?

Comme pour répondre à ma question, elle s’arrête et se tourne vers son patron. Elle lui sourit ; je fais de même, même s’il ne m’est pas destiné.
-Il est où mon cadeau ?

Je fronce des sourcils devant sa demande et me regarde son supérieur. J’ai découvert pourquoi il possédait cette expression étrange à mon arrivée, ce que n’a pas compris la jeune femme.
-S’il vous plaît ?

C’est là qu’il décide de me présenter à elle.
— Mais bien sûr, voilà votre cadeau, l’informe-t-il en me pointant du doigt.
— Bonjour, je suis votre Stagiaire, Caracole O’Brien. Je suis ici pour apprendre le droit. C’est le professeur Shepherd et Jouve qui m’envoient.

Je vois son visage se décomposer, presque comme si la nouvelle ne l’enchantait guère et baisse la tête, tout aussi déçue. Elle me regarde et se désintéresse de mes paroles, toujours à la recherche de son faux cadeau. Cet acte me rappelle alors une phrase d’Amance.
« Elle me connaît plus sous le nom de Sylvie »
— Ah oui, elle m’a dit que vous la connaissez plus sous le nom de Sylvie et Will…

Je ne sais plus que rajouter d’autre et termine ma présentation.

— J’espère qu’on va bien s’entendre. J’ai amené des gâteaux pour vous remercier.

Brrrrr !

Dans le bureau du patron, le visage de ma référente se décompose brutalement, mais un subtil désir reste tout de même dans son regard. Regard qu’elle pose dans les coins : elle recherche quelque chose d’autre ; autre que moi. Savait-elle que j’arrivais et pourquoi pensait-elle recevoir un cadeau ? À cette question, je me demandais autre chose : que désirait-elle vraiment, et pourquoi s’imaginait-elle que son patron lui donnerait ? Je la regarde faire intriguer par ses réactions changeantes qui diffèrent de celle des adultes que j’ai l’habitude de voir. Et quand je lui offre le nom de ses amis, son expression évolue une nouvelle fois : d’incompréhension, elle devient joyeuse.

— Je connais Sylvie et son Willou !

Je souris, à mon tour content d’avoir pu ouvrir le dialogue, mais cette béatitude s’arrête quand sa bouche se mouve en grimace boudeuse. Je ne saisis toujours pas ces changements de réaction si soudaine. J’ai même peur d’avoir tout fait échouer… Willem m’avait expliqué qu’elle n’était pas très fan des enfants, ou des adolescents… Mais je dois faire ce stage. Il ne me reste qu’une chance pour que tout se passe bien et l’odeur du chocolat me remémore l’idée : le gâteau maison que j’ai cuisiné ; je lui propose en un rien de temps. Là, sans aucune surprise, au vu de la joie et de l’envie du dessert qu’envahit la salle, elle me prend dans ses bras et me serre fort, sous le brouhaha de son patron, qui semblait moins heureux du cadeau que je devais être à ses yeux.

— Caracole, tu es mon stagiaire préféré.

Je souris à sa phrase, content qu’elle m’ait dit cela, et la sens me relâcher doucement, et cette fois-ci, elle ne perd pas son sourire. Sa joie s’infiltre en moi et je continue de sourire à mon tour.


Presque en coup de vent, comme pour éviter la totalité des employés du journal, elle m’embarque dans un endroit discret pour dévorer mon gâteau. Je me demande même si elle n’usait pas de ses dons spéciaux pour aller plus vite que la moyenne, sans pour autant le montrer aux autres. Enfermée dans un local, où traînaient des balais, des tissus et des produits ménagers, elle se prépare un coin tableau pour déposer mon gâteau et le dévorer avec avidité et caché de tous. Cet enthousiasme me réchauffe le corps. Je suis heureux qu’elle aime à ce point ce dessert… J’en mange aussi un morceau à mon tour.

— Tu risques de t’ennuyer, mon boulot ici est chiant. Je choisis des questions, trois par chronique. J’y réponds et c’est reparti pour un tour.

Je lève la tête, quand elle me parle. Son intonation ne montre aucun enthousiasme, tente-t-elle de me dissuader de rester ici ? Je me mords doucement les lèvres, arrête de manger devant son discours. L’inquiétude me prend en une seconde et je me force de la faire partir. Si Willem m’a envoyé la voir, c’est qu’elle s’y connaît… Même si elle semble ne pas aimer ce qu’elle fait… Pourtant son travail consiste à informer les gens, alors pourquoi a-t-elle perdu son envie ?

