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 Un'associazione improbabile || Feat Alex

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Alessandro Amaro

Alessandro Amaro


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MessageSujet: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyVen 1 Nov 2019 - 16:26

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« Un'associazione improbabile. »
Onze heure, toujours pas de Charlie. J’ai appelé sur son téléphone une douzaine de fois, laissé sonner jusqu’à tomber sur sa messagerie que j’ai copieusement arrosée de torna presto et autres amabilité d’un patron de bar qui voit la déroute arriver. Sophie s’affaire derrière le bar, Dan range les tables et dresse les couverts dans l’aile brasserie. À midi, nous avons pas mal de monde qui vient manger. Nous sommes un peu chers par rapport à ce qui se fait autour, mais la cuisine de Crowley vaut ce qui se fait dans le restaurant des Français et pour trois fois moins cher. Je vérifie les tiroirs des frigos. Charlie est organisé, seulement dans une cuisine. Je connais le menu, Sophie aussi. Nous pouvons commencer sans lui, mais ensuite il y a des préparations qui ont besoin de son coup de paluche.

- Sophie ! Je vais sortir Charlie de son plumard. Tente de retarder les premières commandes. L’aller-retour devrait me prendre quarante minutes, cinquante si je dois le réveiller.

Je saute dans ma voiture et roule pied au plancher, priant de ne pas tomber sur l’irritant agent Turner. Depuis que l’ours loge avec Cormier, cela l’a éloigné de la ville. Quand j’arrive au chemin forestier qui mène à la cabane du druide, je maudis ces illuminés qui vivent au milieu de la nature. Le chemin est bourré d’ornières, et par deux fois mon bas de caisse touche le sol dans un son désagréable. Je grommelle que dans l’autre sens avec le poids de l’ours en plus, ça sera pire.

Car je n’imagine pas le laisser prendre sa voiture. Si je dois le réveiller, il ne sera pas capable d’un mouvement coordonné avant vingt bonnes minutes. Minutes que je ne possède pas.

(…)

Enfin, la masure des Cormier apparaît. Une seule voiture. Cela m’évite des explications avec le propriétaire des lieux. Cormier ne sait pas faire court. Il veut toujours tout savoir et se mêle de tout. Je me gare à côté de la caisse de Charlie et klaxonne pendant trente secondes. Cela me casse les oreilles, mais réveiller un ours… Je sors de la voiture, vais tambouriner à la porte, tente de rentrer. Mais c’est verrouillé.

- Charlie ! C’est onze heures trente. Rien n’est prêt en cuisine ! Magne-toi l’cul, bordelo !

Pas de réponse. Pire, pas de ronflement, pas de cœur qui bat, à si un. Léger comme une plume. Étrange. Je tourne à nouveau la poignée de la porte, elle résiste. Je pousse le battant de l’épaule, ça craque un peu. C’est une porte en bois… je regarde ma montre, pas le temps de faire dans la dentelle. Et c’est la faute à Charlie. L’autre sourcilleux s’arrangera avec lui. Je force un peu plus, un craquement m’indique que c’est l’huisserie qui lâche avant la serrure. J’entre.

- Charlie !

Je cherche dans les pièces du bas, puis me fie à l’odeur pour trouver la chambre de Charlie. J’ouvre avec force la porte qui me revient presque en pleine figure tant j’ai poussé fort. Pas d’ours dans le lit.

- Merda ! Où est-il ? Il ne dort quand même pas avec l’autre…


Quoiqu’avec Alex ça ne m’étonnerait pas. Je retourne dans le couloir, colle mon oreille à la porte de la chambre qui sent l’odeur du Cormier. J’entends un cœur battre. Je tambourine.

- Charlie !

Pas de réponse. J’entre dans la chambre. C’est mal rangé. Moins pire que la chambre de l’ours, mais tout de même. Mais mon souci immédiat n’est pas le chandail d’Alex qui traîne au sol et sur lequel je marche, mais qu’il n’y a pas d’ours dans le lit. Pourtant un cœur bat. Ça vient de sous le lit.

- Charlie ?!

Il n’y a pas la place pour qu’il puisse se cacher là-dessous. Je ne me m’en mets pas moins à genoux pour voir ce qui vit sous le lit d’Alex. Je tends le bras et en ressors une chose tremblante à grandes oreilles.

- Cosa !

Un rugissement dans mon dos me remet sur mes deux pieds. Cormier. Je le regarde, regarde le lapin. Il commence à me causer, je l’interromps.

- Je ne pensais pas que tu conservais ton garde-manger sous ton lit ! Tu sais où est Charlie ? Le restaurant ouvre dans quinze minutes et je ne le trouve pas !

Je jette le lapin sur le lit écoutant la réponse d’Alex.

- Tu n'as cas pas laisser traîner tes affaires parterre !

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Alex Cormier

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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyVen 15 Nov 2019 - 4:36



Une association improbable


Feat. Alessandro Amaro







Ça n’allait pas être drôle lorsqu’il serait vieux et sénile, se dit Alex en sortant du lycée au pas de course. Il jurait dans la langue maternelle de son père, seul vestige d’une enfance bercée entre la langue de Roy* et de Hemmingway.  Voilà qui aurait bien suffit à se faire retourner sa mamie dans sa tombe : qu’il ne se serve du français que pour assaisonner son dialecte canado-américain de quelques expressions particulières et pour blasphémer.  De toute façon, ça avait toujours été Michael qui avait eu la bosse des lettres.  Gabriel pourrait bien converser avec lui, dans leur petite vie nouvelle en Oregon.  Déjà qu’ils avaient eu une charmante conversation comme quoi Michael devrait hérité du grimoire comme il comprenait mieux les inscriptions en français que son aîné qui, lui, avait argué avoir déjà ajouté pas mal de notes et effectué un travail de moine copiste-classeur.  Le compromis fut qu’Alex conserverait sa version retranscrite et traduite – avec l’aide de son père et de son cadet – et que Michael hériterait de l’oeuvre originale.  De toute manière, Alex était parti pour finir sa vie seul dans un monastère, alors qu’est-ce que cela pouvait bien changer, au final?

Alex sprintait donc.  Non.  Il marchait d’un bon pas à travers les corridors, évitant du mieux qu’il le pouvait les Trolls de Couloirs, gigantesques monstres stéroïdiens qui peuplaient le lycée de Beacon Hills, actuels et futurs.  Il s’était aperçu à la fin de la période de démonstration avec Mafdet qu’il avait une fois de plus oublié son badge de l’hôpital.  Cela lui valu évidemment une moquerie de la femme-chat.  Le druide démarra sa voiture et engouffra son bras à l’intérieur du sac à dos qu’il venait de projeter sur le banc passager.  Il en saisit un sandwich qu’il commença à grignoter tout en insultant les autres usagers de la route qui n’allaient ni assez vite ni assez lentement, selon ses propres dires.

Il fallait bien que cela lui arrive la journée des portes ouvertes du lycée – dont il cherchait toujours à comprendre la pertinence – et lors de son samedi de garde au labo.  Évidemment, ces deux événements devaient absolument tomber la même journée.  Il n’avait donc personne pour lui ouvrir le labo, à l’hôpital, comme les autres étaient tous en week-end.  Le druide pesta de nouveau.

Le laborantin ne prit même pas la peine de retirer ses clés de l’interrupteur lorsqu’il coupa le moteur.  Pas plus qu’il ne prit la peine de refermer sa portière.  Il se rua sur la porte d’entrée, pour réaliser que son trousseau était resté dans le contact par soucis de sauver du temps.  Il fit donc demi-tour, arracha les clés de leur socle et courut de nouveau vers la porte.  Lorsqu’il voulu y insérer la clé de la maison, il réalisa que la porte était entrouverte et toujours verrouillée.  Ça n’était pas normal.  Même si Charlie n’était pas à sa plus glorieuse heure au réveil, il n’était pas stupide non plus et ne défoncerait pas la porte d’entrée de son logis.  Qui cela pouvait-il être? Certes, il vivait loin de toute civilisation (si on excluait les Hale) et au coeur d’une zone forestière, mais cela ne justifiait pas une entrée par infraction en plein jour.  Et surtout aussi grossière.  Ils auraient au moins pu casser le carreau de la vitre, ça aurait fait plus propre.

Le manitobain saisit l’une des pierres qui bordaient l’allée pour s’en servir au cas où les vandales étaient toujours sur place. Jamais il ne s’était attendu à se faire cambrioler.  Le sentiment de perte de son intimité, de bris de confiance et d’impuissance qui s’était emparé de lui était comme un combustible pour la haine qui l’animait envers quiconque avait ainsi osé violer son foyer.  Il s’avança lentement à l’intérieur, à la recherche d’indices sur les criminels et leur présence ou leur absence en ces lieux.  La porte de la chambre de Charlie était ouverte, ce qui n’était le signe de rien. Il ne la fermait que rarement, qu’il soit à la maison ou à l’extérieur.  Par contre, Alex fermait toujours sa porte lorsqu’il dormait ou lorsqu’il était absent, à la fois par pudeur et pour éviter que Civet ne prenne son matelas pour une litière XXXL.  Le druide s’approcha de sa chambre à pas de loups, la pierre au-dessus de sa tête, quelque part sur sa droite, et s’arrêta lorsqu’il entendit un bruit.  Ça grouillait dans la pièce.  Son rythme cardiaque s’affolait alors que le druide figeait, incapable de déterminer la meilleure ligne d’action à entreprendre.

Ce fut deux petites syllabes, prononcées par une voix horripilante dans une langue à jamais souillée pour le canadien, qui le firent réagir.  Il parcourut la distance qui le séparait de sa porte de chambre en laissant son gourdin de fortune reprendre une position moins fatiguante, au niveau de sa cuisse.

-FICHE LE CAMP!  SORS DE CHEZ MOI!  De nouveau, Alex donna à son aïeule l’occasion de se retourner dans sa tombe avant de poursuivre dans des mots que le Sicilien comprendrait.  ON NE T’A PAS APPRIS À NE PAS...

Alessandro osa lui couper le clapet.  Comme si de rien n’était.  Si, de colère, Alex était déjà au stade tomate, l’insulte le fit passer à celui de l’aubergine.  Fulminant, il répondit sur un ton d’apparence virulent.

-Je te conseille pas de bouffer le pote de Charlie. Tu risquerais de le voir revenir très vite, mais ce pourrait aussi être la dernière chose que tu voies.

- Tu n'as qu’à pas laisser traîner tes affaires par terre !

-Je sais pas où il est.  Maintenant, tu sors avant que j’appelle les flics.


Alessandro s’exécuta avant que le scientifique ne puisse analyser si c’était un miracle ou simplement sa menace qui avait fonctionnée.

-Et tu me rembourseras la porte! hurla-t-il à travers la maison à l’intrus qui était déjà au volant de sa voiture.

Alex alla fermer sa portière, s’assura que Civet ne tentait pas de prendre la clé des champs, et se laissa choir sur le canapé pour commencer une ronde d’appels.  D’abord, il annonça à ses supérieurs qu’il avait oublié son badge et qu’en rentrant le récupéré il avait vu qu’on avait défoncé sa demeure. Ensuite il téléphona ses collègues dans l’espoir de trouver quelqu’un qui puisse le remplacer à la dernière minute comme cela. Puis il tenta d’appeler les assurances, par trois fois avant d’obtenir une réponse, afin de déposer une réclamation.  Entre chaque appel, quelques SMS à une certaine puma, pour lui dire que son imbécile de copain avait explosé sa porte et menacé Civet de mort.  Avec un langage un peu plus coloré et largement moins sympathique. Puis il contacta un spécialiste en porte et fenêtre afin qu’il vienne évaluer l’état des dommages et lui soumettre une estimation des coûts. L’ouvrier lui annonça que ça aurait pu être pire, puisque la porte s’en était sortie sans problèmes et qu’il n’avait qu’à remplacer le cadrage de la porte.  Pour un joli supplément, il accepta même d’effectuer la réparation le jour-même.  Alex récupéra la facture, excluant le petit extra, pour les assurances et rappela sa collègue pour lui dire qu’il venait la rejoindre pour l’aider à terminer sa journée tôt.  Enfin, il appela pour faire livrer une pizza à partager à sa collègue, en guise de remerciements.


