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 Abus de filouteries [PV Chad]

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Richard Turner

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MessageSujet: Abus de filouteries [PV Chad]   Abus de filouteries [PV Chad] EmptyMar 10 Mar 2020 - 21:37




 


Abus de filouteries
FT Chad Wilder


 

Assis derrière son bureau, il fixe les deux dossiers qui lui font face. Dans un calme tout relatif dû au nombre de personnes qui passent près de lui, que ce soit pour aller utiliser les toilettes ou simplement se servir une tasse de café, il fait le vide mentalement. Tente au mieux de préparer un speech tout en espérant au fond de lui que ce sera nécessaire et que ce qu'il s’apprête à faire n'aura pas de répercussions fâcheuses. 

Deux dossiers, Une demande de permis pour de gros travaux dans un immeuble sans intérêt. Si ce n'est l'identité de son nouvel acheteur qui est dans la ligne de mire du canadien depuis son arrivée en ville. Le second vient des services de l'urbanisme. On y fait mention d'une inondation qui a touché la cave d'un immeuble, mais dont le sinistre s'est également étendu aux bâtiments les plus proches. Dans tout cela rien d'étonnant. Si ce n'est que l'adresse de la nouvelle acquisition de l'italien se trouve nommée dans la foulée. Sa cave surtout. Cave pourtant inexistante dans les papiers d'achats. Un écart qui a suffit pour permettre à Dick de faire geler la demande de travaux. Le fait qu'Amaro ait décidé d'acheter ce bâtiment était peut être totalement anodin mais le canadien a prit un malin plaisir à gâcher la vie de sa Némésis.  

Ce jeu qui est le leur est mauvais. Pourrait avoir de mauvaises répercussions sur la vie du flic si tout cela devait un jour se retourner contre lui. Après tout rien ne l'autorise à fouiller dans la vie de cet homme qui ressemble à une parodie de mafioso. Il joue ce rôle de façon si exagérée que les autorités se disent qu'il serait impossible qu'il ait réellement une place de valeur dans le milieu. Mais Dick refuse de rentrer dans le rang avec ses collègues. Là où tous ferment les yeux, cherchent sans vraiment le faire, il ne lésine sur aucun détail. En fait presque une obsession. Une enquête interdite. Et dans tout cela un nouveau nom, un architecte. Nom qui avait suffit à mettre Mafdet en colère lorsqu'elle avait trouvé le dossier portant celui d'Amaro dans le fond d'un des tiroirs du canadien. Ce soir là le père de famille avait craint que sa belle ne quitte son appartement avant même que leur soirée n'ait eu le temps de débuter. Chad Wilder, un des bêtas de la meute de la féline devenait presque intouchable. Si Richard a déjà failli tout perdre à Sacramento, a vu son enthousiasme face au défi mettre la vie de ses enfants en danger, cela lui a toutefois apprit la prudence. Il ose espérer qu'il saura se mettre des limites, ne pas prendre le risque de tout perdre en voulant jouer son rôle de poulet fouineur avec trop d'entrain.

Pour ne pas mettre Mafdet en colère, pour ne pas avoir à vivre une dispute, il a prit sur lui de convoquer Wilder durant les heures de travail de sa compagne. Elle doit être en plein cours et il sait qu'elle ne va pas venir se frotter contre ses mollets. Si tout se passe bien elle ne saura jamais rien de cette entrevue. C'est un jeu dangereux. Mais Richard n'a pas pu s'empêcher de convoquer l'architecte quand il a enfin eu une bonne raison de le faire. Des caves ne sont pas censées exister mais qui pourtant apparaissent dans d'autres dossiers. Si on a cherché à dissimuler ce point c'est que sans doute il y avait quelque chose de prévu derrière cette manœuvre. Une magouille de plus. Peut être celle de trop qui sait. Dick compte bien cuisiner ce gars de bonne famille, le pousser dans ses retranchements, lui faire lâcher des informations compromettantes au sujet de la mitraillette à voyelle. Suivre Amaro ne sert pas à grand chose, lui envoyer les services de l'hygiène à intervalles réguliers est un jeu qui même s'il a été amusant finit par être plus lassant qu'autre chose.

Si Richard ne veut pas que Mafdet sache ce qu'il s’apprête à faire, il espère bien que l'italien lui sera au vent de cette entrevue qui est sur le point d'avoir lieu. Un petit coup de pression tout ce qu'il y a de plus gratuit pour peut être le pousser à la faute.

Dick attrape une de ses gaufrettes à la vanille, la trempe dans son café, puis manque de faire tomber sa tasse à l'effigie des zinzins de l'espace quand on hurle son nom à travers le poste de police. Il se redresse comme si on venait de lui piquer le derrière, gueule sa présence pour la forme avant de poser sa tasse près de la cafetière.

Au même instant, Carter sort des chiottes, claque la porte, cogne dans la tasse de Richard et la fait choir dans la corbeille. Visage déconfit, le canadien fixe ce gâchis. Ouvre la bouche puis laisse sa colère se faire entendre.

-Tu peux pas faire gaffe ? Elle était sur le bureau espèce de guignol.
-Tes tasses sont si moches qu'elles choisissent le suicide.

Comme conclusion ce fumier de Carter se contente de lâcher une caisse. Puis se barre en se marrant, visiblement fier de ses sales coups. Il n'a peur de rien et ignore que la vengeance de Richard sera à la hauteur de l'affront commit. Dick fulmine, grogne tout les sacres qui lui passent à l'esprit, va du bénitier à la croix en faisant tout les détours possibles et imaginables. C'est quand son nom est cette fois prononcé sans être hurlé à travers tout le poste qu'il réagit enfin. Il se retourne lentement, tente d'effacer sa rogne et sa tristesse face à la perte d'une si belle céramique puis fixe l'inconnu qui lui fait face. Sa collègue qui est venue accompagner monsieur Wilder jusqu’à son bureau ne met pas longtemps à s'éclipser. Le canadien tend une main à l'homme, un sourire voulu rassurant et franc aux lèvres.

-Bonjour monsieur Wilder. Je vous remercie d'avoir prit le temps de vous déplacer au poste. Je me présente, agent Richard Turner.

Le ton de sa voix reste calme, même si au fond de lui, le flic aux aguets trépigne d'impatience. Son regard brun ne loupe rien des expressions du visage de l'homme qui lui fait face, même si ce dernier ne laisse pas passer grand chose. Généralement les gens sont stressés à l'idée de venir répondre à une convocation. C'est clair que l'on apprend rarement de bonnes nouvelles dans un pareil endroit. Richard ne perd pas de temps, fauche une chaise libre avant de l'installer devant son bureau. Le plus loin possible des chiottes, même s'il est vrai que dans un espace aussi réduit, il est impossible d'éviter de se retrouver régulièrement dérangé. Sourire contrit aux lèvres, Dick fait de son mieux pour parvenir à oublier l'odeur de viande faisandée qu'a laissé Carter dans son sillage. Expression rassurante à nouveau collée aux lèvres il remplit deux gobelets de café, planque ses biscuits au fond d'un tiroir près d'un sachet de croquettes molles au saumon puis s'installe à son tour.

-Ce n'est jamais drôle de recevoir une convocation. Mais je vous rassure, ce n'est rien de grave. Juste un point ou deux à éclaircir sur une demande de permis assez étrange.

Le sourire de Richard se fait toutefois un peu plus forcé, contredit sans le vouloir ses dires quand il décide d'entrer dans le vif du sujet sans prendre de gants. Dans une heure Mafdet aura terminé de donner son dernier cours et la voir débarquer sans crier gare n'est pas dans la liste des options choisies par le canadien. D'un geste souple il ouvre le dossier de demande de permis. Parle sans se presser, décrit son trouble alors que sa main dévoile déjà celui de l'urbanisme.

-Mon soucis est simple à comprendre. J'ai là un dossier de demande de permis pour de gros travaux. Pour un achat récent de la part d'un commerçant de la ville. Votre nom figure sur ce dossier.

Le canadien s'offre une légère pause. Ses dires trouvent sans difficulté écho dans l'esprit de l'architecte. C'est factuel, à un tel point que même le roi des idiots comprendrait sans mal de quoi il fait mention. À présent son ton est neutre, vierge de toute émotion quand à voix haute il énonce le réel problème.

-Le second dossier fait mention d'une grosse inondation. Un sinistre qui a touché la cave d'un autre bâtiment. Cela peut sembler très anodin, mais en fait ces bâtiments sont presque voisins. Et ce dossier explique sans détour que les dégâts se sont étendus aux caves des bâtiments alentours. Y comprit celle de l'achat récent de monsieur Amaro. Mais étrangement il n'est fait mention d'une cave à aucun moment dans la demande de permis pour les travaux.

Il appuie ses paroles avec des gestes précis. Montre les preuves trouvées du bout des doigts, sans jamais à aucun moment relever la tête vers le loup. Richard s'octroie même ce luxe, celui de boire une longue gorgée de café brûlant avant de finalement déglutir pour abattre son verdict.

-Une cave. Vous n'avez pas pu louper ça. Et pourtant vous vous êtes forcément rendu sur les lieux. Voyez vous je trouve que cette incohérence est suffisante pour faire bloquer le permis, c'est même déjà fait. Mais cela ne change rien sur le fait que j'aimerais que vous m'expliquiez les raisons de cette faute d’inattention. C'est pour ça que je vous ai demandé de venir.








   

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Chad Wilder
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MessageSujet: Re: Abus de filouteries [PV Chad]   Abus de filouteries [PV Chad] EmptySam 21 Mar 2020 - 16:06

Abus de filouteries
Chad
ft.
Richard
Le courrier était à l’en-tête de la police du conté, une convocation en bonne et due forme. Je l’avais posé sur ma table de travail avant de me faire couler un café et éplucher le reste de ce que le facteur avait posé dans la boîte aux lettres. Les flics passeraient après mes soucis d’approvisionnement sur mon chantier et d’une autorisation de raccordement électrique qui n’avait pas été transmise correctement. Quand tout le reste fut remis sur ses rails, je repris la convocation en main. Pas de motif, rien que le nom d’un agent, même pas celui de Jordan ou du shérif. Encore une broutille de droit commun, il est vain de tenter de chercher de quoi il s’agit, car cela peut aller d’une faute de conduite à un souci de voisinage ou encore tout autre chose. Je me pointerai à l’heure dite au poste de police, règle numéro un du bon citoyen : ne pas tendre de bâton à la police pour se faire battre, ils n’oublient jamais de s’en saisir.