-Je me sers de mes anciens cours. Sinon je fais des recherches. Je me fie au droit californien, mais je peux changer ce point si c’est précisé dans la question.

— Pourquoi ne semblez-vous plus intéressé par votre travail ? Vous soutenez vos lecteurs à se défendre contre des personnes mal intentionnées… C’est ce que je désire faire. Aider les autres à comprendre les événements. Pour cela que j’aimerais devenir anthropologue judiciaire ou médecin légiste, comme ça, je pourrais dire à la famille de la victime ce qui est arrivé au survivant… Rien de plus horrible que de ne pas savoir...

Mon discours me rappelle la disparition de mon père et le peu d’information que j’ai eu de la part des militaires...

Sa main posée sur la poignée, elle ouvre la porte et sortie, me faisant comprendre qu’elle m’en parlera plus tard et qu’à l’heure actuelle, elle avait autre chose de prévu…

Hors du placard à balai, nous tombons nez à nez avec un homme à la fragrance des plus insupportable, du moins pour un loup tel que moi. Son regard, d’abord posé sur nous, dévie vite vers l’objet de ses convoitises, le gâteau. Andy aussi sentait, avec, autant de force et d’horreur, l’odeur qui se dégage de lui, pire, encore, vu que l’haleine du type se dirigeait vite vers elle.

— Mon stagiaire, mon chocolat.

En une seconde, Andy me montre la possessivité envers un simple objet : le dessert. Je souris devant le regard, un peu apeuré de l’homme qui s’enfuit, s’éloigne le plus vite possible de sa collègue. Mais, je n’ai pas le temps d’attendre la venue d’une autre personne, que la main de ma chef de stage m’agrippe et me sort du placard, tout en m’expliquant ce qu’elle avait prévu de faire.

— On va aller faire des trucs cool. J’donne pas de cours aujourd’hui alors je suis tout à toi. On parlera de droit si tu veux, mais pas ici. J’ai même un moyen de transport. C’est toi qui choisis en premier !

Pris au dépourvu, je ne sais pas où on pourrait passer ce début de journée libre. J’essaie de réfléchir à des lieux que j’apprécie, à des endroits qui pourraient intéresser Andy. Deux idées, parmi d’autres, reviennent souvent. La première : aller à ma librairie préférée, tenue par Wesley. La deuxième : aller dans la nouvelle attraction de la ville : le bar d’une famille de Japonais, qui servait une immense tour de pain de mie avec, en son centre et dans un trou creusé dans le pain, différente boule de glace : chocolat ou vanille, et de la chantilly… qui faisait fureur et les jeux de fléchettes donnait encore plus d’intérêt.

— Je ne sais pas trop. J’aime bien la librairie de la ville, elle appartient à une personne sympa. Sinon, le nouveau bar à fléchettes dans la ville qui fait de plus en plus fureur… Un peu bruyant, mais nous pouvons y manger des sucreries.


Nous étions arrivés devant le moyen de transport d’Andy que je regarde étrangement. Comment compte-t-elle nous conduire en ville avec cela ?

— Pourquoi y aller en vélo, on court aussi vite qu’une bicyclette. Non ?

Surtout que je ne vois aucune place sur ce vélo, à part… le panier ?

le dessert, désolé pour la qualité de la photo !:

Grrrr !

Le panier ! Elle souhaite que je m’assoie sur le panier ? Mais comment ? Il n’y a pas assez de place. Mon corps ne se plie pas à volonté, je ne me suis pas fait mordre par un poulpe garou. Non… Je secoue la tête, me tourne vers Andy et me confronte à du vide. Elle est partie ! Un étrange espoir apparaît, peut-être qu’elle a changé d’avis ? L’espoir se broie dans un toc-toc. La propriétaire du vélo m’attend, tout sourire, tapotant contre le fer.

Le panier ne m’invite pas gracieusement, et pas besoin d’être intelligent pour savoir qu’on chuterait souvent… Un panier n’est pas fait pour porter quelqu’un, aucune sécurité là-dessus. Paniqué, j’essaie une dernière fois de la convaincre que nos pieds voyageraient bien plus vite qu’un vélo.