***


Alex appela une enième fois le portable de l’ours, pour lui laisser un message supplémentaire.  Lorsque la boîte vocale enclencha sa réponse, elle annonça au colocataire de Charlie que la machine était complètement remplie. Et c’était sans compter les textos.  Le châtain gara sa bagnole dans une rue transversale, l’oeil aux aguets pour identifier la bécane de l’ours, et se dirigea vers l’entrée du Pink!.  C’était évidemment fermé : on était dimanche.  Heureusement, le visiteur savait que le propriétaire habitait juste au-dessus et alla sonner, comme une personne civilisée.  Au troisième coup, Alessandro lui ouvrit la porte.  À son regard, Alex jaugea qu’il ne s’attendait pas à avoir des visiteurs à une telle heure, et n’était guère enchanté de voir le canadien.

-Salut Amaro, je voulais te parler de...

Alessandro l’interrompit, grommelant quelque chose en rapport avec une porte.  Il y eut un moment de silence pendant lequel toutes les pores de la peau du druide expirèrent simultanément de confusion.  Les sourcils, quant à eux, trahissaient la question avant même qu’elle ne soit entamée.

-Quelle port’… Oh!  Non, c’est pas ça. C’est Charlie.
Le mafieux pensait-il que les assurances remboursaient si rapidement le pauvre prolétariat?
-Il n’est pas rentré cette nuit, et je ne l’ai pas entendu la nuit d’avant non plus.  Est-ce qu’il est rentré, finalement, hier?

Négatif.  Alex se mordilla la lèvre, inquiet de perdre son colocataire, mais surtout son ami.  Ce n’était pas vraiment son genre de disparaître de la sorte, malgré tout ce qu’on pouvait dire sa désorganisation.  Il suffisait de le voir dans une cuisine pour savoir que ce trait n’était pas constant chez lui.  Et surtout, Charlie était un ami aussi fidèle que fiable.  Il avait disparu.

Alessandro offrit à Alex d’entrer, ce que le manitobain refusa.

-Non merci, j’essaie de respecter l’intimité des gens.  C’est pas très difficile, se contenta-t-il de compléter mentalement.

-Tu sais où il gare habituellement sa moto quand il vient bosser?  Elle est pas à la maison, peut-être qu’en la trouvant on le trouvera aussi. C’était la seule piste qu’il parvenait à envisager, alors qu’il acceptait à contrecoeur d’entrer dans l’appartement du sicilien, qui avait insisté.  Il en profita néanmoins pour envoyer un message texte à Jenny.


Vous, à 10:46 a écrit:
Où est Charlie?


*:



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Merci Matrim & Chuck!


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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyDim 24 Nov 2019 - 23:07

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« Un'associazione improbabile. »
Un samedi sans Charlie est un samedi de merda. J’ai réduit la carte à ce que je peux assurer à sa place. Je préfère frustrer le client plutôt que de lui servir un plat de mauvaise qualité. Mais l’ours brille par son absence. Je brode un imprévu de dernière minute qui retient le cuistot en vogue de la ville. Le service terminé sur les rotules, j’inonde Crowley de messages vocaux et écrits. Lui ordonnant de ramener sa peau ce soir illico presto.

Dix-huit heures, pas de cuisinier. Jerry s’inquiète. Il a tenté de joindre Charlie, sans succès. Je suis inquiet comme le reste du personnel, mais le samedi soir est le moment le plus intense de la semaine. Le Pink tourne comme un 33 tonnes lancé à plein régime. Chacun est à son poste et je remplace à nouveau l’ours derrière les fourneaux. Je suis capable de remplacer au pied levé n’importe quel de mes employés. Presque dix ans dans le métier font de moi un professionnel accompli. Toutefois, je ne rivalise pas avec Charlie. Je m’en tiens donc à ce que je sais faire et offre une carte qui reste variée. Je soupire lorsque Kada’an me rapporte une assiette avec la demande du client d’ajouter du miel.

(…)

Comme un automate, je retourne les chaises sur les tables. Je suis lessivé, comme le sol que Jessie termine de nettoyer. Demain étant dimanche et donc jour chômé, nous laissons le sous-sol où est la scène de spectacle, dans l’état où il se trouve. Je m’attellerais à le nettoyer dans l’après-midi après une bonne grasse matinée. Quand je m’affale sur mon lit, il est presque trois heures du matin. Je m’endors aussitôt.

(…)

Quelqu’un sonne avec insistance. J’émerge du brouillard, la bouche pâteuse. Je me gratte le menton, ma barbe naissante crisse sous mes doigts. Puis, la soirée de la veille me revient en mémoire avec le long labeur qui m’attend au sous-sol. À nouveau, la sonnette retentit. Dimanche ? Quel emmerdeur cela peut-il être ? Je me lève, enfile un bas de jogging et descends en bâillant.

Cormier ! Il n’y a que lui qui peut venir ennuyer les honnêtes travailleurs un dimanche matin.

- Salut Amaro, je voulais te parler de...
- Bordelo ! Ton histoire de porte ne peut pas attendre lundi ?
- Quelle port’
- Cosa ?! Tu viens de me tirer du lit là. Et je n’ai pas de confortables horaires syndicaux comme toi, je te rappelle.
- … Oh ! Non, c’est pas ça. C’est Charlie. Il n’est pas rentré cette nuit, et je ne l’ai pas entendu la nuit d’avant non plus. Est-ce qu’il est rentré, finalement, hier ?
- Pourquoi crois-tu que je suis dans cet état ? Non, Charlie ne s’est pas présenté à son service hier soir.


Je baille à nouveau, étire mes bras. Mes épaules craquent. Charlie… C’est vrai que son absence sans prévenir personne devient préoccupante. Je me recule et invite Alex à entrer.

- Non merci, j’essaie de respecter l’intimité des gens.
- Sul serio ?

« Respecter l’intimité des gens » ? Alors qu’il vient de m’arracher à mon lit et que je suis sur le pas de la porte arrière du Pink, vêtu en tout et pour tout d’un bas de survêtement ?

- Tu sais où il gare habituellement sa moto quand il vient bosser?  Elle est pas à la maison, peut-être qu’en la trouvant on le trouvera aussi.

J’ai laissé la porte ouverte, et commencé à monter les marches qui mènent à mon appartement. Je suis incapable de tout raisonnement lucide tant que je n’ai pas avalé au moins deux expressos. Arrivé en haut, j’entends Alex se décider à entrer et refermer la porte. Je pose deux tasses sous la cafetière à expresso. Je me moque de savoir si le Canadien aime ou pas le café, au pire je boirais les deux tasses.

- Il gare sa moto dans la ruelle, à côté des conteneurs poubelles. La dernière fois que je l’ai vue garée là, remonte à vendredi soir. Tu veux un sucre dans ton café, ou tu préfères du thé ?

Je montre la bouilloire, les tasses et la boîte à thé. Alex avance comme s’il mettait les pieds dans un bordel… Le salon-cuisine est rangé comme j’aime qu’il le soit. Une déco sobre, rien qui traîne sinon une pile de journaux variés qui trahit mon intérêt pour l’économie, la politique et les nouvelles locales, et un dossier d’urbanisme sur un quartier pauvre de Beacon Hills, non loin de la maison des Shepherd. Sans attendre qu’Alex se décide pour le café ou le thé, j’engloutis l’une des tasses de nectar noir comme du goudron. Le goût du café réveille un peu mes neurones.

- Je ne me souviens plus s’il a de la famille proche, des parents encore en vie. Il aurait pu être appelé et avoir oublié le chargeur de son phone. C’est bien le genre de l’énergumène.

Charlie n’est pas un parangon de sociabilité. Cependant, c’est tout de même étonnant qu’il me laisse en plan de cette façon.

- Parle fort pour que je t'entende, je vais sous la douche avant de me rendormir.


Alors que je me dirige vers ma nouvelle chambre que j’ai étrennée il y a une semaine. J’entends Alex s’étouffer de justifications en tout genre, entre mon intimité, son inquiétude pour Charlie et je ne sais quoi d’autre. Je repasse par le salon avec en main un jean, un boxer et un t-shirt basique. Car pour le moment, j’ai toujours tout un niveau du bar à nettoyer.

- C’est bon ! Relaxe. Je ne te demande pas de prendre une douche avec moi.

Je lui tourne le dos et souris à sa réplique. Il n’a pas changé. Je passe la porte de ce qui est devenu la chambre de Therence avec sa salle de bain privée. (Il n'a pas encore réellement emménagé à demeure.) J’ai la mienne, mais il y a une fuite sur le siphon. C’est pourtant tout neuf… Le plombier doit passer dans la semaine. Je squatte donc mon ancienne salle de bain. Le jet d’eau chaude dénoue mes épaules et me redonne un peu d’énergie suite à cette nuit bien trop courte à mon goût. Je ne m’éternise pas. Je me sèche et m’habille avant de retourner dans le salon où Alex semble prendre racine tant j’ai l’impression qu’il n’a pas bougé.

- Tu veux qu’on recherche sa moto ? Ça va nous prendre un temps fou. Je te dirais bien d’aller signaler sa disparition aux poulets, mais…

Mais moins je les vois, mieux je me porte, et ce casse-pied de Turner sauterait sur l’occasion pour venir m’ennuyer à nouveau.

- S’il n’est pas allé voir de la famille…

Alex ne dit rien, mais son regard est éloquent.

- Arrête tes airs de bonne sœur ! Charlie est mon cuisinier et rien d’autre. À l’occasion, il m’aide à sortir un client indélicat, mais cela s’arrête à ça.

Je ne dis pas clairement qu’il ne bosse pas pour mon organisation, mais le druide semble comprendre. Charlie avait émis le vœu de ne plus tremper dans l’illégal, j’avais respecté son choix en souvenir de notre ancienne amitié. De plus, le Pink lui doit une partie de sa réputation. Je me sers un nouveau café.

- Un accident de moto ?

L’ours est solide, mais pas invulnérable. Alex s’agite, il ne semblait pas avoir pensé à cette alternative. Je sors mon téléphone et compose le numéro de Ryan.

- J’appelle un de mes hommes. Ils vont traquer l’hôpital et le poulailler central.

Une fois l’appel passé, je rince ma tasse et celle d’Alex avant de les essuyer et les ranger.

- Ça va leur prendre une bonne vingtaine de minutes minimum, surtout pour arracher l’info au flic. J’ai la salle du sous-sol à nettoyer. Donc soit tu patientes ici, soit tu me donnes un coup de main. On a fini à point d’heure hier.

Je ne précise pas que c’est en partie parce que j’ai dû remplacer Charlie et qu’ainsi je n’ai pas pu aider au service. Alex a vraiment l’air soucieux. Avant de prendre la direction des escaliers, je tente de rassurer le druide.

- C’est un dur à cuir. Va savoir, il hiberne quelques parts sans se douter de la panique qu’il provoque.

Au rez-de-chaussée, le bar semble bien terne les lumières éteintes. J’attrape un plateau sur le comptoir et descends au niveau inférieur ramasser les verres qui traînent sur les tables. Lorsque j’allume, l’ampleur de la tache me désespère. Bienvenu dans le quotidien d’un mafieux. Vaisselle et aspirateur en perspective. Je me retourne avec l’espoir de voir Alex me suivre. Cela serait moins pénible à deux.