***

Je me gare devant le poulailler central comme l’appelle Alessandro. C’est peut-être moqueur, mais une fois à l’intérieur, je trouve l’image appropriée. Un policier c’est plutôt large, soit des épaules, soit du ventre, alors quand on réunit tout ce beau monde dans un lieu dimensionné pour des Hobbits…

- Bonjour, je m’appelle…
- Voiture 3, appel sur la 3ème rue pour un accrochage.
- Bonjour ! Chad Wilder, c’est pour…
- Gary ! Où t’as mis le tampon dateur ?
- DTC…
- Très drôle, il est où ?

Ils seraient capables de me dire que je suis en retard. J’éternue un bon coup sur l’agent d’accueil.

- Je me demande si je n’ai pas attraper le corona chose, murmuré-je très bas.
- QUOI ?
- Puisque j’ai enfin votre attention…

Je lui glisse mon papier sous le nez, le gars se met à beugler le nom de l’agent Turner. Autant chuchoter en plein concert des Stones.

- Je vais vous amener à son bureau.
- Merci.

***

J’ai envie de sortir. Comment font-ils pour rester entassés ici ? Cela pue le fauve, le sol plastique et d’autres fragrances que je préfère ignorer. Que j’aurais préféré ignorer si on ne m’amenait pas pile au barycentre de la pestilentielle de ce lieu. Je respire doucement par la bouche, puisant le minimum vital dans ce remugle d’excréments et de nourriture avariée. Celui qui m’a accompagné s’enfuit rapidement vers son poste près de la sortie et de l’air pur du dehors.

- Bonjour monsieur Wilder. Je vous remercie d'avoir pris le temps de vous déplacer au poste. Je me présente, agent Richard Turner.

Je regarde le policier, puis son bureau et enfin sa poubelle riche d’un mug pour enfants. Je ne critique pas, Mick a une passion malsaine pour les figurines Batman. Le pire est qu’il a déjà eu un Robin dans sa vie… Je tente de faire bonne figure et inspecte la propreté de la chaise que l’on vient de me proposer. Une chance que je sois un lycan, cet endroit est bon pour vous envoyer à l’hôpital.

- Bonjour Agent Turner.

Sobre, poli, le regard dans ceux du monsieur comme me l’a appris mon père. « Regarde ailleurs et t’es coupable » me disait-il à propos de tout, que ce soit une négociation en affaire, un dîner mondain ou une convocation officielle. L'agent m’offre un gobelet de goudron liquide de la cafetière qu’il a à portée de main. Je regarde le gobelet effaré de constater que ce n’est pas une légende urbaine quand Jordan évoquait son "réveille-toi Lazare". Je regarde l’agent Turner me demandant s’il est constitué comme les canards : une bouche, un tuyau, un anus. Je me ressaisis, ce n’est pas le moment de sourire.

- Ce n'est jamais drôle de recevoir une convocation. Mais je vous rassure, ce n'est rien de grave. Juste un point ou deux à éclaircir sur une demande de permis assez étranges.

Ce qui n’est pas drôle est de devoir bosser ici. Je plains ce gars. « Richard Turner », il me semble avoir connaître ce nom, mais je n’arrive plus à le resituer. Je vois tellement de gens avec le chantier de la maison. Il ne me fait pas mariner plus longtemps et pose deux dossiers sur le fatras de son bureau. Je suis fixé, je reconnais aisément le dossier de permis de travaux pour l’Italien.

Et merde ! Ma cervelle carbure listant toutes les étapes de cette demande, cherchant la faille. À l’extérieur, j’affiche un visage curieux, mais sans plus.

- Mon souci est simple à comprendre. J'ai là un dossier de demande de permis pour de gros travaux. Pour un achat récent de la part d'un commerçant de la ville. Votre nom figure sur ce dossier.
- Je suis architecte et enregistré comme tel dans le registre de la chambre de commerce, dis-je pour justifier la présence de mon nom sur un tel document.

Le seul gag sur ce permis est le sous-sol. Ont-ils un double des archives d’urbanisme inconnu du péquin lambda ? Si c’est le cas, je ne vois pas où cela serait stocké, ils sont déjà à l’étroit aux services techniques. Devant moi, l’agent Turner fait son numéro de flic classique. D’abord la gentillesse avec les salutations polies, la minimalisation de l’affaire avec un « rien de grave », un « un ou deux points à éclaircir » et une offrande avec un gobelet de poison ébène. Suit la pause théâtrale après avoir lâché sa bombe. Les ennuis devraient arriver maintenant. Je me contente d’écouter.

- Le second dossier fait mention d'une grosse inondation. Un sinistre qui a touché la cave d'un autre bâtiment. Cela peut sembler très anodin, mais en fait ces bâtiments sont presque voisins. Et ce dossier explique sans détour que les dégâts se sont étendus aux caves des bâtiments alentour. Y compris celle de l'achat récent de monsieur Amaro. Mais étrangement, il n'est fait mention d'une cave à aucun moment dans la demande de permis pour les travaux.

Doigts directeurs sur des mentions manuscrites qui me sont présentées à l’envers, plis soucieux sur le front et comble de l’horreur, longue gorgée du breuvage infâme. Je ne peux pas réprimer une grimace devant ce spectacle. J’ai porté ma main devant mon nez, le parfum des toilettes juste à côté m’incommode.

- Une cave. Vous n'avez pas pu louper ça.
- Non.
- Et pourtant vous vous êtes forcément rendu sur les lieux.
- Exact.
- Voyez-vous je trouve que cette incohérence est suffisante pour faire bloquer le permis, c'est même déjà fait.
- J’en avertirai monsieur Amaro.
- Mais cela ne change rien sur le fait que j'aimerais que vous m'expliquiez les raisons de cette faute d’inattention. C'est pour ça que je vous ai demandé de venir.

Je le tiens !

- Sans vouloir vous froisser, argent Turner, dans le langage procédural d’un agent de police, le terme « faute » s’accorde avec « preuve tangible et irréfutable ». Pour éviter une "faute" de votre part, nous allons donc parler « d’éléments discordants », si vous le voulez bien. Cette demande de permis a été déposée en respectant les normes d’urbanisme en vigueur. Un chantier iso 9001 HQE. Monsieur Amaro est très sensible à l’environnement.

Aless' se moque de l'écologie comme de sa dernière paire de pompes à deux milles dollars, par contre insonoriser le tripot... Je garde ma tête de jeune fils de bonne famille avec une expression neutre. Turner s’attend à du malaise de ma part, voire une pointe de panique. Il ne peut pas savoir que les salons bostoniens apprennent la maîtrise de soi aussi bien que les rues de Harlem.

- Vous permettez ? demandé-je, avant de tourner ce dossier qui remet tout en cause dans le bon sens de lecture pour moi.

L’immeuble concerné est de la même période que celui qu’Alessandro achète. J’extrais les plans d’ensemble à la géométrie très similaires, l’escalier qui donne sur le sous-sol est au même endroit. Je sors chaque document et prends le temps de lire le moindre caractère. En vrai, je cherche un plan d’attaque pour contrer cet empêcheur de tourner en rond. Il est évident qu’il fait une fixette sur Amaro, car pour aller déterrer une inondation qui a eu lieu il y a plus de quarante ans et qui n’est mentionnées que sur un immeuble à trois numéros de celui d’Aless, cela prouve que j’ai un fouineur de première devant moi.

- Bien, dis-je en repliant le dossier avec un soin extrême. Il y a en effet un élément qui me manque. J’ai basé mes schémas sur ce que j’ai trouvé aux services techniques de la mairie et les métrés que j’ai pu faire sur place. Pas de cave sur les plans de la mairie. Pas de cave dans mes relevés.

Je le regarde le mettant au défi de m’accuser de mentir. Plus il commettra de bavures, plus facilement je m’extirperai de cet écueil. Ce qui est certain, Alessandro peut dire adieu à son tripot. Il va devoir passer par un prête-nom.

- Nous pouvons aller constater le premier point ensemble à la mairie, pour le deuxième, il me faut l’autorisation de monsieur Amaro et en cas d'un refus de sa part, vous pourrez visiter l’immeuble après avoir dérangé un juge pour qu’il vous établisse un mandat de perquisition.

L’accès à la cave a été comblé par de vieilles cloisons pour que cela ne fasse pas trop neuf et provisoirement donne l’impression d’un grand placard. Cette précaution ne visait pas la police, mais simplement le service d’urbanisme qui fait toujours une visite de contrôle en fin de travaux pour vérifier l’adéquation entre le permis et lesdits travaux. Je ne sais pas si l’Italien veut prendre le risque de retrancher Turner à ses ultimes limites. Il serait mieux qu'il accepte la visite sans papiers officiels.

- L’absence de cave dans les plans peut signifier qu’il n’y en a pas ou plus. Cette inondation est peut-être à l’origine de dommages irréversibles qui l’ont condamnée. Les normes sur les risques naturels se sont renforcées.


© Fiche by Mafdet Mahes

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MessageSujet: Re: Abus de filouteries [PV Chad]   Abus de filouteries [PV Chad] EmptyMer 25 Mar 2020 - 18:37




 


Abus de filouteries
FT Chad Wilder


 



Il est presque fier de lui, en effet il est parvenu à s'exprimer sans bafouiller. Et surtout il a réussi à garder son enthousiasme à l'idée d'avoir de quoi coller des bâtons dans les roues d'Amaro pour lui. Richard n'a pourtant pas le temps de savourer ce petit instant bien longtemps. Quand l'architecte se décide à ouvrir la bouche, ce n'est là que reproches et soupçons à propos d'une possible incompétence du canadien qui se font entendre. Un pli aussi soucieux que surpris se fait une place de choix sur le front du père de famille quand il comprend qu'une mauvaise utilisation d'un mot est en train de le pousser dans une impasse. Wilder cause, ne s'arrête plus, devient de moins en moins clair au fil des phrases qu'il débite. C'est comme une récitation bien apprise. Dick imite la carpe un bref instant, reprend une gorgée de café pour éviter de passer pour un guignol en uniforme. Sa belle assurance se prend du plomb dans l'aile et il est même reconnaissant quand l'autre se stoppe enfin.

Amaro est le roi de l'embrouille et visiblement il a su s'entourer de personnes dotées de talents identiques aux siens lorsqu'il s'agit de faire se sentir mal les gens. Tout ça à cause d'une erreur de vocabulaire et le voilà qui se retrouverait presque rangé du côté des coupables dans la bouche de ce monsieur Wilder. S'il ne le savait pas proche de Mafdet, Dick se permettrait de le secouer un peu. En tout cas verbalement. Mais il ne veut pas causer de soucis à un des proches de sa belle et se contente donc de forcer son sourire quand l'homme tire les dossiers devenus accusateurs à lui.