— Allez grimpe. T’accroche pas trop, sinon on va tomber.

Impossible, je l’observe, avec un air de loup battu, émotion qui ne lui fait aucun effet. Dire que je lui ai donné le gâteau directement… Voyant qu’elle ne changera pas d’avis, je monte sur le panier, le regard un peu dépité. Je dois me préparer à me rattraper lors des chutes.

***

Deux fois. Nous sommes tombés deux fois du vélo. Heureusement que je suis habitué à me rattraper, sinon j’aurais dû cicatriser à cause du frottage contre la route. Au moins, cela m’a permis de m’entraîner un peu… La deuxième fois, j’ai tenté de m’enfuir, après m’être demandé où elle allait nous amener, j’avais d’abord pensé à la nourriture, mais j’ai su qu’elle nous mené vers la librairie, qui est à l’opposé du bar japonais. Et, j’ai profité pour détaler loin, hélas, pas assez vite, et j’ai dû remonter sur le vélo. De toute façon, c’était soit s’installer dans le panier, soit risquer d’être écrasé par la cycliste.

Par chance, miracle, pacte avec Lux, le type qui ressemble au professeur Rapier, sans être autant noyé dans l’alcool, nous ne sommes pas tombés une troisième fois et j’en fus ravie.

— Super, la librairie, dis-je soulagé, de retrouver la terre ferme.

Quand, elle se gare, je n’ai pas eu le temps de foncer droit devant moi, qu’une main agrippe la mienne et me tire vers le bâtiment.

— WES !!! Devine qui c’est que v’là ! dit-elle, sous la petite sonnette indiquant l’arrivée, ou départ de nouveau client.

Je souris devant la façon de parler au libraire me doutant qu’elle devait le connaître et bien plus que moi. La fatigue peint son visage, mais une joie existe toujours. Et quand je remarque qu’il tient, un paquet entre ses mains, je compris pourquoi il était fatigué. Un enfant. Wesley était devenu papa ? Le petit gazouilla, comme un oiseau, offrant à Andy une réponse. Réponse qui semble la terroriser. La poigne d’Andy tremble, paniquée par la présence du nouveau-né.

— Il y a un bébé... murmure-t-elle si bas, que je pense être le seul à l’avoir entendu.

Je la sens très mal à l’aise et sa manière de parler, rapide, montre vraiment qu’elle n’est pas bien avec tout ce qui est mineur et comme pour tout prouver, je me retrouve entre Andy et Wesley, comme un bouclier.

— C’est Caracole... Il fait un stage. Il adore les petits enfants.

Je ne sais pas comment réagir et continue de sourire, même si je plisse des yeux. Pourquoi dit-elle cela ? La peur sûrement. Être jeté en pâture, je connais, mais je ne me suis presque jamais occupé d’enfant, juste quelque rudiment quand Leoric était encore présent…

De toute façon, je ne pense pas qu’il me mette son trésor entre les bras… Même si je serais m’en veiller sur lui.

— Bonjour Wesley, le salué-je une fois devant lui.

À force de venir ici, Wesley m’avait conseillé de l’appeler par son prénom, je pense qu’il n’aimait pas les « monsieur » que j’employais, je le connaissais déjà un peu, avec son frère, lui aussi partie…

Je lève la tête quand l’odeur de Wesley change, comme perturbé par le départ d’Andy.

— Je crois qu'elle n'aime pas les bébés.

Brrrrr

Andy s’est réfugié derrière une bibliothèque, sans perdre son but de vue : me montrer les livres intéressants pour le droit, mais elle s’est cachée pour tout autre chose. A-t-elle peur du petit ? Ou d’autre chose ? Je me retourne vers Wesley, quand j’ai écouté l’état d’Andy, avec mes oreilles. Une faible, très faible inquiétude semble la toucher. Peut-être que je n’aurais pas dû dire à Wes qu’Andy ne devait pas aimer les bébés. Le libraire me regarde, un air un peu triste.

– Ne t’en fais pas Caracole, dis tu peux me garder la petite un instant, je finis avec la cliente.

D’un signe de la tête, j’accepte sa demande, et prends le bébé dans mes bras. Pour ne pas faire d’erreur, je me remémore comment je faisais avec la fille de Léoric, avant son départ et lui parle, autant pour me rassurer, que pour tenter de l’apaiser. Je ronronne faiblement, pour faire comme une berceuse.