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Alex Cormier

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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyJeu 28 Nov 2019 - 3:48



Une association improbable


Feat. Alessandro Amaro







C’est renfrogné qu’Alex obtempéra et entra, en prenant grand soin de refermer la porte derrière lui, pour monter l’escalier derrière lui.  Le nez rivé sur son portable pour éviter de ne se retrouver forcé d’observer le galbe du fessier sicilien à travers le jogging, ni aucun autre attribut qui aurait pu charmer sa meilleure amie – ce serait de la haute trahison, après tout – le druide se contenta de répondre à Jenny, qui était aussi matinale que lui-même l’était.  Elle lui offrait un salut providentiel, rien de moins, face au dos athlétique et cintré de l’italien. De plus, elle lui permettait de constater que les deux Al’ faisaient une nouvelle fois une trêve. Après Jansen, c’était désormais Charlie qui en était la cause.


Votre conversation avec Jenny a écrit:
Jenny, à 10:46 a écrit:
...
Vous, à 10:46 a écrit:
Je suis sérieux.  Tu sais où il est.
Jenny, à 10:46 a écrit:
Il est pas chez vous?  Je l’ai pas vu depuis quelques jours.
Vous, à 10:47 a écrit:
Non.  OK merci
Jenny, à 10:47 a écrit:
T’as appelé la police, si t’es inquiet?
Vous, à 10:47 a écrit:
Pas pour le moment, ça n’en vaut sûrement pas encore la peine.  Merci encore
Jenny, à 10:47 a écrit:
K…..
Jenny, à 10:47 a écrit:
Tiens moi au courant svp


Alex entra l’appartement d’un pas feutré et prudent, à la manière de celui qui pénètre un ancien tombeau et craint d’y activer un piège, ou d’attraper un microbe oublié depuis quelques civilisations entières.  Il ne voudrait surtout pas, non plus, déranger les morts qui s’entassaient probablement ici.  Sinon physiquement, à tout le moins spirituellement.  D’une œillade de mirador, Alex fit le tour de la pièce, réalisant la propreté des lieux.  S’il n’y avait rien d’étonnant à ce que l’homme soit aussi propre de sa maison que de sa personne, le laborantin avait toutefois de la difficulté à s’imaginer l’arrogant faire son propre ménage.  L’image d’Alessandro, à quatre pattes devant la cuvette, ganté de nitrile bleu et armé d’une brosse, tira un sourire en coin au scientifique.  Alessandro devait bien avoir une femme de ménage, et elle semblait être passée récemment.  La crainte qu’elle puisse toujours être dans l’appartement, plus précisément dans la chambre partagée avec Andy, lui fit légèrement rougir les oreilles un moment.  Le laborantin rationalisa rapidement : c’était une supposition non fondée et excentrique, basée simplement sur son opinion négative du DonJuan.

Celui que le biochimiste soupçonnait de courir la galipette lui offrit un breuvage.  Le druide hésita une seconde, son sourcil droit fuyant sur sa tempe pour murmurer sa crainte de n’être empoisonné à son oreille. Alex se mordit la lèvre d’une incisive, songeant à demander un simple verre d’eau, mais la gueule de tueur mal réveillé de son hôte l’en découragea.

-Un thé, s’il-te-plaît.  N’importe quelle sorte, j’suis pas difficile.  Il le précisa probablement inutilement, car il était difficile d’imaginer le mafieux en fin connaisseur de thés variés, mais Alex voulait tout de même se montrer bon joueur en faisant ce qu’il considérait être un compromis.

- Je ne me souviens plus s’il a de la famille proche, des parents encore en vie. Il aurait pu être appelé et avoir oublié le chargeur de son phone. C’est bien le genre de l’énergumène.
-Ce... voulut commencer le druide outré en guise de protestation, les oreilles bien cramoisies.  

Il fut néanmoins interrompu et protesta de nouveau sur le manque de limites à la pudeur dont faisait preuve son hôte alors que manquait à l’appel leur connaissance commune.  Qu’il n’en avait que faire, si le sicilien sentait le vieux parmesan ou le pesto pas frais, et qu’il n’avait pas besoin d’en savoir plus qu’une information du style "donne-moi quelques minutes, je reviens".  Fier de lui, Alessandro lui intima de relaxer et Alex réalisa alors que l’italien s’était joué de lui.  L’idée de partager la douche avec le tenancier de bar fit grimacer le canadien, qui n’en rétorqua pas moins du tac au tac.

-De toute manière, rien qu’avec ton égo seul ça doit déjà être tassé.

Alex songea à se taire.  Il détestait crier d’une pièce à l’autre, spécialement quand l’un des partis de la conversation était dans la salle de bain.  Plutôt que d’entretenir un silence qui nourrissait une querelle de lycéens, il se décida finalement à partager des informations qui auraient le mérite d’être pertinentes pour retrouver l’ours.

-Ses parents sont morts dans un braquage qui a mal viré.  Il parle vraiment pas souvent de ses frangins et, à part sa sœur, je sais pas s’il a gardé contact avec eux.
 Ni s’il y avait un ou deux frères entre l’aînée et le benjamin.  S’il avait juste oublié de chargé son cellulaire, il aurait emprunté un chargeur, ou en aurait acheté un neuf.  Il m’a juré que tu le paies pas en pots de miel.  Une sainte-chance!

Les lobes auriculaires toujours carmins, Alex se contenta de dignement redresser l’échine pour bien montrer qu’il n’était pas simplement coloc, mais véritablement ami avec Charlie, et qu’il ne le considérait pas comme un quidam, ou un parfait imbécile.  Il attendit patiemment que le filet d’eau ne cesse, en observant la pièce dans laquelle il se trouvait.  Lorsque Alessandro coupa l’eau, Alex s’empressa de retourner là où son hôte l’avait laissé, et se tint aussi droit qu’une barre, une lueur farouche au fond des yeux.

-Si ça moto n’est ni ici, ni chez Jenny, ni à la cabane... raisonna-t-il.  Pour une fois qu’ils étaient d’accord, il fallait bien que ce soit sur un truc évident du genre.
-J’ai dit à Jenny de ne pas appeler les flics pour l’instant.  De toute manière, un homme adulte qui disparaît avec sa moto, ils mettraient le dossier au congélateur pour vingt ans.  S’ils le déchiquettent pas direct.

Il était de notoriété publique que le sicilien appréciait encore moins le corps policier que le biochimiste.  Et pour cause!  Lorsque l’italien élimina l’option famille de l’équation, Alex haussa un sourcil.  Si Charlie n’était pas allé voir sa famille, peut-être était-il allé voir celle d’Alessandro.  Ce dernier sembla lire dans le crâne du druide et le pria de cesser de le faire culpabiliser.  Il jura que Charlie n’était qu’un employé, et pas un bro, ou peu importait comment les membres de la famiglia s’appelaient entre eux.

Le silence s’installa de nouveau et l’on y entendait presque les méninges des deux cerveaux cogiter.  Le barman mentionna la possibilité d’un accident de la route et Alex pinça les lèvres, pour se donner le temps de réfléchir.  Au bout de quelques secondes, il réfuta l’hypothèse d’un timide non du menton.

-Si son contact d’urgence n’est pas dans cette pièce, elle vient de me confirmer que c’est silence radio de son côté aussi.  Et puis même si c’est pas Jenny non plus, quelqu’un aurait communiquer avec l’un de nous. À moins que Charlie n’ait décidé pour une raison étrange de faire une balade dans le désert et ne se soit perdu.  Ce genre d’accident n’était-il pas régulier?  Certes, ils en étaient loin, mais ce n’était pas non plus de l’autre côté du pays.  Le druide commença à se trémousser sur place, un tic nerveux affligeant sa paupière droite.

-Tu le penses pas vraiment, hein? voulut-il se rassurer.  Pour toute réponse, l’italophone se contenta d’appeler l’un de ses innombrables hommes de main.  Le coup de téléphone fut rapide, heureusement pour les nerfs du laborantin qui commençaient à trop s’énerver et, à force de tourner en rond, créaient des nœuds dans ses neurones.  Alessandro l’informa qu’ils avaient au moins vingt minutes à patienter.  Ce n’était pas en soi une bonne nouvelle, surtout pour un laborantin qui n’aimait pas rester planter à rien faire.  Il aurait bien une vessie à libérer, mais au niveau de la durée, ça ne le ferait pas.  Et le patron lui offrit une distraction.

-Toilettes. se contenta-t-il d’indiquer.  Ce serait un passage obligé avant le grand ménage.  Quant à la remarque sur l’hibernation de Charlie, Alex grogna, pas du tout amusé que son pote soit pris pour un personnage de bande-dessinée.

Le laborantin suivit aisément la piste de l’entrepreneur et, sans un mot, prit le matériel nécessaire et commença à frotter.  Il était plus efficace de laisser celui qui connaissait les lieux ranger pendant que le visiteur faisait ces gestes récurrents qui avaient le bénéfice d’engourdir la petite voix répétitive dans son crâne.  Le minutes passèrent sans qu’Alex ne s’en aperçoive ni n’y porte attention.  Comme à la fin d’un quart de travail, il s’assurait que tout était propre et, après avoir vu l’appartement du propriétaire des lieux, il était certainement préférable que ceux-ci resplendissent.  Après qu’il eut tendu à Alessandro le seau contenant les chiffons et autres brosses qu’il avait utilisé afin que le loup-garou aille les ranger, Alex se servit d’un verre d’eau à même l’armoire et l’évier du bar, et en prépara un second pour son acolyte temporaire.  Il avait déjà presque vidé son verre, et son pied claquait le sol nerveusement lorsqu’il tendit l’autre à Alessandro.

-T’inquiètes pas, je vais les laver et les ranger après.

Alex voulait demander à Alessandro s’il avait eu des nouvelles de ses hommes, ou mieux : s’ils avaient retrouvé Charlie. C’était ce qui était présentement le plus important, mais l’écho qui martelait son crâne depuis quelques dizaines de minutes refusait de se taire, et c’est une autre interrogation qui franchit ses lèvres.

-Tu sais que Charlie te considère vraiment comme son pote.  Et un bon pote, à part de ça.  Est-ce que la réciproque est vraie?  Tu es venu me voir hier parce que tu cherchais ton cuisinie, mais là, maintenant, c’est un employé ou un ami que tu cherches? Parce que dans tous les cas, c’est mon ami, et c’est loin d’être un énergumène ou un parfait imbécile.

Alex n’était pas trop certain du niveau de panique ou d’agressivité qui avait transpiré dans sa voix.  Il ne s’était pas voulu accusateur ou conflictuel, mais il était inquiet et voulait être certain des intentions de son allié provisoire.  Il savait qu’il ne se maîtrisait pas aussi parfaitement qu’il le souhaiterait, en ce moment, mais ne songea même pas à user de son mantra. Il s'inquiétait sincèrement pour Charlie, mais il en avait également marre de perdre tous ses amis les uns après les autres, et qu’ils disparaissent sans un mot. Il se remettait en question.  Ça n’était pas bon pour lui, pour son estime personnelle, pour sa capacité à faire confiance et à créer de nouveaux liens avec les gens. Le druide remplit de nouveau son verre d’eau et, avant de prendre une nouvelle gorgée, arracha avec ses dents un morceau de la peau à la base de l’un de ses ongles. Sa posture voûtée était à l’image de son état d’esprit.  Il leva finalement les yeux sur Alessandro, sans savoir s’il devait le croire ou non, ni s’il devait être rassuré.

-Tu as eu des nouvelles?  Si on a besoin de prendre une voiture, ce sera la mienne.  Sa bagnole était peut-être vieille, laide et bruyante, mais il avait la certitude d’une chose : elle n’était pas fichée et n’attirerait pas l’attention sur eux.


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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyVen 13 Déc 2019 - 19:47

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« Un'associazione improbabile. »
Je crois le Canadien un peu surpris que je me colle au ménage de mon bar. Il doit s’imaginer que je paye une armée de ménagère pour effectuer ces basses besognes. Normalement, le ménage est fait à la fermeture avec tous les employés présents, moi y compris. Mais parfois comme hier, nous nous sommes fait déborder et tout le monde était harassé à la fin du service. Le dimanche étant relâche, j’ai libéré mes employés malgré le bordel ambiant. De plus, si je me passe des ménagères, c’est aussi une volée de commères en moins dans mes pattes. Mon affaire légale est encore d’envergure raisonnable, je peux donc de temps à autre relever les manches et me salir les mains. Je n'en ai pas honte. Je n’oublie pas où j’ai grandi, quelle qu’en fût la réalité de ma naissance. Quoi que Cormier pense de moi, ce travail m’apprend à garder de l’humilité et m’aide à garder le contact avec le terrain. Je ne suis pas pressé de devenir un parrain qui passe ses journées sur un fauteuil, un chat sur les genoux. Un jour peut-être, si la vie me laisse vieillir assez.