Il y a des situations où le calme demeure la meilleure des armes. Et c'est clairement dans ce cas de figure qu'il se trouve actuellement. S'il devait brusquer l'autre, Richard prendrait le risque de perdre toutes ses chances avec lui. Le canadien pioche donc dans son stock de patience, réserve presque inépuisable de calme dont sont dotés la plupart des parents solo face à l'adversité. Serein, il observe l'architecte en action, sans jamais oser le couper dans sa réflexion. Les prochains coups du canadien devront être joués finement s'il veut faire oublier sa précédente incartade à ce Chad.

-Si vous n'avez pas vu de cave sur place c'est encore plus étrange que je le pensais.

Cette fois nulle accusation sous-jacente dans les propos du policier. Juste une constatation qui va de paire avec les dires de l'architecte. Il a presque retrouvé le ton calme qu'il avait perdu en cours de route alors qu'il présentait les faits à celui qu'il devine être un loup au vu des maigres indications données par la féline. Même si Willem lui a déjà dit que les meutes n'étaient pas entièrement composées d'êtres surnaturels, le flic ne peut s'empêcher de faire ce rapprochement. Mais rien de grave dans le fait de ne pas être fixé sur ce sujet car après tout ce n'est pas comme si la nature réelle de Wilder avait une quelconque importance dans leur entrevue. Quand son regard croise celui de Chad, Dick devine sans mal à la posture de ce dernier qu'il n'attend qu'une chose. Une nouvelle erreur de sa part. Mais le canadien refuse de lui offrir ce plaisir.

Il en est certain, ce gars trempe dans les affaires du truand déguisé en patron de bar. Richard ignore juste pourquoi et à quel point. Il ne peut s'empêcher de se dire que tout cela ne colle pas avec Mafdet et l'image qu'il se fait de la meute de cette dernière. Il y a donc anguille sous roche. C'est finalement avec un sourire chaleureux que Richard répond avec un peu trop d'engouement à la proposition de l'autre.

-Disons qu'un petit tour à la mairie me rassurerait. Et si Monsieur Amaro pouvait accepter que je me rende sur place cela nous éviterait à lui et moi de devoir en venir à une situation négative qui impliquerait un mandat.

C'est faux. Il adorerait avoir un jour l'occasion de se pointer devant Amaro, un mandat à la main. Juste pour connaître la satisfaction d’avoir réussi à le faire plier. Au moins une fois. Richard ne désespère pas de voir ce moment arriver. Cela justifierait amplement toute cette enquête clandestine qu'il mène depuis déjà plusieurs mois au sujet de cet homme. Et ce serait une véritable victoire personnelle suite à l'échec de Sacramento. Mais il doit savoir rester discret pour l'instant. Si ses erreurs passées lui ont apprit quelque chose, c'est bien qu'il ne doit jamais vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué.

-Cette visite à la mairie. Vous avez du temps devant vous aujourd'hui pour la faire ? Cela m'arrangerait de ne pas avoir à vous faire déplacer une nouvelle fois pour ce qui ne semble finalement être rien de plus qu'une broutille.

Retour du gentil sourire. Tout à son rôle de flic sympa, Richard referme les deux dossiers sans même y prêter attention. Quand Monsieur Wilder lui confirme qu'il peut en effet lui accorder un peu temps, c'est finalement avec une joie non feinte que Dick ouvre un de ses tiroirs pour y récupérer les clés de sa voiture de patrouille. Il referme le tout, bienheureux d'avoir une occasion de quitter son bureau. En effet depuis qu'il a chassé du chasseur avec Doug dans ce vieux parc d'attraction, on lui laisse encore moins le droit de sortir qu'avant. Le shérif le prend même pour une femme de ménage, lui demandant régulièrement de nettoyer la cafetière et les WC du poste de police. Un traitement pas toujours simple à assumer pour celui qui fait ce job depuis plus de quinze ans.

-On va prendre une voiture officielle. Je vous ramènerais au poste en fin de journée et vous pourrez repartir avec votre jolie voiture monsieur Wilder. Ne vous forcez pas à boire votre café, il est immonde. On le propose aux visiteurs uniquement par politesse.

Dick se redresse sans perdre de temps, termine son propre gobelet de goudron avant de le jeter dans sa corbeille avec ce qui était une de ses tasses favorites. Il fauche les dossiers pour ne pas les oublier. Normalement il reste des copies à la mairie, mais il n'a pas envie de perdre de temps avec les formalités administratives. Quand l'architecte remarque les propos du canadien au sujet de sa voiture, ce dernier se contente de sourire. Amusé et un brin moqueur avant de lui souffler sur le ton de la confidence.

-J'aime savoir où je met les pieds Chad.

[...]

Sciemment décidé à ne pas engager la conversation avec celui qui se trouve sur le siège passager de la voiture de patrouille, Dick se contente de conduire, chantonne doucement un vieux tube sans jamais quitter la route des yeux. Pourtant il sent les regards parfois insistants de Wilder lorsqu'ils se posent sur lui. Il espère bien que Mafdet n'a pas parlé à cet homme de son petit ami flic. Il joue avec le feu et craint une possible dispute entre la féline et lui. Si l'unique fois où ils ont parlé de cette enquête, il s'est contenté de faire comme si rien ne s'était passé une fois le dossier rangé, il devine sans mal que son action présente pourrait entacher sa relation avec sa belle. Ses mains se crispent un bref instant autour du volant alors qu'il se fait violence pour ne pas penser au pire. Serre les dents quand celui qui se tient près de lui remarque son état de stress et en fait mention à voix haute.

Le canadien inspire longuement puis souffle quelques mots. Ne ment pas. Enfin pas vraiment. De toute façon si l'architecte est un loup, manquer d’honnêteté n'est pas une solution envisageable.

-Questionnement personnel.

Il n'en dira pas plus. Pour ne pas s'attirer d'ennuis. Quand il gare enfin la voiture près de la mairie, il coupe le contact rapidement avant de demander sur le ton de l'innocence.

-C'est sans doute étrange comme question, mais comme je vous l'ai dit j'ai fait quelques recherches en amont avant de vous convoquer.

C'est surtout parce qu'un type comme Amaro ne laisse aucune place à l'hésitation qu'il s'est donné ce mal. Les erreurs se paient toujours au prix fort avec ce genre de phénomène.

-Vous faites plus dans le registre de la maison de luxe je crois. Et vous êtes sur le marché depuis peu de temps en comparaison avec certains de vos confrères. Je suis étonné qu'un homme comme Monsieur Amaro ait opté pour du sang neuf alors qu'il aurait sans doute été plus sécuritaire de contacter une personne avec plus de bouteille dans le milieu de la rénovation. Ce n'est pas que je doute de vos compétences, je suis juste surpris.

Il pèse ses mots. Depuis le début de leur rencontre, il a bien comprit que cet homme pouvait se servir de ses paroles pour les retourner contre lui. Une fois lui a servit de leçon et il ne veut pas renouveler l'expérience.









   

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MessageSujet: Re: Abus de filouteries [PV Chad]   Abus de filouteries [PV Chad] EmptyJeu 2 Avr 2020 - 16:56

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Je rage intérieurement : quelqu’un n’a pas fait son travail correctement aux services techniques, cette inondation aurait dû apparaître dans le dossier de l’immeuble et non dans un autre. Comment puis-je tourner cet imprévu en ma faveur ?

- Si vous n'avez pas vu de cave sur place, c'est encore plus étrange que je le pensais.
- En effet.

Me croit-il, ou laisse-t-il pisser pour me rassurer et mieux attaquer plus tard ? Si une partie de moi scrute la moindre réaction de l’agent Turner, en arrière-plan je suis en train de défiler tous mes cours sur les droits en urbanisme.

Une inondation, cela explique le sol raviné de la cave. J’avais pensé à des infiltrations. Je visualise parfaitement ce vaste sous-sol, les travaux que j’avais prévu d’y faire avec un sas trompeur qui laisse penser à une cave ordinaire de petite taille, puis la pièce où serait le tripot et l’issue de secours camouflée dans un faux mur de brique qui donne sur les égouts. Amaro avait sa technique pour rendre l’endroit miteux en moins d’une minute avec des plateaux de tables réversibles et autres astuces dont j’ai préféré ignorer l’existence.

- Disons qu'un petit tour à la mairie me rassurerait. Et si Monsieur Amaro pouvait accepter que je me rende sur place, cela nous éviterait à lui et moi de devoir en venir à une situation négative qui impliquerait un mandat.

Le beau menteur, il a tout du chien qui vient de flairer un os. Et j’y connais assez en animal pour savoir que ça mord vite quand on s’interpose devant leur cible.

- Cette visite à la mairie. Vous avez du temps devant vous aujourd'hui pour la faire ? Cela m'arrangerait de ne pas avoir à vous faire déplacer une nouvelle fois pour ce qui ne semble finalement être rien de plus qu'une broutille.
- Je vais décaler la visite du menuisier sur mon chantier avant d’appeler monsieur Amaro. Autant régler cette affaire tout de suite, vous semblez être du genre à faire un ulcère facilement.

S’il n’en a pas un à cause du breuvage infect qu’il boit, c’est qu’il a l’estomac résistant. Je me lève et m’éloigne un peu pour passer mes coups de fil. Turner me suit du regard, n’ose pas me suivre, mais il se tend sur une fesse dans l’espoir de choper mes conversations. Un gars porte plainte pour tapage nocturne à trois bureaux de là, il pourrait presque écoper d’une amende pour tapage diurne tant il beugle son mécontentement contre un voisin un peu trop fan de métal. Je suis obligé de couvrir mon téléphone de ma main, mais je suis certain que Turner ne peut pas entendre ce que je dis. J’expédie le menuisier en dix secondes, avec Mick on lui file un sacré paquet d’argent pour qu’il s’offusque d’un report d’une demie journée. J’appelle Amaro avec le signal convenu : une sonnerie je raccroche, une deuxième, je raccroche à nouveau, puis il me rappelle. Ainsi, il a le temps de se coller dans un lieu à l’abri des oreilles indiscrètes, qui doit être son bureau au Pink Print vu l’heure qu’il est.