Wes en profite pour s’occuper d’une cliente, qui ne semble pas ravie. J’entends son marmonnage et ses insultes qui ne m’intéressent pas, puis me sens un peu coupable de voir Wesley fermer son magasin pour nous. Puis il revient à sa place et reprend sa fille.

– Et du coup, vous veniez pour quoi tous les deux ?

En même temps, d’une oreille indiscrète, j’ai écouté Andy chercher ses livres, puis observe ce qui se passait. La question de Wesley semble la faire revenir vers nous, comme une proie sachant être repérée, elle zyeute vers la petite des regards en biais.

– On allait pas rester au journal. C’est plein de geeks là bas. Pas la version sexy et cool comme mon pote Alex.

À ce nom, mes oreilles se lèvent, enfin si c’est possible. Je me demande si elle parle bien de la même personne que moi. Un geek… Ce terme allait-il bien avec druide qui sort peu de chez lui ? Sûrement, cela pouvait y ressembler.

– Le genre cheveux gras, bide à bière et grosses lunettes sur le nez. Cinq minutes de plus là-bas et j’allais faire une crise d’urticaire.

Vu la différence de caractère entre les travailleurs et Andy, j’arrive à comprendre son envie de les fuir. Elle, qui semble le plus souvent, vivant, pleine de vie, se retrouve dans un lieu, où les coups bas dominent un peu l’ambiance, cela fait étrange, même si elle m’a dit pourquoi elle y restait.

D’un pas, elle se rapproche de son ami, toujours avec cette méfiance dans le regard.

– Alors Wes. Tu l’as chouré à qui ce bébé ? Tu sais que c’est interdit ? De voler des mioches, explique Andy le plus naturellement du monde, même si je perçois une pointe d’ironie, à moins que je ne l’espère un peu trop ?

Je lève les yeux vers le ciel et continue d’écouter les deux amis parler, puis Andy tente de me montrer l’erreur que j’ai commise en pensant qu’elle n’aime pas les enfants. Peut-être que le terme est fort.

– J’ai rien contre ces petites choses. Elles sont juste très cassables. Passent leur temps à chier, baver, faire des bulles. Tant que ça ne peut pas épeler son prénom en rotant après la bière de trop je fais juste en sorte de ne pas m’imposer ce genre de contact. Mais cet exemplaire est plutôt joli.

Je souris devant l’explication d’Andy et surtout la description qu’elle en a faite : Exemplaire plutôt joli et continu à les regarder à tous de rôle

– En plus, elle est gentille, enfin, je sais pas trop, c’est la première fois que je la vois. Comment elle s’appelle ? demandé-je, tandis qu’Andy, tout d’abord d’un air inquiet, avance vers la petite, plus rassurer.

Un pas, un regard, un pas un regard. Elle se prépare doucement à devenir la chasseresse, mais trop tard, la gamine détruit toute force en elle, et Andy hurle lorsqu’elle se fait happée par la petite, mais, quand je vois les deux s’écarter l’un de l’autre, je m’approche, un peu en panique. Qu’est-ce qui risque de se passer si Andy tire trop fort ? Devant le bambin, j’essaie, en vain d’échanger la touffe de cheveux. Un doigt, un biberon. Mais le sourire de la petite montre qu’elle aime cela, elle adore entendre sa nouvelle amie hurler. Et une idée me vient à l’esprit, pas la meilleure, pas la plus logique, mais je n’en trouve pas d’autre.

– CARACOLE ! N’Y PENSE MÊME PAS !

Je sors un ongle lupin et caché de Wesley, vu que ce dernier n’était pas au courant du monde surnaturel, je coupe la mèche de cheveux. Le bambin d’un côté est heureux de garder ce « cadeau » volé et en perd un peu dans la volée. Je me recule, inquiet par la colère soudaine d’Andy. Elle pointe l’enfant du doigt et lui lance presque une malédiction.

– Cette enfant est démoniaque. On dirait ton vieux con.

Je ravale ma salive, me demandant comment elle allait réagir après. Sans même regarder, je sais qu’elle s’attaquera à moi. Je dois m’expliquer sur mon acte.

– Je suis désolé, j’avais pas trouvé d’autre moyen de faire, surtout que vous semblez pas vraiment apte à séparer calmement la petite des cheveux.