Alex a décidé de frotter, je débarrasse donc les tables et prépare des paniers de verres pour le lave-vaisselle. Puis je m’occupe des bouteilles qui traînent et complète les cagettes des bouteilles consignées. De son côté, Alex avance vite, il est méthodique et ne renâcle pas à la tâche. J’apprécie son geste. Après tout, rien de ne l’oblige à m’aider alors que je sais tout le mal qu’il pense de moi. À deux, ce qui me semblait une tache incommensurable est expédié en moins de deux. Je vais ranger le matériel qu’Alex me redonne pendant qu’il va farfouiller du côté du bar. Quand je reviens, il me tend un verre d’eau que j’accepte de bon gré.

-T’inquiète pas, je vais les laver et les ranger après.

Je ne réponds pas à sa pique et me contente de lever les yeux au plafond. Je termine mon verre et le pose avec ceux des clients, puis enfourne un nouveau panier dans le lave-verre. Ensuite, je range sur l’étagère le panier qui est sorti de l’autre côté de la machine. Les verres sont brûlants. J’essuie d’un geste rapide les reliquats d’eau qui restent. La température aide à ne pas laisser de trace. Le torchon sur l’épaule, j’écoute Alex qui sort d’une réflexion intérieure des plus suspectes.

- Tu sais que Charlie te considère vraiment comme son pote. Et un bon pote, à part de ça. Est-ce que la réciproque est vraie ? Tu es venu me voir hier parce que tu cherchais ton cuisinier, mais là, maintenant, c’est un employé ou un ami que tu cherches ? Parce que dans tous les cas, c’est mon ami, et c’est loin d’être un énergumène ou un parfait imbécile.


Je souffle par le nez, ne réplique pas, car j’ai un panier entier de verre entre les mains et qu’il pourrait y avoir de la casse si je laissais mon humeur prendre le dessus.

- Tu as eu des nouvelles ? Si on a besoin de prendre une voiture, ce sera la mienne.
- Je croyais les Canadiens confits de patience à l’opposé des Italiens… Mais ils semblent roulés dans les préjugés…


Je range le dernier verre du panier que je repose avec un peu plus de brusqueries que nécessaire. J’ôte le torchon de mon épaule et le pose par-dessus pour qu’il sèche, puis regarde mon ancien camarade de classe.

- Je crois qu’il est nécessaire de mettre les points sur les i Cormier !

J’use à dessein de son nom plutôt que son prénom. Pour le côté froid et méprisant. Car depuis quelques minutes, Alex me les brise sérieusement.

- Si Charlie n’était pas mio amico, ce n’est pas moi qui serais venu en personne le chercher, j’aurais envoyé un de mes hommes ! Et l’imbécile c’est toi d’être resté fixés sur les idioties de nos années lycée. Grandis un peu bordelo ! Et arrête de te prendre pour un saint et de me considérer comme el Diabo. Tu n’es pas le meilleur des amis ni moi le pire.

Dire que j’appréciais le bonhomme, mais son sale caractère a raison de la bonne opinion que j’avais de lui malgré ses « défauts ». Je charge un nouveau panier de verre dans la laveuse ce qui pousse celui qui était dedans vers l’extérieur. Un bref nuage de vapeur me sépare du druide. J’ai parlé avec colère, car j’en ai ma claque de la pseudo bonne morale du Canadien. Il ne serait pas celui qu’il est, s’il était né dans un coin de little Italy à L.A., Chicago ou N.Y. C’est facile de médire quand on est issu d’un mélange entre Big foot et Super Girl. Alex ouvre la bouche pour me dire ce qu’il pense de ma répartie, la sonnerie de mon téléphone le fait taire. Je tarde même à répondre pour qu’il prenne conscience que malgré tout le mal qu’il pense de ma personne, c’est moi qu’il est venu voir pour son amico et non les flics. Oui, définitivement il n’est pas un saint, mais un fourbe. Une remarque que Therencio avait appliquée à un autre. Au final Chad et Alex se ressemblent un peu côté caractère, le loup étant plus sociable que le faux ermite qui me toise.

(…)

Mes hommes ont retrouvé la moto de Charlie en train d’être revendue à la sauvette. C’est ce que j’ai expliqué à Alex. Je me suis bien gardé de lui dire comment ils ont obtenu du vendeur les circonstances qui lui ont fait mettre la main dessus.

Le moteur mal réglé de la caisse de Cormier me vrille les oreilles. Si Willem était à bord, il accuserait le druide de maltraitance sur voiture. Trois virages plus loin, je ne peux pas me retenir.

- Tu penses changer tes freins un jour avant de tuer quelqu’un ?

Ça proteste, s’insurge et m’envoie aux roses.

- Le disque avant droit est mort vu le bruit qu’il fait. Entre autres bruits qui annoncent qu’on a un risque de finir la route sans les roues.

Vexé comme un caribou, Alex conduit en respectant scrupuleusement le Code de la route.

- Mais accélère !

Le vendeur de motos d’occasion l’avait trouvée sur le bas-côté d’une petite route qui longe la forêt. Un chemin connu de Charlie, car il y a des ruchers dans le coin et il n’est pas rare que des abeilles s’en aillent faire des ruches sauvages çà et là pour le plus grand plaisir du ventre du garou. L’imprudent emprunteur a été suffisamment castagné pour que je sois sûre qu’il n’est pas à l’origine de la disparition de Charlie. Ça non plus, je ne l’ai pas dit à Cormier.

- Ralentis, on n’est plus très loin.

(…)

Le coin est champêtre et tranquille. La route étroite serpente à flanc de colline. Elle est peu fréquentée, car une route en contre bas et bien plus large et mieux entretenue fait le travail pour aller à la ville voisine. Alex s’est garé sur le bas-côté, risquant de coller une roue dans une ornière. Finalement, je suis content que nous ayons pris son cercueil ambulant plutôt que ma voiture. Les indications du voleur sont floues, nous parcourons à pas lents une centaine de mètres, le regard collé au sol.

- Là !

Je montre une infime rayure sur l’asphalte qui traverse la chaussée pour terminer dans les herbes. Celles-ci ont été piétinées. Les branches d’un buisson sont brisées à leurs extrémités. Une lueur orange attire mon regard, je m’enfonce de deux mètres dans les fourrés et reviens vers Alex.

- Son feu gauche. Il le perdait sans arrêt et l’avait collé avec du chatterton.

Alex me prend le bout de plastique. Je regarde autour de nous. Ça ne sent déjà pas la mort.


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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptySam 21 Déc 2019 - 2:24



Une association improbable


Feat. Alessandro Amaro







-Mais!  T’avais dit vingt minutes! protesta Alex, qui n’aimait pas particulièrement que l’on lui reproche son impatience.  Ni qu’on le réduise à une citoyenneté qu’il n’avait qu’à moitié et partageait avec celle du descendant d’immigrants italiens. Le manitobain de naissance n’eut pas le temps d’en faire la remarque : le regard que lui vrilla le tenancier n’était aucunement de bon égard.  Pas plus que la soudaine distance dans sa voix ni dans le choix de ses mots.

Alors qu’il se sentait rétrécir de l’intérieur sous les mises au point du mafieux, Alex s’efforça de garder le dos droit, de ne pas courber l’échine qui pourtant le faisait naturellement, de relever du menton avec orgueil – bien qu’il eut préférer user de mots tels qu’honneur ou fierté; peut-être également défiance – et de soutenir les yeux du loup-garou sans trop ciller. Il voulut dire qu’il était satisfait que tous deux étaient d’accord que Charlie n’était pas un imbécile, prêt à passer outre l’insulte, mais Alessandro n’avait pas terminé.  Les yeux d’Alex gonflèrent et se plissèrent; rétrécirent et cliquetèrent au même rythme de ses sourcils marionnettistes. Dans un vaste répertoire d’expressions qui trahissaient autant d’émotions vives, Alex se résuma en une chose : outré.  Comment diable le mafieux osait-il lui parler ainsi, le traiter de jouvencelle de couvent, ou qu’en savait-il.  Évidemment qu’Alex n’était pas le meilleur des amis, sinon il ne se retrouverait pas constamment abandonné par ceux-ci, avec de rares exceptions qui se résumaient en une ex, une ancienne flamme féline, un coloc ursidé et un voisin lupin. Et les deux derniers ne pouvaient même pas se supporter des kilomètres à la ronde.  Il y avait bien les deux poulets, qui prétendaient qu’en allant péter du surnaturel ensemble – alors que c’était l’assistance de Mafdet qu’il avait désirée – ils étaient potes de facto.

Évidemment qu’Alessandro n’était pas le pire des amis, sinon il ne serait pas aussi bien entouré.  Constamment.  Certes, il avait plus de charisme que le canadien, et probablement plus de bon sens que le parangon de morale quand venait le temps de choisir de se taire ou d’être d’une sincérité bornée.  C’était probablement le plus frustrant pour Alex : de voir à quel point il galérait à se lier à des gens malgré qu’il était une bonne personne.  Du moins était-ce ce qu’il croyait.  Ou était-ce ce qu’il voulait se faire croire?

Par pur réflexe – ou peut-être par simple habitude de ne pas laisser le dernier mot à l’oméga – le druide ouvrit le mâche-patates et, avant d’informer son gosier des sons à abjurer, fut interrompu par le portable du mafioso.  Son coeur se mit à débattre et contrebattre toutes les chamades possible, à la fois curieux et dans l’espoir de ne pas avoir de mauvaises nouvelles. Exaspérant à son habitude, Alessandro prit tout son ample temps pour répondre au portable dans sa main.  Les nouvelles n’étaient pas bonnes, mais pourraient certainement être pire, tentait de se convaincre Alex.


***


Les propos acerbes de l’Italien qui ne l’affectaient pas prétendait-il pourtant, tournaient en boucle entre le cortex et les méninges du biochimiste.  Les insultes lui vrillaient la matière grise et remettait le diplômé en question. S’il avait l’habitude des reproches parentaux, ceux de son âge évitaient de lui en faire, ou savait au minimum y mettre la forme.  Pour qu’Amaro se décide à planter le clou ainsi, le druide avait peut-être appuyé sur une corde sensible, ou dépasser une borne de trop.  Ou peut-être était-il simplement insupportable.  Y avait-il même la possibilité qu’au coeur de l’inamabilité des accusations de son passager, un fond de vérité puisse nicher? Alex se contenta de lancer un énième regard noir à celui qui pestait désormais sur sa bagnole.  Cette fois, c’était sur les freins que le fiel latin était tombé.  Et avant que ces propos ne s’ajoutent à ceux qui martelaient déjà ses neurones, Alex riposta.

-Je n’ai pas le temps de m’en occuper moi-même parce que j’ai du pain à mettre sur ma table.  Et je gagne pas suffisamment bien ma vie pour régler ce genre de bricoles sans le prévoir en avance dans mon budget.  De toute manière, c’est presque rien.

Sauf que non, à en croire celui qui savait être barman, trafiquant, femme de ménage et désormais mécanicien, ce n’était apparemment pas rien.  Un disque avait trépassé et grinçait.  Et apparemment que celui qui murmurait aux voitures prévoyaient que les roues puissent décider de divorcer du reste du véhicule.  Les mains à onze heures et cinq, la prise très ferme sur le volant, Alex se contenta d’expirer par les nasaux, pour ne pas s’emporter. Il ne réagit pas à la supplique de son supposé allié lorsque celui-ci lui demanda d’accélérer et se contenta plutôt de répondre laconiquement.