Je lui explique le souci, il bondit à la mention du nom de l’agent qui fouine là où il ne faut pas. Je grimace, il semble y avoir un passif entre ces deux-là. Aless’ me demande s’il y a un risque de laisser Turner visiter. Je réponds que non. C’est un flic sans connaissance des bâtiments et nous avons camouflé l’accès de la cave pour la visite des agents de l’urbanisme autrement plus calés en architecture de bâtiments. Et qu’au cas où il défonce une cloison (ce qui serait complètement illégal), je trouverais bien une explication technique à lui sortir. Alessandro jure, car s’en est fini pour installer son tripot à cet endroit. Cela retarde ses plans, je n’aimerais pas être près de lui aujourd’hui, il va être d’une humeur exécrable. Je reviens m’asseoir devant l’agent Turner et lui annonce que j’ai tout arrangé. Il ne cache pas sa joie. Quand il ouvre son tiroir pour prendre ses clés de voiture, j'aperçois quelque chose d’incongru : un sachet de croquettes au saumon, et pas n’importe quelle marque. Turner enchaîne et m’empêche d’approfondir cette impression de déjà-vu.

- On va prendre une voiture officielle. Je vous ramènerais au poste en fin de journée et vous pourrez repartir avec votre jolie voiture monsieur Wilder. Ne vous forcez pas à boire votre café, il est immonde. On le propose aux visiteurs uniquement par politesse.
- Je n’allais rien en faire.

Je n’aime pas le ton qu’il a pris en parlant de ma « jolie voiture », encore un bouseux envieux. Il prend ses aises, maintenant que j’ai accédé à sa requête. Je le lui fais remarquer.

- Votre remarque sur ma voiture est déplacée, agent Turner.
- J'aime savoir où je mets les pieds Chad.

« Chad », il continue en m’appelant par mon prénom. Il joue au gros dur, à l’inspecteur Colombo, mais il n’en a pas la carrure, sa tasse de gamin dans sa poubelle trahi l’homme immature qu’il est.

La « balade » en voiture de police est mortellement silencieuse. Turner reste muet, mais son corps parle pour lui.

- Vous semblez stressé, agent Turner.

J’ai envie de lui proposer une pause beignet, mais cela ne serait pas raisonnable et puéril. Je me contente d’imaginer sa réaction pour évacuer l’agacement qui m’anime. Je suis en colère aussi contre Aless’ qui me colle dans le pétrin avec lui.

- Questionnement personnel.

Je le regarde, lève un sourcil septique. D’où il la sort cette phrase que je vois plus dans la bouche de Tobias Rapier avec le ton sec qui le caractérise. Nous arrivons à la mairie. À force de traîner ici, je connais le bâtiment comme si je l’avais construit.

- C'est sans doute étrange comme question, mais comme je vous l'ai dit j'ai fait quelques recherches en amont avant de vous convoquer.
- Et pas un seul PV pour excès de vitesse ? C’est cela qui vous a choqué, moi et ma « jolie voiture » ?

Ça grimace en face, pourtant mon casier est vierge de toute infraction, lisse comme une boule de billard.

- Vous faites plus dans le registre de la maison de luxe, je crois.
- C’est exact, du moins c’est mon intention de carrière.
- Et vous êtes sur le marché depuis peu de temps en comparaison avec certains de vos confrères.
- Quel sens de l’observation, agent Turner, je suis impressionné par la police de ma ville.

Je me fous de sa tête tout en gardant un visage et une expression avenante. L’hypocrisie et la perfidie sont un art dans le milieu d’où je suis issu, et j’ai eu le meilleur professeur en la matière, l’un des plus grands requins de la finance du pays.

- Je suis étonné qu'un homme comme Monsieur Amaro ait opté pour du sang neuf alors qu'il aurait sans doute été plus sécuritaire de contacter une personne avec plus de bouteilles dans le milieu de la rénovation. Ce n'est pas que je doute de vos compétences, je suis juste surpris.
- C’est que certaines personnes sont plus aptes que d’autres à dénicher les nouveaux talents. De plus, monsieur Amaro est plus susceptible que d’autres de se lancer dans un projet de grande envergure. Il faut savoir se placer, agent Turner, si on ne veut pas rester en bas de l’échelle sociale.

J’ai légèrement appuyé sur « autre » pour qu’il comprenne que je parlais de lui.

- Nous allons consulter ces archives, ou vous voulez continuer sur le monde de l’architecture et des ficelles du métier ?

*

Nous entrons dans le hall et ne sommes pas encore arrivées à l’accueil que l’employée de mairie se lève en souriant et fait le tour du comptoir pour me saluer d'une accolade amicale.

- Chad ! Ce n’est pas en t’enfermant dans les archives que tu vas peaufiner ton bronzage !
- Je passe assez de temps sur les chantiers pour cela Marylou. Tu as fait la paix avec Margot ?
- Oui ! Cette idiote avait juste monté ce plan pour me rendre jalouse, car elle avait des doutes sur nous deux.
- Je ne me risquerais pas à cette méthode avec Mick, il est presque jaloux des beaux acteurs qui passent sur la télé. On pourrait aller se boire un pot ensemble un de ces quatre ?

Le flic se rappelle à notre souvenir avec la délicatesse qui le caractérise. Marylou appelle l’agent en poste pour le prévenir de notre arrivée.

- Il a besoin d’une explication de texte, glissé-je malicieusement à la secrétaire, tout en sachant que le policier entend parfaitement ce que je murmure.

*

- Salut Fred !
- Le soleil cogne si fort pour que tu viennes t’enfermer ici ?
- Tu ne vas pas t’y mettre aussi ! Bien passé, l’anniversaire de ta petite ?

Si l’agent Turner n’a pas compris que j’étais ici comme chez moi, c’est que son cerveau s’est fait la malle.

- Nous venons vérifier un dossier d’urbanisme qui contrarie l’agent Turner. Celui de l’immeuble de la basse-ville. Semblerait qu’il soit incomplet et que le bâtiment ait subi une inondation majeure il y a quarante ans.

En le disant, une lumière se fait.

- C’est que c’est un motif valable pour annuler la vente !

L’employé de mairie blêmit. Car les frais engagés pourraient être facturés aux services techniques si cela s’avérait exact. Un jour mon père m’avait expliqué que pour contrer une administration, le meilleur moyen de s’en sortir était de lui coller une autre administration dans les jambes.

- T’inquiètes pas Fred, je suis certain de pouvoir arranger les choses avec l’agent Turner.

J’entendrai presque les dents du policier grincer tant il serre les mâchoires. Depuis ma deuxième année d’étude, je m’évertue à soigner mon contact auprès du personnel de la mairie, car ils sont un passage obligatoire pour mon métier. Et me lier d’amitié avec eux est très utile, autant qu'agréable. Je laisse le flic me guider vers la bonne étagère. Je me garde d’intervenir, lui laissant le contrôle de la situation. Il prend donc le dossier de l’immeuble qu’Aless est en train d’acheter et celui de l’autre immeuble à trois numéros de là. Il les pose sur une table prévue à cet effet. Je le laisse ouvrir les documents, puis me penche par-dessus son épaule pour regarder l’immeuble qui me concerne.

- Pas de mention de cave sur le dossier que j’ai pu consulter pour établir les travaux pour le bar de monsieur Amaro. Vous êtes d’accord avec moi ? Je n’invente donc rien.

En me reculant pour laisser de l’air au policier mon talon écrase quelque chose au sol. En baissant les yeux, je vois de la mort-aux-rats, une précaution habituelle dans les archives, ces bestioles peuvent faire de terribles ravages. Ces grains rouges me font me souvenir du sachet de croquettes pour chat aperçu dans le tiroir du policier.

L’agent Turner ne voit pas mon air ahuri quand je fais le lien entre son nom qui me disait vaguement quelque chose et ma druidesse qui un soir au manoir avait annoncé sur un ton neutre avoir trouvé l’âme sœur. Le sarcasme de Peter avait fermé le robinet des confidences après l’énoncé du nom de l’heureux (ou malheureux) élu. Je cache mon hilarité naissante avec ma main quand le policier se retourne vers moi, le doigt pointé sur le dossier de l’autre immeuble et la mention de l’inondation.

- Il y a donc bien un vice de forme. Une inondation qui conduit à un dédommagement montre qu’il y a eu une atteinte aux fondations de l’immeuble. La cave a peut-être été comblée pour remédier au problème. Quoi qu’il en soit, je dois avertir mon client, il est en droit de se désister de l’achat. Mais cela va coûter un bras à la municipalité. J’espère pour vous que vous n’aurez jamais de permis de travaux à demander dans l’avenir, ce genre d’administration est très rancunière… Il me faut la position de monsieur Amaro avant la visite de l’immeuble. Il pourrait demander la présence d’un huissier de justice pour constater la tromperie. Le vendeur peut aussi se retourner contre la mairie.

Je désigne le dossier de l’immeuble qui ne me concerne pas.

- Cette affaire pourrait soulever des problèmes dans les immeubles mitoyens. Imaginez que cela conduise à un arrêté d’insalubrité ! Il faudra reloger du monde ! Voilà une affaire d’envergure, Agent Turner. Une vraie avalanche d’ennuis en perspective. Il risque d’y avoir beaucoup de gens furieux ! Je vous attends dehors, je vais informer monsieur Amaro. Je vous laisse ranger ces dossiers à leur place.



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Richard Turner

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MessageSujet: Re: Abus de filouteries [PV Chad]   Abus de filouteries [PV Chad] EmptyJeu 9 Avr 2020 - 14:25




 


Abus de filouteries
FT Chad Wilder


 

Ils entrent dans le hall de la mairie. Ici tout est petit si l'on compare cet environnement à ce que le canadien a connu à Vancouver ou même à Sacramento. Tout le monde se connait et c'est sans surprise que le flic assiste à un spectacle des plus attendus. Monsieur l'architecte discute avec la gratte papier de l’accueil. Et voilà que ça commence à copiner sans omettre d'oublier la présence de Richard. Toutefois ce dernier ne s'offusque pas d'être relégué de la sorte au stade plante verte. Il patiente gentiment, regarde tour à tour des tableaux aux couleurs vives accrochés au mur, tente de toucher les feuilles d'un arbuste installé dans un coin. Met un peu de temps à comprendre que ce dernier n'est composé que de plastique. Rapidement il s'ennuie et quand derrière lui ça parle de soirée entres potes il préfère mettre fin à ce calvaire au plus vite. Il a déjà une ado à la maison et ne veut pas subir un traitement semblable durant ses heures de travail.

-Je croyais qu'on était là pour faire quelque chose d'utile. Vous pourrez parler avec votre copine un autre jour.

Richard lève les yeux au plafond quand Monsieur Wilder joue les comiques de service. Avec une insolence qui se fait tout sauf délicieuse. Le flic serre les dents, se demande si au vu de la tournure de ce moment, il n'est pas en train de tout simplement perdre son temps.