Peut-être que je n’aurais pas dû m’excuser, enfin si, mais ma manière de me faire pardonner aurait pu être simple. Au moins, elle ne l’insulte plus de démon, et c’est déjà bien… Puis une autre idée me vient à l’esprit, une dernière chance pour essayer de calmer Andy.

– Quand tu parlais d’Alex, tu parlais bien d’Alex Cormier ? Un dr…

Je me tais soudain, ayant failli révéler un secret sur lui et change tout.

– Le laborantin ?

Brrrr feat Andy et Wesley (et Tobias qui a les oreilles qui sifflent)

Le bébé brandit la mèche de cheveux comme un trophée ; elle s’amuse à les secouer sous la barbe d’Andy. Andy, qui nous jauge, le regard sombre presque colérique. Elle déteste mon geste. Pourtant ils vont repousser. Déçu, elle baisse les yeux et admire sa perte. Son visage, durant une seconde, s’emplit de tristesse, puis l'énervement rapplique tout aussi vite. Le bébé se fait maudire, tout comme la personne qui la garde. Elle ne dit pas son nom, c’est Wesley qui me l’indique : Tobias. Je n’en connais que deux, et vu que l’un d’eux est un peu jeune pour pouvoir adopter un enfant et il s’intéresse plus à l’astronomie… L’image d’un professeur m’arrive à l’esprit et me demande s’il ne connaît pas le deuxième Tobias. Parfois, il y avait son odeur dans le bâtiment, je l’ai senti sans le vouloir, comme si la course poursuite avec Therence m’avait mis son odeur dans le cerveau. L’hypothèse que se soit lui s’infiltre, elle prend plus d’ampleur suite aux discours d’Andy : une seule personne peut faire réagir quelqu'un au quart de tour… Comment se sont-ils rencontrés ? La littérature, un peu comme moi ? Je ne vois aucune autre solution. Quand, je l'ai espionné, le professeur se retirer dans sa voiture, un livre à la main, sans cigarette. L’odeur du véhicule ne m’a pas dégoûté. Elle était saine, plus saine que lui. Du moins, niveau fragrance d’alcool et de Tabac. Mais comment se fait-il qu’il soit ensemble ? Ils sont si différents. Pendant une seconde, je m’inquiète pour le libraire. Des souvenirs me reviennent en tête : l’attaque de Tobias quand sa portière est venue avec moi… Pourtant, je ne sens aucune peur en lui, il est juste heureux de l’avoir connu. Il semble aller mieux qu’avant, il est joyeux tout simplement et lorsqu'Andy parle de lui, son cœur joue la même mélodie que moi avec Liam a mes côtés… L’aurais-je mal jugé ? Ou est-il différent avec lui ? Je ne sais plus quoi penser. Mon esprit doucement change de sujet.

Le cri d’Andy me ramène à la réalité. Je ne divague plus. Elle essaie de faire réagir son ami, qui s’occupe de la petite. Il en est totalement gaga. Mais la fin de sa phrase me fait tiquer. Pote avec son mec ? Le professeur n’a presque pas de connaissance, sauf le père de Therence. Même Leoric, qui a tenté de parler avec lui, s’est pris plusieurs vents. Souvent, je le voyais monologuer avec lui... Non, je dois passer à autre chose. Je me retiens, secoue la tête pour zapper cette histoire et lève mon regard vers Andy. Elle sort avec Alessandro ? Pourquoi se plaint-elle de Tobias alors ? Je plisse des yeux et oublie leur affaire. Andy, continue à parler avec son ami, mais ce dernier s’excuse, il part coucher le bébé qui gesticule dans ses bras. Son trésor lui a été volé et elle souhaite le récupérer, comme si c’était un doudou, doudou dérobé par la ruse…

Le calme doucement revient. Andy se tourne vers moi, vu que son ami n’est plus là. Elle me scrute ; je ravale ma salive une seconde. Andy fait claquer sa langue. Un geste qui me panique. Qu’est-ce qu’elle veut faire ? Je me recule, n’aime pas la manière dont elle me regarde. Mon cœur rate un battement, puis revient à son allure normale : Andy sourit de nouveau et discute d'Alex, son meilleur ami. Elle se demande comment, je l’ai rencontré, me parle de pub et d’alcool. Pourtant, ce n’est pas vraiment un endroit où je le verrais.