-Vaut mieux pas : mes freins sont morts.  Pas de commentaire sur le risque de lui faire une veuve, ou quelque chose du genre.  Une explication simple, froide et courte.  Le silence s’installa pour quelques minutes.  Alex résigné à ne pas donner de raisons supplémentaires à de râler à l’Italien, dans une attitude qu’une mauvaise langue qualifierait de boudeuse, se contentait de conduire.

- Ralentis, on n’est plus très loin.

Sans répondre, Alex obtempéra : il préférait encore de loin retrouver son ami que de jouer à la plus forte tête avec l’italien.  Il ne put réprimer, toutefois, le sourire sardonique qui glissa sur ses lèvres un court instant.  Le comique paradoxe de la situation ne lui avait pas échappé.  Que les deux dernières phrases de son copilote soient une telle antithèse aurait bien fait marrer Alex s’il était dans de meilleures dispositions, ou en une compagnie plus amicale.

Alex se gara sur la chaussée, sans dire un mot sur le fait qu’ils aient survécu leur dangereux périple et tous les mortels dangers qu’il impliquait.  Il se contenta de verrouiller les portières et de glisser la clé dans sa poche avant d’investiguer à la suite du bellâtre.  Ce fut celui-ci qui trouva le premier indice.  Le coeur d’Alex fit une petite acrobatie, comme s’il espérait trouver un talisman enchanté qui pourrait les ramener directement à l’endroit où se trouvait l’ours.  Ils poursuivirent plutôt leur recherche dans la direction que prenait la marque au sol, et le loup-garou trouva un second indice.  Les sens lupin surdéveloppés jouaient définitivement en sa faveur, se dit Alex.  Alessandro lui ramena ce qui était, selon ses dires, l’un des feux de la moto.  Le druide s’en saisit en se demandant à qui le revendeur croyait pouvoir vendre une moto à laquelle il manquait un phare.

-Ça ne fait pas de sens.  Charlie n’aurait pas pris le champ et serait juste parti en laissant sa moto derrière, sans en informer qui que ce soit, ou appeler une dépanneuse.  Et s’il a prit le clos il y a deux jours, la piste n’est plus juste froide!  Elle est morte!

Alex ne pouvait pas se résigner à perdre un ami, mais il paniquait également à l’idée de ne rien pouvoir faire pour le retrouver, et craignait de ne devenir d’autant plus efficace.  Le laborantin se mit à faire les cent pas, dans l’espoir de se calmer, mais énormément trop de choses se bousculaient dans son crâne pour y parvenir.

-J’arrive pas à me concentrer pour penser! hoqueta-t-il à la manière d’un noyé, avant de poursuivre. J’ai besoin de...

Le scientifique prit une longue inspiration et, sans oser faire face à son némésis, dessouffla d’une voix plus posée qu’il ne l’aurait espéré.  D’un ton lent et calme qui ne lui était pas familier et qui trahissait sa volonté de se montrer délicat, Alex entreprit d’évacuer le surplus de pression dans son esprit.
-Je pense pas que je suis parfait.  Et je ne pense pas non plus que tu le sois moins que moi. Je ferai plus attention à mon attitude envers toi.

Alex en aurait eu beaucoup plus long à dire.  Toutefois, le moment n’était pas à s’épancher, mais à traquer de l’ours. Si Alex n’avait jamais rien fait de la sorte, il s’imaginait très mal demander à Alessandro de jouer au chien pisteur alors qu’il venait de lui promettre d’être plus respectueux.  Alex songea au commentaire qu’il avait passé au jeune Therence, sur l’appellation de monstres et rougit légèrement de honte.

Le druide hésita un instant à pousser ou non l’audace jusqu’à tapoter amicalement le bras du lycanthrope et décida de se retenir.  Il lui rendit plutôt le phare de leur ami avant de s’aventurer à son tour dans les herbes à la recherche d’un indice supplémentaire, un simple signe de main pour signifier à l’oméga qu’il n’attendait pas forcément de réponse de sa part.

Infructueux dans les broussailles, Alex abandonna les recherches au bout de quelques longues minutes pour se concentrer sur la route. La terre sèche et tassée par le vent ne lui était d’aucune utilité.  Aucune marque de pneu ou traces d’un corps qui aurait été traîné n’aurait résisté à deux journées californiennes comme celles qu’ils venaient de vivre. Si parfois le sol semblait encore légèrement tapé, ou que les cailloux faisaient de minuscules ornières qui tenaient probablement plus de la paranoïa que de la réelle observation.  Au bout de quelques mètres, néanmoins, le laborantin fit l’heureuse découverte de quelques taches d’huiles qui se mêlaient de manière presque indiscernable à l’humus sablonneux de la route flanquée d’une colline et d’un boisé.  Quelques pas plus loin, un deuxième amalgame visqueux, puis un autre et ainsi de suite jusqu’à ce que la distance les séparant soit si courte qu’une tache d’huile orne carrément la chaussée.  On avait dû y arrêter un véhicule.  Le druide soupira et fit signe à son allié de fortune de venir voir. Outre de rendre la possibilité d’un ours-napping plus probable, cela ne les avançait à rien.  Ou du moins, rien de concret aux yeux du laborantin, qui expira de nouveaux par les naseaux, frustré de son sentiment d’impuissance.

Le biochimiste suivit toutefois l’archipel huileux, dans l’espoir de déterminer, au minimum, la direction empruntée par le véhicule.  Il semblait ne pas avoir fait demi-tour vers Beacon Hills, mais bel et bien avoir poursuivi sa route vers de plus vertes contrées. C’est en manquant de se cogner sur un poteau métallique qu’Alex remarqua la présence du panneau de signalisation qui annonçait une courbe prononcée.  Il se retrouva à un souffle de distance de l’aluminium sur lequel trônait, tel une Victoire, une plaque de peinture arrachée à une voiture qui en était passée près, très près si l’on se fiait à la trajectoire des taches oléiformes.

Le druide se précipita, en un sprint qui n’avait rien à envier à ses joggings matinaux, vers sa voiture, en ouvrir le coffre arrière à toute vitesse pour récupérer sa trousse d’urgence.  Le scientifique se précipita ensuite en sens inverse et trousse à la main. Trousse qui tomba dans la poussière et un bruit mat, avant qu’il n’en extirpe un petit pot d’étain qu’il vida de son contenu dans la paume de sa main.  Il se mit à piocher les fruits séchés et les noix et tendit la main vers celui qui le regardait comme un illuminé qui aurait vu le Seigneur dans sa soupe.

-T’en veux?

Dès que la réserve fut épuisée, il la secoua vivement pour la vider autant qu’il ne le pouvait et la posa au sol.  Sa main plongeant de nouveau à l’intérieur du sac, il en retira un cric qu’il laissa de côté, et un tournevis qu’il saisit avec diligence. À genou devant le poteau, Alex se mit à en gratter délicatement la surface pour arracher la peinture et venir la déposer dans la petite boîte d’étain.

-J’ai un collègue qui s’est trouvé un job il y a quelques mois dans un labo judiciaire à Sacramento.  Il m’a dit que c’était le genre d’analyses qu’il y faisait.  Je pourrais lui demander de le faire pour moi...

Alex se mordit l’intérieur de la lèvre, toute trace d’enthousiasme ayant disparu de son faciès.

-Je sais juste pas dans combien de temps on pourrait avoir les résultats. admit le biochimiste, qui savait très bien ce que c’était que de se faire demander des délais d’analyses improbables.

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Alessandro Amaro

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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyVen 27 Déc 2019 - 18:04

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- Ça ne fait pas de sens. Charlie n’aurait pas pris le champ et serait juste parti en laissant sa moto derrière, sans en informer qui que ce soit, ou appeler une dépanneuse. Et s’il a pris le clos il y a deux jours, la piste n’est plus juste froide ! Elle est morte !

Alex est incapable de garder son calme. Il fait les cent pas et n’est pas loin de paniquer. Je commence à me demander si c’était une bonne idée de faire équipe. J’aurais pu l’envoyer faire la tournée des dépanneurs ou des garages. Je tente de faire abstraction des gesticulations organiques de Cormier et observe ce qui nous entoure à la recherche d’un indice. Sa moto n’est pas allée plus loin qu’ici : pourquoi ?

- J’arrive pas à me concentrer pour penser ! J’ai besoin de...

Mais il va se taire ? Je soupire. Dire qu’à un moment, j’avais l’intention de lui demander d’être mon druide ou quelque chose avoisinant vu que je ne suis pas un alpha. Au moins pour bénéficier de ses conseils sur les loups, la lune, la gestion de tout ça. Maintenant, cela va mieux, mais j’ai toujours les souvenirs cuisants d’avoir attaqué Jansen et Andy. En voyant Alex paniquer alors que nous n’avons aucun élément, je me demande ce que ce serait s’il devait me gérer en perte de contrôle.

- Je pense pas que je suis parfait. Et je ne pense pas non plus que tu le sois moins que moi. Je ferai plus attention à mon attitude envers toi.
- Cosa ?

Il me fait quoi là ? Me placer à son égal sur sa maudite échelle de valeurs ? Se fait-il conciliant, car je suis peut-être le seul qui possède les moyens de mettre la main sur notre ami commun, ou est-il sincère ? Son cœur joue une musique trop rapide pour que j’arrive à détecter le mensonge dans ses propos. Je mets cela de côté, car la disparition de Charlie m’inquiète. Pour un banal accident, il aurait rangé sa moto sur le côté et serait revenu à patte.

Alex me rend le phare et suit la route. Au bout d’un moment, il me hèle. Il y a des taches d’huile sur le sol qui se rapprochent signant le ralentissement de l’engin qui la perdait. Je reste sceptique quant à l’appartenance de cette huile de moteur. Soudain, Alex semble comme piqué par une mouche et fuse dans un sprint vers sa voiture.

- Cosa ?

Il revient avec une trousse de premiers secours. Je le regarde farfouiller dedans, sortir un pot de metal et vider son contenu dans sa paume.

- T’en veux ?
- Je ne suis pas un oiseau…

J’ai compris ce qu’il projette de faire, mais ne saisis pas pourquoi il prend le temps de manger ses graines au lieu de balancer ça dans la nature et de s’occuper d’effectuer son prélèvement.

- J’ai un collègue qui s’est trouvé un job il y a quelques mois dans un labo judiciaire à Sacramento. Il m’a dit que c’était le genre d’analyses qu’il y faisait. Je pourrais lui demander de le faire pour moi...
- Si cela n’appartient pas à un bouseux du coin, ça pourrait nous aider.
- Je sais juste pas dans combien de temps on pourrait avoir les résultats.
- La méthode des poulets quoi…


J’attrape mon téléphone et appelle Ryan. Je lui demande dans quel état est la moto. Il me confirme qu’il lui manque un feu et qu’elle semble avoir subi un choc par l’arrière. Il me dit aussi qu’il l’a posée au Fight Club. Je le remercie et raccroche.

- D’après Ryan, quelqu’un aurait heurté la moto de Charlie par l’arrière. Vu que Crowley n’a pas réapparu et que sa moto a été volée après, il faut chercher à l’endroit de l’impact, donc là où j’ai trouvé le phare, ou un peu en amont. En espérant que la moto n’a pas été déplacée après cet accident vraisemblablement provoqué. Ce qui nous ramène à pourquoi s’en prendre à Charlie ?

Je ne le mêle pas à mes affaires, car il m’avait dit vouloir se ranger. Mon amitié pour lui est assez forte pour que je respecte son vœu. Je laisse Alex ranger son foutoir et retourne non loin où j’ai trouvé le phare. Est-ce l’impact qui a provoqué la fuite d’huile ? Si oui, le bout de peinture récupéré par Alex nous donnera le modèle de la voiture et une année de construction. Lorsque j’arrive à la première tache d’huile, j’ai dépassé la voiture d’Alex et l’endroit où j’ai trouvé le phare. Charlie n’est donc pas tombé tout de suite.