[...]

À l'étage du dessous ce n'est pas vraiment mieux. Richard voit sa patience gagner des ailes pour se barrer au plus vite. Dents toujours serrées il peine à lâcher un bonjour à ce Fred qui les accueille. Ou en tout cas qui se donne cette peine face à l'architecte. Dick reprend son rôle de spectateur, fixe ce duo qui ne cesse de titiller ses nerfs. Il s'est promit de rester gentil et courtois avec le beta de la meute de Maf. Ne pas prendre le risque que ce gars aille pleurer dans les jupes de sa druide au sujet d'un méchant flic qui l'aurait un peu trop secoué, verbalement bien sur. Wilder expose enfin la raison de leur venue dans cet antre à rats de bibliothèque. Puis Ô miracle semble comprendre où se situe le soucis dans toute cette histoire. Il prend son rôle de victime très à cœur, ajoute son copain à l'équation. Puis à la grande surprise de tous met le flic à contribution. Richard se tend encore un peu plus, puis mâchoire crispée marmonne quelques mots sur le ton de l'impatience.

-Ça ne risque pas d'arriver si on ne me laisse pas faire mon métier.

Métier que d'ailleurs il a déjà fait en venant ici pour se perdre entre tout ces dossiers qui prennent la poussière. Il est peut être un peu simplet mais il est parvenu à trouver ce que l'autre guignol n'a même pas remarqué en allant faire ses plans pour le dernier achat d'Amaro. Ne pas voir une cave c'est quand même un peu gros comme bourde. Lorsque enfin Fred s'éloigne, Richard ne perd pas une seconde avant de se diriger vers l'endroit qui lui a confirmé qu'une tuile se cachait peut être derrière cet achat. Il est déjà venu dans ce lieu, suffisamment de fois pour ne pas hésiter en se postant devant l'emplacement où se trouvent les dossiers qui ont servis à justifier le fait qu'il bloque la demande de l’enflure en Armani. Il les ramène devant l'architecte, les ouvre sur un coin de table sans sourciller. Pas certain de savoir conserver son calme encore bien longtemps si l'autre sous entend une fois de plus qu'il n'est qu'un abruti. Le tout sans jamais l'insulter directement.

-En effet pas l'ombre d'une cave sur ces documents. Mais sur l'autre dossier il en est fait mention. De façon suffisamment claire pour que même un simple flic comme moi s'en rende compte. J'ai trouvé ça sans trop de mal en venant ici. Fallait juste chercher un peu.

Du bout des doigts de sa main gauche il tapote le dossier d'urbanisme qui fait mention de cette inondation qui s'est étendue à une partie de la rue il y a quelques décennies. Il n'en démordra pas, persuadé d'avoir trouvé un truc qui mérite qu'on s'attarde. Un vice, un petit bout de quelque chose qui peut lui suffire pour gâcher les projets d'Amaro. Buté Richard ne lâche pas des yeux ce dossier. Preuve directe de son entêtement. Il a fouillé sans savoir s'il parviendrait à trouver quelque chose. Des moments, des heures volées sur ce temps libre dont il manque déjà cruellement. Le policier fronce les sourcils quand l'architecte annonce la couleur. Des dires crus et sans doute vrais. Tout cela pourrait se retourner contre le canadien si les administrations concernées par cette vente en venaient à être vexées par les conséquences de ses recherches. Son cœur fléchit quelques secondes. Dit comme ça c'est en effet presque effrayant. Mais Dick est certain de la justesse de son action. On ne devient pas flic pour être aimé. Et parfois il faut savoir prendre le risque de s'attirer les foudres de quelques grincheux pour mener son devoir à bien.

Lèvres closes le policier ne pipe pourtant pas mot. Laisse l'autre continuer sur la voie de ce qui ressemble à de l'intimidation, suffisamment bien menée pour que celui qui en use ne risque rien. Finalement Wilder se casse, laisse le canadien tout à ses pensées. Quelques secondes de calme c'est tout ce qu'on veut bien lui accorder car Fred ne perd pas de temps avant de venir le rejoindre.

-Chad est parti ?

Un long soupir de lassitude. C'est là la seule réponse que l'homme en uniforme daigne offrir au gratte papier qui ne comprend pas que si Chad n'est plus là, c'est certainement parce que oui, il est parti !

Il le sent dans son dos, le souffle de l'employé de mairie qui n'attend qu'une seule chose, que le flic daigne quitter les lieux à son tour. D'un geste sec qui trahit sa colère le canadien referme les dossiers. Fred tend une main vers le tout pour faire retrouver leur place habituelle à ces documents mais Richard ne lui en laisse pas le temps. Une fraction de seconde c'est tout ce qu'il faut à Dick pour faucher ce qui se trouve sur la table avant qu'il ne se dirige à nouveau vers les bonnes étagères.

-Monsieur l'agent j'aurais pu m'en charger.
-Je m'en doute mais j'ai tout mon temps vu que monsieur Wilder est allé expliquer à l'acheteur de l'immeuble qu'un flic casse-bonbons a trouvé une cave qu'il n'a pas réussi à voir. Et il paraît qu'en plus vous allez tous me détester. Si c'est pas géant tout ça.

Fred cherche une logique qui lui échappe. Le gratte papier n'a pas le temps de poser ses questions à voix haute que déjà Richard s'éclipse d'un pas furieux en direction des étages supérieurs.

[...]

Son doigt glisse, fait passer le petit ourson en gélatine rouge sur la rangée située à sa droite. Concentré comme jamais, le flic ne quitte pas l'écran de son portable des yeux, si proche de cette fin de niveau qui lui met la cervelle en déroute depuis déjà trois jours. Confortablement calé au fond de son siège il fait vaquer son regard chocolat sur le haut de son écran. Calcule, additionne les boules de bubblegum et soustrait les taches de gélatine. Il sursaute, perd toute concentration et sacre sauvagement quand un coup donné à la vitre lui vole sa quiétude. De l'autre côté Wilder et sa sale trogne de premier de la classe l'observent. Un coup l'écran, un coup le flic et de nouveau le téléphone. Grand sourire de la part de l'architecte et finalement le canadien se rebelle. S'excuse aussi. Drôle de mélange.

-La prochaine fois vous pourrez grimper dans la voiture. Elle est ouverte en plus ! Je suis désolé mais je ne voulais pas vous déranger pendant votre appel.

Richard se courbe, pose son portable sur le tableau de bord tout en ouvrant la portière du côté passager après un dernier exercice digne du cirque du soleil. Il ne lui faut pas beaucoup de temps avant qu'il ne réussisse à retrouver tout son sérieux. Main droite serrée autour de sa clé, il ne regarde même pas son passager quand il le questionne.

-Bon. Monsieur Amaro est-il d'accord pour qu'on aille sur place ? À vrai dire j'en vois de moins en moins l'utilité et vous avez l'air de bonne fois. 

...Ou presque.

-Et pour cette histoire d'insalubrité je pense qu'il faut voir les choses de façon positive. Si une telle sentence devait tomber c'est qu'elle serait justifiée. Les gens de la mairie sont censés savoir pour l’inondation donc si c'était insalubre ça se saurait déjà. C'est juste vous et votre client qui n'avez pas jugé utile de faire des recherches poussées sur ce sujet. Mais je pense que la mairie vous en tiendra pas rigueur s'il devait y avoir de gros soucis sur ce point. Fred a l'air de bien vous aimer, donc même si ça lui a fait un petit choc quand je lui ai expliqué ce qui se passait, ça ne devrait pas entacher votre relation avec les gens qui bossent ici.  

Dick tourne la tête vers l'architecte, sourire aussi éclatant qu'agaçant rivé aux lèvres. Puis sans un mot de plus il met le contact et les emmène à leur prochaine destination.

[...]

Beyonce hurle dans l'habitacle de la voiture de patrouille. Par automatisme le flic cherche une place de stationnement du regard en vain avant de se faire une raison. Cet appel aussi important puisse t-il être devra attendre qu'ils soient à l'arrêt.

[...]

Beyonce beugle à nouveau et Dick finit par se garer sur une place libre devant une petite supérette. Après un long soupir il attrape son téléphone et répond, sourcils froncés dès l'instant où il reconnait le numéro de la personne qui tente de le joindre durant ses heures de service. Sans s'inquiéter du regard que lui jette Wilder, il ouvre la bouche dans le vide quand à l'autre bout de la ligne la directrice de l'école de son fils lui apprend que ce dernier a une nouvelle fois joué à l'abruti. Richard laisse la bonne dame s'énerver puis rétorque quand elle lui demande l’impensable.

-Je suis au travail. Je peux pas venir récupérer Troy. Sa sœur passera à la fin de ses cours comme d'habitude. Mettez le au coin ou bien filez lui des lignes j'en sais rien !

Visiblement activer l'alarme incendie de l'école est un crime qui mérite une exclusion directe. En tout cas c'est l'avis de cette femme qui tient le crachoir de Richard, exigeant qu'il vienne chercher son fils immédiatement avant qu'il ne fasse une autre bêtise. Le canadien laisse couler son regard chocolat sur son co-pilote, soupire puis tente une dernière négociation.

-Je suis policier. Je peux pas le prendre avec moi au boulot. Essayez de comprendre ma situation s'il vous plaît.

Silence sur la ligne. Richard capitule.

-J'suis là dans dix minutes.

Il raccroche sans perdre plus de temps, puis lève les yeux au ciel quand l'architecte lui demande s'il compte vraiment faire entrer un môme dans l'équation.

-Vous croyez que j'ai le choix ? J'espère que vous n'avez rien contre les gamins.








   

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MessageSujet: Re: Abus de filouteries [PV Chad]   Abus de filouteries [PV Chad] EmptyMar 14 Avr 2020 - 16:24

Abus de filouteries
Chad
ft.
Richard

J’ai laissé l’agent Turner seul pour avoir de l’espace quand je vais appeler l’Italien qui va hurler. Cela ne manque pas, mais en plus des noms d’oiseaux destinés au flic, je me mange un reproche : je n’ai pas fait disparaître TOUS les documents faisant mention de cette cave. Il est bien gentil Don Amaro, mais comment je pouvais savoir qu’il y a quarante ans les types de la mairie n’ont pas fait leur boulot ! Je lui fais remarquer que si Turner a réussi à déterrer ce vieil os, et vu le niveau de l’oiseau, cela signifie que le policier a d’autres choses sous la manche et qu’il ne lui manque qu’à faire le lien avec lui.