— On a beaucoup de connaissance en commun surtout, la ville reste grande… Et, j’ai bientôt 18 ans, mais pas assez pour aller dans les bars.

Elle me pose une main sur l’épaule, un le regard attristé par la nouvelle. Pourquoi est-elle affligée ? Joie, tristesse, colère, j’admire en une seule matinée à découverte d’une palette de sentiment sur un même visage, puis voyant qu’elle ne trouve pas mon histoire, je la lui donne.

— Dans un stage, quelqu’un m’a parlé de lui. Il m’a dit qu’il pourrait m’aider pour un petit problème.

Je me rappelle de la discussion : courte, mais il m’a appris quelque truc pour me défendre sans faire de mal. Renseignement je n’ai pas encore eu besoin de m’en servir…

— Rien de grave… terminé-je pour ne pas avoir trop de questions.

Question, qui je le sais viendront sûrement. Elles arrivent toujours. Par chance, Wesley revient et nous ramène à notre présence en ces lieux : le droit. Andy parle vite, explique tout ce qu’elle désire et part le chercher lui-même me laissant avec Wesley et le nom de son petit ami. Le professeur Rapier. Père. Fille. Je ravale ma salive, j’espère que Wesley ne lui dira pas que j’ai eu son enfant entre les mains. Le pire, c’est que je ne peux même pas en parler, il me scruterait étrangement : l’univers surnaturel n’est que conte de fées à ses yeux.

— Faites vos trucs ? demandé-je en regardant Wesley, elle veut dire quoi par-là ?

Andy flâne vers la section "Droit", puis reviens sur Welsey qui me répond.

Je lui souris, attends le retour d’Andy.

— C’est triste ce qui est arrivé à la petite, être abandonné comme ça. J’espère que cela ira bien pour elle.

Le souvenir des multiples départs des deux alphas qui se sont occupés de moi, ravive une blessure que je tente se soigner. Cahir, Leoric… Ils ne sont plus là… Inquiet, je ferme les yeux une seconde, réfléchis à une autre sujet et souris au libraire, pensant qu’il chouchoutera bien de cette petite. Et moi, je suis dans la meute de Willem maintenant. Ma nouvelle famille, la dernière j'espère.

— Avec toi, je suis sûr qu’elle ira bien. Tu t’occupes bien d’elle.

Brrrr feat Andy et Wesley (et Tobias qui a les oreilles qui sifflent)

Andy parti, je souris à Wesley, me demande s’il connait la véritable histoire du petit chasseur Tobias et des loups garou ? Lui en a-t-il fait part ? J’en doute… Je ne sais pas et ce ne sont pas mes affaires. J’espère juste qu’il sera prêt pour cela. La dernière personne à qui j’en ai parlé, pour la protéger contre des nous, c’est enfui, sans un mot. Abandonner Will, si j’ai bien compris l’histoire. Je ne désire pas faire de même et espère que Tobias va dépeindre l’autre côté dans un sens neutre, au mieux : j’en doute un peu.

Me voyant dans mes pensées, Wesley tente de me faire revenir, ou de me rassurer sur les phrases d’Andy. Raison que j’approuve vite.

— D’accord, oui, ça lui ressemble beaucoup, même si cela ne fait pas longtemps que je la connais.

Puis le sujet touche à la petite : une histoire triste, qui je l’espère tournera en bien. Voyant l’attention que lui porte le libraire, je ne peux penser que oui, enfin, s’il arrive à l’adopter. Je sens l’envie en lui de la garder et souris. Il ferait un bon père.

— Pour le stage, c’est le premier jour, mais ça se passe bien. J’espère que la semaine se déroulera tout aussi bien. Je crois que le droit ne l’intéresse pas plus que cela. Enfin, plutôt l’endroit où elle travaille ne lui donne pas assez d’envie. Ils sont assez spéciaux là-dedans. Heureusement que sa joie compense avec le lieu pas très engageant…

Puis, je me tais : Andy venait d’arriver avec quelques livres, qu’elle me montre, puis discute avec Wesley. On ne restera pas plus longtemps.

— Au plaisir de te revoir Wesley ! Tu diras aurevoir à Alice de ma part.

Je ravale ma salive, me demande si elle m’a entendu parler. J’en suis sûr, vu qu’elle a de très bonnes oreilles comme moi.