Je pivote, regarde Alex qui est en train de revenir vers moi. Je tente de me représenter la scène. Charlie passe. A-t-il repéré qu’il était suivi ? A minima, il sait qu’une voiture roule dans son dos. Il a dû se décaler sur le côté pour laisser passer, car les premières taches d’huile sont très à droite sur la route pour ensuite revenir au centre de la route. Alex se trouve maintenant là où j’ai trouvé les rayures au sol, l’endroit de la chute. Charlie est agile avec sa moto, et elle n’est pas assez esquintée pour qu’il en perde le contrôle. Je suis à cinquante mètres du point de chute que je trouve la preuve formelle qu’il a bien été enlevé. Le biochimiste devrait confirmer mon analyse après que je ramasse un capuchon protecteur. Le genre qu’on trouve au bout d’une seringue, ou d’une munition telle qu’en possèdent les gardes-chasses ou les vétérinaires pour endormir un animal à distance. Alex m’a rejoint.

- Des chasseurs tu crois ? Car pour que ça agisse sur lui, il faut connaître sa nature et adapter le produit.






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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyVen 3 Jan 2020 - 17:39



Une association improbable


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-La méthode de la science, surtout! rétorqua Alex, une point de fierté dans la voix.  Malgré la pique de l’italien, Alex sourit légèrement : il avait promis d’être davantage conciliant et comptait bien s’y astreindre.  Inutile de rappeler au Sicilien qu’Alex n’était pas présentement avec une équipe policière, et qu’il n’avait jamais été enclin à avoir confiance en ces robots lobotomisés servant une justice qui, si elle était aveugle, avait l’odorat fin, surtout quand venait le temps de sentir de l’argent…  Non, Alex devaient bien s’admettre que, malgré toutes ses bonnes aspirations, il préférait encore faire affaire avec quelqu’un qui assumait d’avoir une morale douteuse ou, à la limite, de trafiquer dans des affaires louches.

Inutile également de relever le manque d’enthousiasme du sicilien face à la piste du druide.  Effectivement, n’importe qui pourrait posséder un engin qui coule et s’être arrêté par hasard autour des lieux de la disparition de Charlie, et rien ne leur disait que c’était la même voiture qui perdait son huile et qui avait été égratignée. Toutefois, l’homme de science ne croyait pas à une telle conjoncture.  Les lois des probabilités tendraient à lui donner raison.  Il lui fallait des faits et de la tangibilité sur lesquels il pourrait compter, et rien de moins.

Alex ne prêta guère à l’italien lorsque celui-ci se recula un peu pour agiter ses réseaux de contacts comme les politiciens agitent des épouvantails.  Un peu en retrait, le druide termina donc son prélèvement et attendit que le sicilien ne termine son appel pour en écouter le résumé, avec l’attention honnête de celui qui ne recherche pas simplement l’opposition. La question du mafieux était légitime : quel était le bénéfice de chercher des noises à Crowley?  Et l’affaire prenait de plus en plus l’apparence évidente d’un évènement délibéré.  Alex préféra taire sa première hypothèse : qu’on espérait parvenir à atteindre Alessandro à travers celui que l’on considérerait comme son sbire.  Si Alex croyait Charlie lorsque celui-ci lui disait qu’il ne trempait pas dans les affaires extra-curriculaires du tenancier de bar, cela ne voulait pas dire qu’un observateur extérieur n’en aurait pas moins la mauvaise impression. Qui devrait-il en blâmer, se demanda le laborantin avant de se reprendre et de se demander plutôt pourquoi chercher à blâmer quelqu’un alors que son énergie serait certainement plus profitable ailleurs. Le sac de secours en bandoulière et le pot d’étain dans la main, Alex retourna vers le loup-garou d’un pas pensif. Quel serait le mobile de cet acte délibéré? Un apiculteur du coin qui en avait marre de voir traînasser ce mec étrange autour de chez lui?

Voyant Alessandro qui n’avait pas perdu espoir et semblait toujours chercher des indices, Alex se décida à l’imiter en maudissant intérieurement son défaitisme. De retour entre le gravier et les herbes, Alex balayait les environs à la recherche de quelque chose qui n’était pas à sa place.  C’est contre une petit pierre qu’il trouva son bonheur : un petit bidon de diluant à peinture semblait avoir roulé de la route à l’accotement et s’était retrouvé arrêté par le gros caillou.  Alex le saisit au moment où le sicilien le héla, et retourna vers lui en inspectant le papier qui s’était collé au récipient.  C’était une facture de quincaillerie.  Alex en parcourut la liste d’achats d’un œil absent, mais fronça les sourcils en tombant sur l’acide muriatique. Il parcourut de nouveau la liste, blêmissant, pour valider son hypothèse qui n’était probablement que de la paranoïa.

Le bellâtre semblait aussi avoir trouvé un indice qui glaça le sang du biochimiste. C’était un objet qu’il connaissait trop bien pour ne pas le reconnaître. Comme il était parfois appelé à se servir de seringues en laboratoire, il savait aussi comment en retirer le bouchon et de quoi ils avaient l’air. Il se mordit les lèvres avant de ne répondre à la question du sicilien.

-Ou alors ils se sont pas fait chier et ont pioché dans les quelques produits qui marchent généralement sur tous les garous. Par contre, pourquoi des chasseurs l’auraient anesthésié plutôt que de l’éliminer?  Tu connais Breaking Bad?

Alex tendit la facture qu’il venait de trouver au second ami de Charlie.

-Ça ressemble drôlement à une liste d’épicerie pour un labo illégal. Soit les chasseurs font leurs propres anesthésiants, soit on a affaire à des trafiquants. Dans tous les cas, ça ne répond pas à la question : pourquoi Charlie? Ni pourquoi l’avoir embarqué.

L’ours-garou aurait-il posé sa truffe là où il n’aurait pas dû?  Les inquiétudes d’Alex ressurgirent, et avec elles l’impression que Alessandro avait raison et que la méthode officielle serait trop longue pour Charlie. Il restait une option, mais elle ne lui tentait pas franchement.  Les risques d’échec étaient trop élevés, surtout sans Mafdet pour l’aider et le guider.

-Embarque* dans la voiture, je vais te ramener chez toi. Récupère un truc qui est un lien fort pour Charlie et toi, puis on va se rejoindre au Néméton.

Alex ne put cacher son étonnement d’apprendre qu’Alessandro ne l’avait jamais visité. Allez savoir pourquoi, il avait assumé que Jansen le lui aurait présenté. Il modifia donc son plan d’action en conséquence.

-Dans ce cas je t’attendrai devant chez toi le temps que tu ailles chercher un truc pour focaliser votre relation, puis on ira chez moi et je préparerai mes choses. C’est bon?

Une fois en voiture, Alex déglutit un coup et s’empourpra avant de mettre le contact.  Ça n’était pas vraiment facile pour lui de piler sur son orgueil, mais il avait donné sa parole et ferait les efforts nécessaires pour la tenir.

-Du coup, si tu connais un bon mécanicien, tu pourrais me donner son contact? souffla-t-il comme s’il venait de profaner des paroles sacrées, avant de démarrer sur les chapeaux de roues.

*:

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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyJeu 9 Jan 2020 - 21:23

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- Ou alors ils se sont pas fait chier et ont pioché dans les quelques produits qui marchent généralement sur tous les garous. Par contre, pourquoi des chasseurs l’auraient anesthésié plutôt que de l’éliminer ? Tu connais Breaking Bad ?
- Euh, non. Enfin je crois en avoir vu un bout d’épisode sur la télévision d’An… d’une amie.
- Ça ressemble drôlement à une liste d’épicerie pour un labo illégal. Soit les chasseurs font leurs propres anesthésiants, soit on a affaire à des trafiquants. Dans tous les cas, ça ne répond pas à la question : pourquoi Charlie ? Ni pourquoi l’avoir embarqué.
- Tu sembles t’y connaître mieux que moi sur ce qu’a besoin un labo illégal.


Alex est trop absorbé par la disparition de son amico qu’il ne relève pas ma remarque. Le biochimiste cache d’agréables surprises dans sa manche.

-Embarque dans la voiture, je vais te ramener chez toi. Récupère un truc qui est un lien fort pour Charlie et toi, puis on va se rejoindre au Néméton.
- Je ne sais pas où il se trouve.
-Dans ce cas je t’attendrai devant chez toi le temps que tu ailles chercher un truc pour focaliser votre relation, puis on ira chez moi et je préparerai mes choses. C’est bon ?

- Oui. Tu…

… pense que je suis la bonne personne pour ce genre de truc ? Je ne dis rien et retiens ma question. Je sais qu’Alex est druide, mais jusque-là nos échanges n’ont eu que la causticité de la soude et rien d’autre. Je découvre un autre homme avec un savoir réel. J’avoue être un peu impressionné.

- Du coup, si tu connais un bon mécanicien, tu pourrais me donner son contact ?


Je me cramponne à la poignée de la portière pendant qu’il démarre bien trop vite à mon goût.

- Demande à Shepherd. Vu qu’il arrive à faire rouler son antiquité, il doit pouvoir remettre ta caisse en état et pour moins cher qu’un garage.

Alex ne décoince pas un mot, concentré sur sa conduite, mais pas que.

- C’est une bonne chose que Charlie cohabite avec toi.

Sourcil interrogateur de mon conducteur.

- Ta présence l’aide à respecter la promesse qu’il s’est fait à lui-même. Car même si je le laisse en dehors de mes affaires, il aurait pu tenter de replonger. Il est souvent difficile d’oublier le milieu dans lequel on a baigné étant jeune.

Je devine bien qu’Alex tente d’arrondir les angles avec moi. J’y apporte aussi mon aide. Pour Charlie, pour un passé qui, si nous n’étions pas amis, reste néanmoins commun.

(…)

Alex m’a laissé au bout de la rue, car il y a une place de libre pour se garer en m’attendant. Arrivé au Pink, je fouille du côté de la cuisine. L’ours n’est jamais monté jusqu’à mon appartement. Je tourne en rond dans cet espace pas si grand. Je vois les maniques qu’il utilise pour sortir les plats du four. Je sais qu’il ne faut pas y toucher, car il y tient, mais cela ne me ramène pas à lui. Ce n’est pas un objet qui nous unit. Sa marque de miel fétiche, pareil, rien de profond là-dedans. Je soupire, j’ai peur de ne rien avoir qui nous lie Charlie et moi. Par acquit de conscience, je fouille méthodiquement chaque recoin qu’il occupe au Pink. C’est au fond d’un tiroir, sous ses feuilles de paie plus ou moins froissées que je découvre un trésor que je ne pensais pas exister. Je le regarde longuement, l’effleure des doigts avec un sourire nostalgique.

J’emporte cette relique du passé et ressors du Pink en prenant soin de mettre l’alarme et de verrouiller comme il le faut. Je remonte la trentaine de mètres jusqu’à la voiture d’Alex. En m’installant sur le siège passager, je donne à Alex ce que j’ai trouvé. Le druide est surpris. C’est une photographie de la bande de Phoenix. Je frime devant, les natiche posées sur la selle d’une grosse cylindrée. Charlie tient sa batte fétiche. L’image nous plonge dans les souvenirs.

- Dylan est mort dans une rixe trois mois après cette photo. Bob s’est fait égorger en taule. J’ai revu Polly à L.A. Elle tentait de devenir actrice. Elle a réussi, mais dans les films pour adultes…

Alex me donne des nouvelles des autres, l’un a repris le garage de son père, l’autre le magasin de fringue de sa mère. Ça, c’est le meilleur. Les autres ont mal tourné ou mal fini. Je reprends le cadre des mains d’Alex et soupire. Finalement, Charlie est celui qui s’en sort le mieux avec moi.

- Et Myriam ? Tu sais ce qu’elle est devenue ?

C’était la plus belle fille de la bande, un peu intouchable. Tous croyaient que je l’avais collée dans mon lit, mais c’était faux. Myriam pavanait parfois à mon bras, nous nous donnions des airs de couple alpha, mais ce n’était qu’apparence. J’étais le seul de la bande à savoir que cette fille belle à damner un saint préférait les femmes.