- Le mieux est d’invoquer un vice de forme et annuler la vente. Tu veux être là quand il visite les lieux ?
- Non, et débarrasse-t’en !
- Je ne donne que dans la maçonnerie légale moi !

Le bip de l’appel raccroché me répond. Saloperie ! Je dois garder mon calme et penser de manière professionnelle. J’ai eu des cours sur la partie juridique qui entoure mon métier. Entre les malfaçons, les soucis liés aux permis de construire, les terrains qui passent inondables du jour au lendemain, je connais l’éventail des soucis auxquels je ne manquerai pas d’être confronté.

Or, ici il s’agit d’un flic qui semble faire du cas Amaro une affaire personnelle. Je dois déjà me mettre hors de cause. Ce qui me semble bien parti : le dossier d’urbanisme était incomplet et on ne peut pas me reprocher de ne pas avoir trouvé le lièvre soulevé par Turner. Reste à sauver les fesses du rital. Je peux compter la palanquée d’avocats de haut niveau auxquels il doit avoir accès. Cela m’embête d’invoquer le vice de forme, car je tiens à ma bonne entente avec les gens de la mairie. Ensuite, l’erreur est vieille de quarante ans, le bazar que cela engendre n’est dû qu’à l’acharnement du flic. Il n’aurait rien fait, il n’y aurait pas deux administrations dans la panade. Je vais creuser sur cette voie et noyer Turner sous les procédures juridiques. Car à un moment, il va devoir expliquer comment il a eu l’idée d’aller regarder les dossiers des immeubles adjacents. De là à prouver qu’il s’acharne sur Amaro, il n’y a qu’un pas.

*

L’autre nigaud joue à Kandy Crush dans sa voiture : le summum du désolant. Je tape à sa vitre, il hésite entre perdre des points dans sa partie et s’occuper de l’affaire en cours et qui me bouffe ma journée de travail. Gonflé le poulet.

- La prochaine fois, vous pourrez grimper dans la voiture. Elle est ouverte en plus ! Je suis désolé, mais je ne voulais pas vous déranger pendant votre appel.
- Je préfère avertir avant de monter dans une voiture avec un homme armé !

Oui, car l’autre joueur porte une arme avec l’autorité de s’en servir ! Je fais le tour de la voiture pour m’installer sur le siège passager. Ce soir, il faut que je demande à Mick un long massage pour me détendre de cette horrible journée.

- Bon. Monsieur Amaro est-il d'accord pour qu'on aille sur place ? À vrai dire j'en vois de moins en moins l'utilité et vous avez l'air de bonne foi.

Sérieux ? Je me retourne vers lui, choqué. Il m’a fait tout ce cirque pour en arrêter là ? C’est étrange. Je n’imaginais pas qu’il se dégonflerait si facilement. À moins qu’il ait un atout planqué sous un beignet que je n’aurais pas flairé. Je reste méfiant.

- Et pour cette histoire d'insalubrité je pense qu'il faut voir les choses de façon positive. Si une telle sentence devait tomber, c'est qu'elle serait justifiée. Les gens de la mairie sont censés savoir pour l’inondation donc si c'était insalubre ça se saurait déjà.
- Ça date de quarante ans et vous avez vu comme moi la légèreté du dossier de l’immeuble que monsieur Amaro veut chercher.
- C'est juste vous et votre client qui n'avez pas jugé utile de faire des recherches poussées sur ce sujet.
- Hey ! J’ai fait mon travail, c’est la mairie qui n’a pas fait…
- Mais je pense que la mairie vous en tiendra pas rigueur s'il devait y avoir de gros soucis sur ce point. Fred a l'air de bien vous aimer, donc même si ça lui a fait un petit choc quand je lui ai expliqué ce qui se passait, ça ne devrait pas entacher votre relation avec les gens qui bossent ici.  

Je reste scié sur mon siège devant autant de mauvaise foi. Et l’autre se paye le luxe de me toiser avec un sourire éclatant. OK ! J’espère pour lui que sa vie personnelle est en règle, qu’aucun papier ne manque dans ses déclarations d’impôts ou ailleurs. Ce qui en soi est difficile, car la loi est complexe et nous sommes souvent tous en fraude sans le savoir. Je rumine ma riposte quand Beyonce hurle soudainement.

- Pourquoi ça ne m’étonne pas une musique pareille ?

C’est un appel privé. Un certain Troy, son fils si j’en juge la suite, vient de commettre une assez grosse bêtise pour justifier un renvoi immédiat. Il est beau le fils du policier. J’offre un sourire narquois au flic. Belle éducation que voilà !

- Je suis policier. Je peux pas le prendre avec moi au boulot. Essayez de comprendre ma situation s'il vous plaît.

Hilarant, ou lénifiant. J’hésite. Ce type cherche à faire tomber un mafieux et se fait remettre en place par une directrice d’école. La femme hurle tellement que j’entends distinctement ce qu’elle dit. Ce Troy ne semble pas piqué des hannetons.

- J'suis là dans dix minutes.
- Sérieusement ! Nous allons sur un immeuble en chantier je vous rappelle…
- Vous croyez que j'ai le choix ? J'espère que vous n'avez rien contre les gamins.
- J’ai l’habitude des enfants polis et bien élevés…

Si le flic percute le sous-entendu, il ne le souligne pas. Alors que nous étions presque arrivées, il bifurque pour l’école élémentaire.

*

J’attends dans la voiture pendant que Turner va chercher son rejeton. J’en profite pour jeter un œil à tous les papiers qui traînent dans la voiture. Je lève les yeux au ciel quand je le vois revenir. Il est clair que le marmot est plutôt heureux de faire un tour de voiture de flic. Les portes claquent, le père ordonne au fils de se taire, ce qui fonctionne jusqu’au feu rouge suivant où Troy se met à commenter tout ce qu’il voit. D’un claquement sec, je ferme la vitre de séparation, au moins une chose d’utile dans une voiture de flic, c’est qu’il ne peut pas me donner des coups de genoux dans le dos et que l’insonorisation de l’arrière de la voiture est plutôt efficace.

- Un vrai futur voyou ! Il a déjà trouvé sa place.

Pour de vrai ce môme me fait de la peine. Si l’école a appelé son père en plein service, c’est que la mère n’est pas disponible ou qu’il n’y a pas de mère du tout. La pile électrique qui gambade sur la banquette arrière prouve qu’il n’a pas d’équilibre et fait tout pour se faire remarquer comme se faire renvoyer de l’école. Sous couvert de lire mes messages je prends un selfie avec Troy qui me tire la langue à travers le grillage d’acier et la vitre. Cela servira à discréditer l’agent Turner si besoin.

Nous arrivons enfin à destination. Je sors rapidement, l’aquarium à l’arrière devient insupportable.

- Vous êtes seul responsable de ce qui lui arrive s’il se blesse dans le bâtiment.

Je plante le flic là et ouvre la porte de ce qui devait être le futur bar d’Alessandro avec le double des clés que je possède pour les besoins des travaux. Je profite du retard du policier pour vérifier que le faux placard semble plus vrai que nature et baigne dans son jus comme le reste. Ses cloisons ont été prises dans une maison à l’abandon de la même époque que cet immeuble. Sans plans qui informent de la présence d’un escalier à cet endroit et quelques connaissances en construction, c’est indétectable. La manœuvre a été soignée pour les types de l'urbanisme qui sont des pros, alors un flic lambda... Je reviens près de l’entrée juste avant que le flic arrive.




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Richard Turner

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MessageSujet: Re: Abus de filouteries [PV Chad]   Abus de filouteries [PV Chad] EmptyDim 19 Avr 2020 - 17:08




 


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C'est la mine sérieuse qu'il rejoint sa voiture de patrouille et son occupant tout en tirant son fils par la main. Le gamin est tout sourire. Une joie qui ne se retrouve évidemment pas sur le visage de son paternel. Il n'a rien dit devant la directrice de l'école élémentaire, est parvenu par un étrange miracle à conserver son agacement pour lui. Ce qui était déjà une journée des plus délicates devient un véritable challenge pour ses nerfs. En quelques secondes le canadien fait grimper sa progéniture à l'arrière de la voiture, se glisse à sa propre place sans perdre de temps avant d'attacher sa ceinture de sécurité.

-Troy tu es déjà puni. Alors sois sage sinon tu perds la télé en plus de ton dessert.  

Visage crispé le flic met le contact sans un regard pour l'architecte. Puis les mène tout doucement vers leur destination à laquelle ils devraient déjà être s'ils n'avaient pas eu cette escale à faire. C'est dépité que le flic constate que rapidement son fils se met à tout chambouler à l'arrière. Le petit questionne sur tout ce qu'il voit, parle de ses copains d'école, demande à Wilder qui il est. L'homme agit en cloisonnant encore un peu plus le petit à l'arrière de la voiture. Dents serrées Richard laisse entendre sa désapprobation. De moins en moins enclin à jouer au gentil flic un peu simplet.

-Mais allez y ! Faites comme chez vous !

Le bourge en rajoute une couche. Avec un culot que même le canadien pourtant spontané trouve déplacé. Mais dans une dernière tentative pour conserver le peu de calme qu'il lui reste, Dick ne répond rien. Son père lui a toujours dit que chercher à résonner un abruti bien décidé à le rester ne servait à rien, sinon à se laisser prendre à un petit jeu vicieux et finalement risquer d'y perdre des plumes.

Le chemin se fait donc dans le silence le plus complet. Régulièrement le flic surveille son fils, prend garde à la sécurité de ce dernier même si le petit semble totalement inconscient des dangers que son comportement pourrait lui faire courir. Quand enfin le canadien gare sa voiture à l'adresse du bâtiment source de ses actuels troubles, il ne réagit même pas à cette provocation de plus de la part de l'architecte qui quitte l'habitacle de l'automobile sans se faire prier. Car c'est tout ce que fait ce type, il tente de le pousser à bout pour voir les limites de sa patience. Vertu rare et trop mise à l'épreuve qui commence à s’effriter malgré les bonnes résolutions de Richard. Quand enfin la bourgeoisie de Beacon Hills les laisse en paix, Dick baisse la vitre qui sépare l'automobile en deux. S'exprime de façon aussi claire que possible. Histoire que Troy ne puisse pas trouver la moindre faille dans les ordres paternels.

-Troy. On va sortir de la voiture pour aller voir quelque chose avec le monsieur. Tu es sage, tu ne lâches pas ma main. Sinon je vais avoir des ennuis. Et tu pourrais te faire du mal. Tu ne veux pas qu'on aille à l’hôpital ?
-Non papa. Promis je serais sage tout le temps.