J’écoute Alex, soulagé de savoir que Myriam s’en est assez bien sortie. Je ne dis rien jusqu’à la cabane du druide. Je repense à Phoenix, à ceux qui ne sont plus là, à cette bande en incluant Andy et Alex. Ce passé qui nous a façonnés, nous et nos liens. Je jette un regard en biais à Alex quand il descend de voiture. Avec ce qu’est devenue la majorité de la bande, il n’est pas étonnant qu’il me juge mal. Je reste assis dans la voiture pour éviter de violer une nouvelle fois son chez lui. Plongé sur la photographie qui offre une petite dizaine de sourires arrogants et fiers, je sursaute quand le coffre se referme sous l’impulsion d’Alex. Cette image censée refléter le bonheur est le témoin de nombreux échecs. J’offre un pâle sourire à Alex quand il se réinstalle derrière le volant.

(…)

Il a coupé le contact, je descends de la voiture et regarde autour de moi. Je ne suis pas à l’aise, oppressé par tous ces arbres qui semblent vouloir nous engloutir. Une main sur mon épaule me ramène sur terre. Alex a besoin de mon aide pour porter un sac. Je vais pour allumer une sigaretta, mais j’interromps mon geste comme s’il n’était pas en adéquation avec le lieu. Pourtant Dieu sait combien j’ai besoin de ma dose de nicotine à ce moment même.

- Cette fois, nous sommes sur ton territoire. Ne me perds pas.

Polysémie dans mes mots. J’appréhende ce qu’il va se passer au Nemeton. J’ai peur de la réaction de cette autre facette de ma personne, du loup que je suis. Je regarde Alex. S'il y en a un qui peut comprendre et amadouer le fauve en dehors de Therencio et Andy, c'est lui.






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Alex Cormier

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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyDim 12 Jan 2020 - 16:49



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Le scientifique tenta de noter le nom de Shepherd dans un compartiment de son cerveau.  S’il comprenait bien ce qu’Alessandro lui disait, ce mec n’était pas un mécanicien classique mais plutôt un entrepreneur à son compte, ou un passionné de bagnoles qui les bidouillait dans ses temps libres. Il se doutait qu’il oublierait l’information, et hésitait à demander au Sicilien de la lui écrire. La raison n’avait rien d’exceptionnelle : il était inquiet du sort de Charlie, et cette pensée obnubilait le reste, notamment la liste mentale qu’il se faisait pour préparer leur petite cérémonie.  Son tacot avalait la route sans même qu’il ne s’en aperçoive, son cerveau manifestement sur l’auto-pilote.  Ce fut la mention de Charlie qui ramena Alex à la réalité. Il se contenta de hausser le sourcil face à cette déclaration. Ça lui semblait un peu sorti de nulle part, et il avait besoin de davantage d’explications. Voilà qui rassurait Alex quant à son implication dans l’organisation illégale d’Alessandro, et donc les risques que sa disparition y soit liée.

-J’y suis pour rien : je ne joue pas la police avec lui. Si j’ai réellement une influence, c’est quand même lui qui choisit de tenir parole. Je trouve que c’est moi qui gagne le plus de notre colocation. Je suis chanceux qu’il ait accepté de venir vivre chez moi.

Inutile d’entrer dans les détails ou d’expliquer en quoi la présence de Charlie, plus que d’un quidam anonyme, lui permettait de garder les deux pieds sur terre et lui apprenait à relativiser les histoires que son cerveau inventait comme autant de fabulations. D’une part, Alex ne devait rien à Alessandro, encore moins une explication sur ce qui le rendait reconnaissant d’avoir Charlie dans son quotidien.  De toute manière, il n’aurait pas su comment l’expliquer avec les mots justes.


***


Alessandro était à peine ressortit de la voiture qu’Alex cueillit son portable pour y indiquer le nom de Shepherd, réalisant ensuite qu’il ne savait rien d’autre sur cet homme : ni son prénom, ni la moindre coordonnée.  Avec un peu de chance, il serait dans le bottin, et y serait le seul. Comme le laborantin commençait à naviguer sur le web, son portable sonna. Reconnaissant le numéro, il soupira avant de n’y répondre.

L’échange fut rapide, malgré l’insistance de son interlocuteur, et c’est après avoir refusé trois fois de rentrer travailler d’urgence cet après-midi qu’Alex raccrocha. Une minute plus tard, le sicilien ouvrait la portière et tendait au druide son lien. Le laborantin haussa les sourcils, ne s’attendant pas à ce que l’oméga soit d’un naturel nostalgique.  Il évita toutefois tout commentaire qui pourrait sembler accusateur, moqueur ou autrement offensant, s’en tenant à observer les visages qu’il reconnaissait sans avoir jamais connu réellement ceux qui s’y trouvait.  Comme toujours, Alex les avait confiné dans leurs boîtes de délinquants, ou de belles-gueules, ou de populaires, en avait établi un procès intérieur et ne leur avait jamais donné l’occasion de briller par eux-mêmes.  Les nouvelles que semaient le loup-garou n’étaient pas brillantes, et Alex les compléta des ouï-dire qu’il avait glané de ses propres amis, à travers des années de discussions informelles et de ragots plus ou moins bien intentionnés. La plupart des informations venaient de Margaret, qui avait marié l’un des mecs les plus tranquille de cette bande. Un mécanicien, justement.  Alex se sentit sincèrement triste d’entendre la liste des vies brisées qu’Alessandro lui listait, à son propre étonnement.  Comme quoi, peu importe l’opinion qu’il avait eu de ces gens, il ne pouvait trouver qu’ils méritaient un triste sort; pas plus que qui que ce soit d’autre, en fait. Il se demanda un instant s’il se serait senti de la même manière en apprenant qu’Alessandro, le chef de cette bande, eut connu un sort funeste, sans parvenir à une conclusion.

- Et Myriam ? Tu sais ce qu’elle est devenue ?

En temps normal, Alex aurait probablement tenté un commentaire vache pour insinuer qu’Alessandro devait vraiment mal s’y prendre avec ses amantes pour qu’elles préfèrent ensuite le sexe féminin, mais ça aurait été purement mesquin et, surtout, il était bien placé pour savoir que ce genre de choses ne fonctionnaient pas ainsi.

Alex démarra la voiture, tentant de se remémorer ce qu’on lui avait dit au sujet de la jolie femme. Il était tombé sur son profil, jadis, au détour des réseaux sociaux, et lui avait envoyé une demande d’amitié au bout de quelques jours de tergiversations, mais soit sa demande n’avait jamais été acceptée, soit elle n’y était pas active du tout. Alex hésita sur la façon de formuler la chose, bien que Alessandro soit évidemment en mesure de comprendre la diversité sexuelle et les préférences qui ne se limitent pas forcément à un genre ou un sexe spécifique. Après, rien ne disait que son expérience personnelle l’empêcherait de se froisser.

-Elle… a une copine. Petit regard en coin.  On croirait presque le lycan amusé de voir le druide marché sur des œufs. J’ai vu une photo en ligne il y a quelques années, elles étaient jolies ensemble.  Margaret m’a dit qu’elle est désormais à Tuscon avec sa partenaire.  Elles ont ouvert une boîte qui vient en aide aux jeunes issus de milieux difficiles. … ou dans la rue, il n’en était plus trop certain.


***


Alex avait installé la cage de Civet sur le siège arrière, ainsi que son sac à dos contenant son fatras dans le coffre arrière, avant de reprendre place derrière le volant.  Il posa un thermos encore chaud de l’infusion qu’il venait de bouillir dans le porte-gobelet entre son passager et lui-même. Le sourire contrit de celui qui était venu l’alerter de la disparition de Charlie semblait complètement dénué de son assurance habituelle. C’était le temps qu’il choisissait pour faire preuve de vulnérabilité? Si il y avait quelque chose de satisfaisant pour Alex de voir Alessandro ainsi, il aurait préféré que ce soit lors de l’une de leur joute acerbe.  Pas alors qu’ils tentaient de sauver leur ami commun.

-Fais pas cette tête, ça va marcher. fit-il, lui-même dépourvu de la conviction nécessaire pour persuader son passager. On va le retrouver.  Et je pense même pas avoir besoin de tes vicères, essaya-t-il de blaguer, pour alléger l’ambiance.  Comme si une balade en forêt était pire qu’un condamnation à mort chez l’italien.

-Juste, si tu bouffes Civet, je te laisse gérer Charlie seul. Je l’ai emmené parce que son lien avec Charlie est probablement plus fort que les nôtres. C’est l’être qu’il aime le plus, je pense bien. Un amour platonique, évidemment, comme celui d’un parent pour un enfant, ou entre deux amis, ou deux colocataires.

La route sous le couvert arboricole fut rapide. Alex voulait simplement limiter la distance à marcher dans les bois pour arriver le plus rapidement possible au Nemeton. Et puis, à voir la gueule que tirait Alessandro, ce n’était probablement pas plus mal de limiter son contact avec la nature. Il faudrait l’y habituer petit à petit, comme en doses homéopathiques. Alex déposa la cage de Civet sur le dessus de la voiture, son thermos en main, puis récupéra un sac derrière le siège conducteur, qu’il posa en bandoulière sur ses épaules.  Finalement, il alla récupérer son sac à dos dans le coffre et dut tirer Alessandro de sa transe avant de lui demander de porter le sac.  Si l’effet du Nemeton agissait sur lui à une telle distance, Alex n’aurait probablement pas besoin d’utiliser la poudre qui se trouvait dans le sac qu’il gardait avec lui.

-Je ne compte pas t’égarer. Mais si cela devait arriver, ton loup ne peut pas se perdre ici.

Le druide sourit à l’oméga, d’un sourire un peu mystique.  Le sens de ses paroles dépassait celui de ses mots. Non seulement le Nemeton avait une tendance naturelle à calmer et rassurer les êtres surnaturels – sous des conditions normales – il les attirait également à lui.  On ne le trouvait généralement que si on le cherchait ou s’il décidait de se dévoiler à nous.  Dans le cas contraire, il pouvait nous pousser à le contourner indéfiniment.  Il prit une longue gorgée de l’infusion chaude avant d’attraper son lapin de compagnie et d’entamer la marche dans les bois.

-On en a pour quelques minutes de marches. Je ne veux pas être intrusif, mais j’ai entendu dire que tu avais parfois du mal avec ton loup. Si tu veux, on peut en profiter pour en parler : il devrait être apaisé, ici. Sinon, je me tais.

Le bruissement des feuilles au-dessus de leur tête, sous l’effet de la brise, semblait les inviter dans la direction de la vieille souche. Le sentier s’ouvrit comme sous leurs pas et Alex prit seulement la peine d’avertir Alessandro de regarder où il posait les pieds, s’il ne voulait pas se retrouver à plat ventre.

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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyVen 17 Jan 2020 - 16:07

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Ce n’est pas tant que je crains la forêt, marcher sur les chemins ou en dehors est un exercice qu’au final j’apprécie. J’ai simplement peur de ce que je vais y trouver, cette autre facette de moi qui malgré mes progrès reste à part.

- Je ne compte pas t’égarer. Mais si cela devait arriver, ton loup ne peut pas se perdre ici.

Étonné, je regarde Alex tout en prenant le sac qu’il me tend. Son ton est lent et calme. Sa voix m’apaise déjà. Est-ce là, la particularité d’un druide ? Savoir apprivoiser les animaux de mon acabit ? Je lui souris, presque timidement, comme intimidé par le savoir de cet homme que je connais depuis longtemps, mais qui au final m’est un parfait inconnu.

- On en a pour quelques minutes de marches. Je ne veux pas être intrusif, mais j’ai entendu dire que tu avais parfois du mal avec ton loup. Si tu veux, on peut en profiter pour en parler : il devrait être apaisé, ici. Sinon, je me tais.