Un grand sourire éclaire le visage du petit garçon quand ce dernier affirme qu'il sera possible pour lui de bien se tenir dans le bâtiment. Beaucoup trop de joie et d'entrain dans ce sourire, c'est ce qui fait douter le canadien. L'homme fait sauter sa ceinture de sécurité, se retourne sur son siège pour faire face à son fils dont les jambes battent dans les airs.

-Troy. Je rigole pas. Tu n'as pas le droit de courir, de sauter, de faire des roulades, de parler, de poser des questions, de chanter ou même de lâcher ma main.
-Mais papa !
-Ce sera pas long. J'ai appelé le poste pour leur dire que tu étais avec moi. Dès qu'on aura fini on rentrera ensemble à la maison. Si tu désobéis tu n'auras plus dessert tant qu'on ne sera pas sur le territoire canadien.

Le petit compte sur ses doigts le nombre de jour que cela ferait. À la pâleur que prend le visage du gamin, il doit trouver que cela fait assez de temps pour accepter de se montrer sage comme une image pendant une quinzaine de minutes.

[...]

C'est dans un silence religieux qu'ils retrouvent l'architecte près de l'entrée. Le policier ne marche pas bien vite pour ne pas donner la moindre occasion à son fils de courir et donc de gagner en excitation. L'enfant boude, mais son amour du sucré lui donne la force de se montrer calme, sa petite main coincée dans une de celles de son père.

-C'est bon nous sommes prêts à aller constater cette absence de cave avec vous monsieur Wilder.

Le blond semble surpris de se voir être à ce point prit au sérieux. Mais garde toutefois son avis pour lui. Leur ouvre la porte non sans rappeler une nouvelle fois au père de famille que si son garçon venait à se blesser dans ce lieu, il serait tenu comme unique responsable de cette catastrophe. C'est en passant sa main libre dans les cheveux bruns ondulés de son fils que le canadien répond, une certaine douceur et un peu de fierté habitant déjà sa voix.

-C'est un gentil petit garçon. Un peu turbulent mais très futé. Il sera sage comme une image. Troy n'est pas du tout un voyou malgré ce que peuvent dire les mauvaises langues.

En parlant de mauvaises langues, leur guide les mène à travers le bâtiment, directement dans la partie des lieux qui intéresse le flic. Le reste Dick s'en moque de toute façon et cette visite est informelle car mise en place à l'amiable entre lui, l'architecte et le nouveau propriétaire de cet endroit. Un mandat dans toute cette affaire aurait été long à récupérer. Il aurait peut être même fallu plus de contenu dans ce dossier à Richard pour parvenir à l'obtenir. S'il y avait assez de défaillances dans cette histoire pour convoquer l'architecte, il n'est pas certain que ses maigres trouvailles auraient eu assez de valeur aux yeux d'un juge pour suffire à lui faire cracher un mandat de perquisition.

[...]

Tête posée contre l'épaule de son père et pouce glissé dans la bouche, Troy demeure dans le plus grand des calmes depuis que Richard a accepté de le prendre dans ses bras. Au doux sourire du petit on devine aisément que ce dernier est heureux d'être venu avec son papa pour découvrir son travail d'un peu plus près. Un boulot qui l’impressionne. Quand on a neuf ans policier c'est comme pompier, presque un synonyme de héros.

Mine un peu défaite, voir presque déçue, le canadien lâche quelques mots devant...

-Eh ben c'est un placard. Pas du tout une cave vous aviez raison.

Enfin ça ressemble à un placard. Et le père de famille n'est pas en position de vérifier si tout cela n'est qu'une illusion montée de toute pièce pour abuser les autorités. On ne défonce pas un mur à coup de masse sans raison, juste pour satisfaire une curiosité malsaine. Déjà parce que c'est clairement illégal. Et puis il faut bien avouer que ce ne serait pas très gentil.

-Vu l'état du mur on dirait que ça a été comblé depuis un bout de temps en plus... 

Le flic ne peut toutefois s'empêcher de fixer ce qui ressemble à un vulgaire placard à balais. Tellement décevant par rapport à ce qu'il imaginait trouver en venant dans cet endroit. Il a simplement l'impression d'avoir perdu du temps. À chercher ce qui pouvait être une preuve des manigances italiennes qui se jouent en ville. Tout ça pour rien, encore une fois. Le schéma de Sacramento qui se joue à nouveau. Tout ce qu'espère le flic c'est que la fin ne sera pas la même. Dépité, il demande, plein d'un espoir un peu fou, le poing déjà serré.

-Je peux cogner le mur ? Juste pour voir ?  Je dois vous avouer que c'est très tentant.

L'autorisation tombe et instinctivement, alors que son poing s'approche de la paroi le flic sait qu'il n'y a aucune chance pour que cela sonne creux. Les choses ne peuvent pas être aussi simples.








   

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MessageSujet: Re: Abus de filouteries [PV Chad]   Abus de filouteries [PV Chad] EmptyDim 26 Avr 2020 - 17:26

Abus de filouteries
Chad
ft.
Richard

J’écoute à travers les cloisons ce père de famille qui galère avec son fils. Flic et père célibataire, ce n’est pas le meilleur combo, un peu comme le mec de… Les croquettes pour chat dans le tiroir ! Mafdet ! Voilà pourquoi le nom de ce gars m’était vaguement familier. Je ne sais pas encore comment utiliser cette information, mais cela m’en offre une autre : il sait parfaitement qui je suis et ce que je suis, ou s’en doute fortement. Après tout, Mick fait partie de la meute tout en étant humain. C’est avec un nouveau regard que je regarde l’agent Turner entrer dans l’établissement la main de son fils coincé dans la sienne.

- C'est bon, nous sommes prêts à aller constater cette absence de cave avec vous, monsieur Wilder.

Je suis étonné, car il me paraît sincère en me croyant hors cause pour cette histoire de cave manquante. Je lui rappelle ses responsabilités quant à amener un enfant sur un chantier.

- C'est un gentil petit garçon. Un peu turbulent, mais très futé. Il sera sage comme une image. Troy n'est pas du tout un voyou malgré ce que peuvent dire les mauvaises langues.

Je grimace et avance plus en profondeur dans le bâtiment tout en lorgnant sur le mec de Maf’. Qu’est-ce qu’elle lui trouve ? Un distributeur de contredanse affublé d’un enfant particulièrement turbulent : tout ce qu’elle fuit. La valeur d’un homme n’est pas tatouée sur son front, mais là, j’ai du mal à comprendre. Le dernier à avoir partagé sa couche était tout de même un dieu. Maf' a plutôt un bon flaire, ce flic semble avoir plus de valeur qu'il ne le parait.

*

J’ai laissé l’agent Turner tourner là où bon lui semble et admirer les plâtres moisis, les tapisseries qui se décollent et les courants d’air des fenêtres plus étanches. Adossé à un mur, je me contente de le suivre du regard. Son môme accuse la fatigue et termine porté par son père, le pouce dans la bouche.

- Eh ben c'est un placard. Pas du tout une cave, vous aviez raison.

Je me contente de hausser les épaules. Ne pas en faire trop et surtout ne pas pavaner, cela risquerait de déclencher une surenchère. Quand je pense que nous en avons enfin terminé, le voilà traversé par un trait de génie.

- Je peux cogner le mur ? Juste pour voir ?  Je dois vous avouer que c'est très tentant.
- Faites, de toute façon il était prévu de tout casser.

Alessandro va certainement annuler la vente à moins qu’il rebondisse sur quelque chose d’autre. Mais plus question de tripot ici. Turner n’a pas inventé l’eau tiède, mais il a un flair qui, par un incroyable malentendu, pourrait faire tomber le parrain local.

Je décolle mes épaules du mur. La simagrée qui va suivre était prévue pour les gars du service technique. Elle n’est que juste avancée. Turner tape donc contre le mur, un beau éco lui répond.

- Oui, ça sonne creux. Construction des années trente : plâtre sur linteau de bois devant une cloison de briques. Bonne isolation thermique, pour cette époque, par contre c’est un très bon amplificateur phonique.

Devant le regard torve du flic, j’essaye de faire plus simple.

- En gros, vous entendez le moindre pet de vos voisins. C’est aussi une cache idéale pour les souris. Les minettes adorent ce type de bâtiment.

Et une allusion, une, à la plus pénible des minettes de la ville. Raté cardiaque contre petit sourire en coin, un point partout la balle au centre. Troy se redresse, pressentant que la suite va être intéressante. J’attrape le manche de la masse qui traîne, appuyée sur le mur opposé avec quelques autres outils d’investigation et reviens devant « notre » placard pour en donner un bon coup dans le fond. L’enfant hurle de joie à cette démolition manifeste, se tortille comme un diable pour échapper à l’étreinte de son père. De la main, je retire un peu de plâtre et des lambeaux de tasseau pour faire apparaître la brique en arrière-plan.

- Comme je le disais : plâtre moisi, tasseaux, vide sanitaire et brique. Ce placard est bien un placard. La cave mentionnée dans les documents de l’immeuble plus loin a dû être condamnée il y a longtemps. N’empêche que ce sous-sol potentiellement instable peut annuler la vente.
- Aie ! Ouin !

Dérouté par la démonstration, le flic en a oublié son rôle de père pour observer de près le mur derrière le mur et écouter mon explication. Un temps que le mini-enquêteur met à profit pour aller coller sa main dans le trou et s’écorcher au premier clou rouillé qui dépasse. Je ne suis pas sans cœur et ne me réjouis pas de la mésaventure du policier. Le môme chougne, alors que son père accroupi regarde de près la blessure.

- Vous avez forcément une trousse de secours dans votre voiture de patrouille, allez la cherchez, je m’occupe de Troy.

Je m’accroupis et fais un grand sourire au gamin. Ma tête de gentil fait son effet, et Troy vient se blottir contre moi.

- Je m’en occupe, dis-je au père en laissant mes yeux s’illuminer légèrement pour qu’il comprenne mon intention. Donne-moi ta main bonhomme et on va jouer à un jeu.

Quand l’agent Turner revient avec la mallette de premiers secours, son fils a un nouveau pote et sa blessure est presque remise.

- Je sais la table du neuf sans faute, papa !

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MessageSujet: Re: Abus de filouteries [PV Chad]   Abus de filouteries [PV Chad] EmptyJeu 30 Avr 2020 - 23:44




 


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Un sourire illumine le visage du canadien quand un bel écho se fait entendre en réponse au coup qu'il vient de donner. Sourire qui se fige avant de disparaître bien vite quand la voix de l'architecte donne une raison à tout cela. Chad piétine son espoir en usant une fois de plus de mots compliqués qui peinent à trouver du sens chez le père de famille. Mine défaite, Richard se tourne vers le loup, lui lance un regard simple à comprendre. Une demande de traduction qui rendrait tout ces termes techniques compréhensibles pour le commun des mortels. La bouche du flic s'ouvre quand enfin avec l'aide de l'autre la lumière se fait dans son outil de réflexion. Son fils toujours pendu à son cou, il chuchote, amusé, un peu dépité également en faisant une constatation à voix haute.

-C'est comme chez nous.

De son lit la nuit, il peut entendre le ronflement de la jeune femme qui vit dans l'appartement de l'étage du dessous. C'est un peu gênant, mais le pire dans tout cela c'est que ce son est devenu nécessaire à son sommeil. Quand la respiration de sa voisine a un raté, il ne parvient à s'empêcher de s'inquiéter pour elle. Se demander si elle a eu un soucis. Autre fait ennuyeux, quand il dort chez Mafdet, il cherche toujours inconsciemment ce bruit qui au début lui tapait sur les nerfs. Le fil de ses pensées se coupe quand les dires de l'architecte trouvent un sens nouveau dans son esprit. Il se crispe à la mention d'une minette, presque certain que ce terme n'est pas anodin dans la bouche de Wilder. Douché dans son enthousiasme le père de famille pose un regard nouveau sur cet homme qui connait bien sa belle. Ils ont frôlé le stade de la dispute tout les deux quand elle a fouillé sa commode pour y dénicher le dossier qu'il commence à monter au sujet d'Amaro. La situation s'est envenimée, il a même cru que le fait que le nom de ce gars, Chad Wilder, soit mentionné sur certains des feuillets provoquerait le départ de Mafdet de son appartement. Puis trop soulagé de la voir rester près de lui, il avait préféré enterrer le sujet avant même qu'il ne soit réellement évoqué. Pour ne pas la mettre en colère et surtout ne pas avoir à lui mentir en lui disant qu'il abandonnerait cette enquête sur le champ.

Tout à ses pensées, il met un peu de temps à percuter quand Wilder attrape une masse puis se dirige vers le placard. Troy se dresse, tente de fuir l'étreinte paternelle pour profiter de cette attraction tandis que le canadien se contente de fixer cet étrange spectacle, un air un peu ahuri rivé au visage. Une surprise des plus inattendues, une sacrée blague que même Dick n'aurait pas pu voir arriver. Il le sait, il en est même certain à présent. Dans cet endroit il n'y a pas de secret sordide à dévoiler, pas de coup fourré à débusquer. Sinon l'architecte n'agirait pas de cette manière, il semble bien trop intelligent pour se mettre en danger de façon aussi sotte. Richard n'est peut être pas un génie, mais il est suffisamment lucide pour en avoir conscience. Il sait ce qu'il vaut et comprend facilement quand son prochain est doté de méninges plus rapides que les siennes. Le mur se fend sous l'impact et Richard s'approche. Curieux malgré tout. Toujours présent pour témoigner de l'inhabituel. Il fourre sa main dans le trou, fouille, assez pour titiller les briques. Évite un clou mais se prend un nuage de poussière de plâtre en plein visage.

Ça sent un peu le moisi, mais c'est tout à fait supportable si on compare cette sensation aux nombreuses fois où le nez du flic a été confronté à des embruns plus déroutants depuis le début de sa carrière dans les forces de l'ordre. C'est avec un sourire de môme un peu déçu aux lèvres qu'il écoute l'architecte tout en prenant gare à ne louper aucun de ses dires. Cette balade qui gagne en inutilité au fil des minutes qui passent touche à sa fin et c'est à l'instant où le père de famille se prépare à se redresser qu'il entend son fils. Fils qui pleure, qui colle sa petite main sur laquelle coule un sang chaud dans la nuque de son papa.

-Mon cœur tu t'es fait mal !  

Pli soucieux au front et lèvres pincées, le flic pose son fils au sol dans l'urgence. Se courbe pour se mettre à son niveau avant d'enfin tendre une main vers celle blessée de son garçon. Des gestes doux pour ne pas apeurer son môme. Du bout de ses doigts il frôle la main de son petit, attrape son poignet afin de l'aider à comprendre qu'il doit lui montrer sa blessure. En un froncement de sourcils, Dick remarque une de ses nouvelles bourdes, puis rapidement essuie ses paluches couvertes de poussière sur son pantalon d'uniforme en y laissant deux larges empruntes jumelles.

-Tu vas être sale papa.
-C'est pas grave Troy. Tu me laisses regarder ta main ?
-Vous avez forcément une trousse de secours dans votre voiture de patrouille, allez la cherchez, je m’occupe de Troy.

Cette proposition fait lever le nez au policier. Sans forcément se décrire comme quelqu'un de méfiant, il a pourtant apprit à ne plus faire confiance à n'importe qui. Il sait que les sourires donnés ne sont pas toujours sincères. Et puis ce type, qu'il soit de la meute de Mafdet ou non, il ne le sent pas. Avec ses tournures de phrases alambiquées et ses manières de premier de la classe, Wilder ne lui a pas fait une bonne première impression. Pourtant sa proposition brille par sa justesse et le canadien s'en veut de ne pas avoir pensé à aller chercher sa trousse de secours en premier. Dick se lève, laisse son fils changer de bras. Puis fuit pour aller chercher la trousse.

-Merci Monsieur Wilder.

Ce sont ses derniers mots avant qu'il ne quitte la pièce sans même avoir prit le temps de remarquer la lueur qui vient de traverser le regard de l'architecte.

[...]

Quand il déboule dans la pièce, sa trousse de secours serrée contre lui c'est la voix heureuse et sans sanglots de son fils qui l’accueille. Un son qui irrémédiablement fait naître le soulagement sur le visage de Richard qui s'empresse de rejoindre le duo. La trousse termine jetée au sol tandis qu'il s'agenouille face à son petit garçon. Amusé il marmonne une réponse à Troy tout en se dépêchant d'imbiber une compresse de désinfectant.

-Ça c'est génial. Tu me montreras ça à la maison. Et qui sait, la prochaine fois monsieur Wilder t'apprendra peut être à ne pas appuyer sur le bouton de l'alarme incendie de ton école.
-Il s’appelle Chad. Il est pas assez vieux pour être un monsieur.

Dick croise le regard de l'architecte qui ne tente même pas de dissimuler son amusement face à la logique juvénile dont vient de faire preuve le petit. Main de son garçon dans la sienne, le père de famille désinfecte tout en parlant, avant de froncer les sourcils en repérant la blessure qui semble devenue bien minime en quelques minutes.

-Il faut avoir quel âge pour être un monsieur dans ce cas ? Je suis un monsieur moi d'après toi...

Richard se coupe de lui même dans le flot de paroles qu'il commençait à prononcer. Il lève un regard suspicieux vers le loup puis fixe son fils, lèvres closes. Le flic devine sans mal ce qui a dû se passer durant son absence et même s'il est reconnaissant envers Wilder, il ne peut s'empêcher de craindre que Troy ait pu être témoin de choses étranges. Un monde dont il veut le préserver même si dans cette ville il a l'impression que cette tâche tient de l'exploit irréalisable... 

-Papy est un monsieur lui. Toi t'es juste un papa. Oh ! Ils sont moches tes pansements de policier !

C'est un brusque retour à la réalité que lui offre Troy. Il n'a pas l'air perturbé ce qui signifie que son innocence vis à vis du surnaturel doit toujours être sauve. Dick soupire puis sourit tout en posant le pansement sur la main de son fils.

-Je suis désolé mais on a pas de budget pour les pansements Spiderman au poste.

Il attrape son môme entre ses bras, le serre contre lui un long instant. Tout en levant son regard chocolat vers l'architecte, il prend le temps de mimer un remerciement muet à l'intention de celui-ci. Avant de sonner leur départ de cet endroit, à voix haute cette fois.

-Je crois que c'est bon pour moi. Je vais vous raccompagner au poste. Merci encore d'avoir prit le temps de me suivre aujourd'hui.

L'ambiance est comme apaisée. Le gamin malgré le fait qu'il soit turbulent est parvenu à ramener un peu de calme dans cette situation. Ainsi qu'une humanité et une patience dont Richard finissait par manquer.

[...]

Ils sont de retour dans la voiture de patrouille. En route pour le poste de police où chacun retrouvera son carrosse pour rentrer chez lui. La vitre de séparation a à nouveau été levée, mais cette fois c'est le père de famille qui a agit quand Troy a commencé à brailler le générique du dernier dessin animé en vogue chez les 8-12 ans. Regard porté sur la route et concentré dans son action, Richard brise finalement le silence qui a refait son apparition en peu de temps. Il murmure, remercie l’ouïe des surnaturels qui fait qu'il devine qu'il sera comprit et écouté sans avoir à hausser la voix et ainsi prendre le risque d'être entendu par son fils.

-Je voulais vous remercier. Pas seulement pour le temps que je vous ai volé, mais aussi pour la main du petit. Je crois qu'il se doute de rien, mais moi je sais. Donc je vous remercie.

Il s'arrête là. Car en dire plus serait aussi trop en dire. Il est sincère et c'est tout ce qui compte. Cette angoisse perpétuelle dans laquelle il vit depuis qu'il a découvert, dans une ruelle sombre que le monde ne s'arrêtait pas à tout ce qu'il connaissait le bouffe de l'intérieur. Ses cauchemars ont de nouveaux visages, ont prit de nouvelles formes. Des choses effrayantes. Lecter et son régime à base de steaks d'humain. Le crocotta qui attaque ses amis. Un corps détruit, figé sur papier glacé pour l'éternité. Ils sont venus rejoindre les images sinistres qui sont parfois quotidiennes dans sa profession.

Un triste sourire effleure les lèvres de Dick quand après avoir prit une dernière inspiration profonde il se lance. Un pavé qu'il jette dans la mare de ses ennuis. Il risque d'avoir chaud aux fesses si cette journée devait être contée à sa belle.

-Elle l'ignore.

Il l'entend. Le murmure du nom de sa belle qui vient de quitter la bouche de Wilder. Il capte même le point d'interrogation dans la voix du loup. Boule au ventre, tripes tordues par le stress, Richard continue.

-Elle sait pas que je vous ai convoqué. Mais elle sait que je comptais le faire. Elle m'a grillé comme un bleu.  

Flic débutant, certainement pas. Mais il reste un amoureux qui réapprend ce qu'est une relation.  







   

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