Je ne réponds pas verbalement, seulement d’un geste de la main montrant que je ne vois aucun sacrilège dans ses propos. Je me demande comment il sait pour mes soucis de contrôle. Jansen ? Andy ? Il a retenu l’information et ne semble pas m’accabler de ce fait. Je souris franchement quand il m’avertit que le sentier est traître et me conseille de regarder où je pose mes semelles. Je le rattrape pour marcher à sa hauteur quand la végétation me le permet.

- Toi et ta voiture, moi et mon loup, il me semble qu’à défaut d’être amis, nous sommes pour le moins complémentaires dans les failles.


Je laisse filer quelques pas. C’est vrai que la nature est apaisante, même si pour l’heure nous sommes inquiets pour Charlie. Je marche, guidé par Alex, pourtant j’ai l’impression de connaître le chemin, moi qui ne suis jamais venu ici. Je regarde ma main qui peut devenir griffue si je laisse une part sauvage de moi sortir de mon cœur.

- J’ai eu si peur la première fois… quand je me suis transformé, ma première lune. Je n’avais pas compris ce qu’il m’était arrivé, cette morsure qui avait disparu. Je n’avais rien dit pour ne pas passer pour un pazzo. Une mauvaise réputation est si difficile à laver dans le milieu.

J’écarte une branche, Alex m’attend pour que je revienne à sa hauteur, sûrement curieux que je livre des bribes de mon passé.

- J’ai senti mes os bouger sous ma peau. La terreur m’a envahi immédiatement. J’ai pensé à une drogue qu’on m’aurait fait prendre à mon insu. Mais la transformation était si réelle. J’étais du côté du port en totale panique…

D’un geste je désigne mes yeux.

- Ils ont changé de couleur cette nuit-là. Je ne me rappelle même pas d’avoir attaqué quelqu’un. Juste de ce cauchemar qui s’est révélé réel quand je me suis réveillé dans mon lit les mains pleines de sang. J’ai su que j’avais tué quelqu’un dans le journal du lendemain. « Un docker sauvagement attaqué par une bête féroce ».

Je me tais. Je n’excuse pas la couleur de mes prunelles par ce geste non intentionnel. Avant que je ne mène ma propre barque, j’ai été aussi homme de main. J’avais exécuté les ordres, exécuté les traîtres et les témoins gênants. Sonny s’en était assuré. Impossible de devenir un bon Capo si soit même ont n’est pas capable de faire ce que l’on ordonne à ses hommes. La Mafia ne fonctionne pas comme l’armée. Étrangement, le seul mot commun à ces deux entités est : honneur.

- Je ne te ferai pas l’affront de te demander de devenir mon émissaire. De toute façon je ne suis même pas un alpha. Mais il y a deux personnes qui représentent beaucoup pour moi. Tu connais Andy. Il y a aussi un lycéen, Therencio. Je le considère comme mio figlio. Cette part de moi, le loup l’aime beaucoup. Mais j’ai toujours peur de les blesser un jour où une conjonction de facteurs sape mon contrôle, ma maîtrise.

Je me tais, la souche vient d’apparaître sous nos yeux. Imposante, morte, mais si vivante. Une évidence. Je lève les yeux vers Alex en proie à une forte émotion. Il semble me jauger, regarder mes réactions. Son attitude n’est pas hostile, presque scientifique à défaut d’une compassion que je comprends difficilement ressentie pour l’homme de mal que je représente à ses yeux. Du moins, c'est ce que j'imagine. Nous ne nous parlons pas assez pour savoir ce que l'autre pense. Nous n'avons jamais dialogué avec calme.

Presque timidement, je m’approche de la souche, ose poser mes doigts dessus, craignant une réaction extraordinaire. Rien ne se passe, le bois est rêche sous la pulpe de mes phalanges. Je pose le sac au pied de la souche et me retourne vers le druide.

- J’ai conscience de tout ce qui nous sépare et nous séparera toujours, car ni l’un ni l’autre pouvons changer de camp. Mais je veux bien apprendre auprès de toi tout ça : le loup, le Nemeton. Pour ne pas blesser ceux que j’aime. Pour ne plus les blesser…

J'avoue à demi-mot ce qu'il s'est passé avec Andy. Je ferme les lèvres, la nature est reine ici dans ses bruits, ses senteurs et les caresses du vent.

- Si tu le veux bien évidemment.

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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyVen 24 Jan 2020 - 23:38



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-Fais gaffe où tu pourrais me faire sourire. menaça faussement Alex lorsque Alessandro compara leurs failles respectives.
 
La présence du loup était presque amicale et le druide devait bien se rendre à l’évidence qu’il y avait une différence entre qui l’italien était et ce qu’il était. L’un était incompatible avec le laborantin, de par son métier, ses passe-temps et les affaires dans lesquelles il trempait, alors que l’autre était une personne; un être humain comme les autres, avec ses moments agréables. Il y eut un moment de silence qu’Alex n’osa pas rompre : s’il voulait franchement aider le loup, il devait d’abord laisser le loup-garou lui indiquer en quoi il avait besoin. Il suivrait ensuite dans cette voie. Il ne s’attendait toutefois pas à faire face aussi rapidement à un tel aveu. La vulnérabilité que le sicilien admit eut le don de mettre Alex mal à l’aise, toutefois le druide parvint à conserver un faciès neutre et attentif aux paroles de son allié de fortune.

-Tu t’es senti seul, sans personne vers qui te tourner commenta-t-il alors que l’adolescent en lui n’arrivait pas à comprendre comment ce pacha, constamment entouré de sa bande d’amis, avait pu connaître ce sentiment étourdissant. Il observa par-dessus son épaule le visage d’Alessandro, qu’il pourrait facilement reconnaître dans une foule, en se disant qu’au final, il avait toujours ignoré que même le caïd portait un masque.
 
Plus que sentiment viscéral de vide que faisait naître la solitude, Alex réalisa que la peur qui s’était présentée cette nuit-là au jeune Alessandro ne l’avait probablement jamais quitté. Il n’avait peut-être jamais appris à apprivoiser la bête en lui si elle l’effrayait autant. Timidement, le scientifique osa lever sa main pour saisir l’épaule de son vieil ennemi et la serrer légèrement, à la jonction du trapèze avec l’omoplate. Sitôt la pression terminée, Alex retira sa main.
 
-Tu ne dois pas t’en vouloir. Je ne sais pas ce que je ferais si j’étais mordu aujourd’hui. Rien ne dis que je parviendrais à garder le contrôle, avec ou sans aide. Je ne peux pas imaginer à quinze ans…
 
Alex passa la langue sur ses lèvres.  Alessandro venait de le dire : il était déjà plongé dans les organisations souterraines lorsqu’il avait été mordu. Avoir eu de l’aide ne l’en aurait probablement pas sorti, mais aurait pu le rendre… différent. Cette facette plus douce, presque humble, rendait Alessandro bien plus humain, et il devenait plus aisé de comprendre une partie de ce que leurs amis communs voyaient en lui. Toutefois, après toutes ces années, si l’italien maîtrisait toujours aussi mal son loup, était-ce parce que… Une cascade d’interrogations, de présomptions et de conclusions inonda la cervelle du laborantin, qui voulut commencer par le commencement.

-Je ne suis pas le premier druide que tu rencontres. affirma-t-il en tentant probablement de se convaincre lui-même. Il ne savait pas, à partir de là, comment mener sa barque sans irriter l’Etna humain face à lui. Alessandro lui coupa l’herbe sous le pied alors qu’Alex réfléchissait en se mordillant la lèvre.

-Je ne te ferai pas l’affront de te demander de devenir mon émissaire.

Les sourcils hauts comme l’Everest, le laborantin se demanda à quel point il était prévisible. Il ne put toutefois s’empêcher de froncer ses appendices sourciliers. Dans d’autres circonstances, dans une situation différente, où ils seraient unis avec une relation dissemblable, Alex n’aurait pas été gêné de devenir l’émissaire d’un alpha.  Simplement, le passif entre ces deux hommes était trop lourd pour qu’ils établissent une relation basée en aussi grande partie sur la confiance. Le druide tenta de ne pas réagir à la mention d’Andy et de… Ce Therence?  Celui qui s’était amouraché d’un wendigo? Son fils? C’était un peu étrange à entendre, et Alex ne put s’empêcher de sourire en apprenant que le loup appréciait particulièrement le lycéen.  C’était suffisant pour confirmer de quel Therence il s’agissait. Et cela expliquait l’approvisionnement en arme du lycéen.  La mine soudainement assombrie à cette pensée, ainsi que par la mention d’Alessandro de sa crainte de blesser sa copine ou son fils, Alex laissa passer le loup-garou devant lui dans la clairière. À quel drame Andy avait-elle été confrontée la fois où elle l’avait appelée avec la voix tremblante?

Alex chassa cette pensée et observa plutôt le loup-garou qui rencontrait pour la première fois la vieille souche.  C’était toujours un moment particulier, et intéressant pour un œil externe. Le druide était curieux de remarquer l’attitude, définitivement humble cette fois, du lycan. Le visage passif, inexpressif, il se contenta d’un mouvement de menton pour encourager Alessandro à poursuivre. Ce ne serait pas lui qui lèverait le voile mystique de ce moment silencieux entre les ennemis d’apparat. L’entrepreneur effleura le bois concentrique du bout des doigts, avec révérence et retenue. Malgré l’émotion qui devait bien être en lui, il parvint à faire preuve de détachement.  Finalement, il posa le sac au sol et rompit le charme.

Alex se contenta d’incliner légèrement plus sa tête vers le sol. Les propos du sicilien étaient vrais. Chacun était campé dans sa position et ne risquait pas d’en bouger.  C’était déjà un petit miracle qu’ils aient tous deux accepter de se tendre la main, simultanément. Alex frémit et se figea, sans réaliser immédiatement qu’il avait suspendu son souffle. Le druide était en mesure de lire entre les lignes, et de faire des additions de base. Il en conclut donc qu’Alessandro avait perdu le contrôle et que c’était Andy qui avait mangé.  Étrangement, il semblait moins enclin qu’à son habitude à l’accuser de mille vilénies. Il ignorait si c’était l’influence du nemeton ou encore leurs discussions à cœur ouvert, depuis la voiture.

-Non, répondit-il à l’offre du loup-garou.  Les yeux de l’oméga s’ouvrirent plus vite qu’Alex ne l’avait cru possible, et il leva la main devant lui pour exprimer que tout le monde ne parlait pas aussi rapidement que la mitraillette à voyelles. Le scientifique parlait calmement, tout en pesant ses mots.

-Je refuse de t’aider, pas sous ces conditions, en tout cas.
Le druidon inspira profondément, à moitié incrédule face à sa témérité, et à moitié face à ce qu’il s’apprêtait à dire.  Il s’empressa de poursuivre avant qu’Alessandro ne lui prenne l’envie d’un croque-monsieur à la mode canadienne.

-Je te propose plutôt de t’aider non pas pour Andy, ou Charlie, ou qui que ce soit d’autre, parfaits inconnus ou amis, mais pour toi. Marché conclus?

Lorsque la main du loup-garou trouva la sienne, le druide se permit un sourire timide, rapidement suivi d’un spasme incontrôlé qui tira sa joue en direction de Sacramento. Les mains des deux hommes s’affranchirent l’une de l’autre.

-D’abord, il n’y a pas de solutions ou de techniques miracles. Il y en a qui fonctionnent mieux pour certaines personnes, ou à certains moments. La plupart des gens fonctionnent avec une ancre ou un mantra, comme tu le sais sûrement. L’ancre est une méthode qui marche bien tant que le lien reste fort.  Le mantra se rapproche davantage de la méditation et demande plus d’investissement : il faut se l’approprier en se pratiquant à le réciter pour trouver son euh… sa sérénité. Ça a l’avantage de ne dépendre que de soi.

Du regard, Alex confirma qu’Alessandro suivait toujours, avant de poursuivre. Il humecta ses lèvres et fit signe à l’oméga de prendre place sur la souche, à ses côtés.

-Mais ça, c’est bon quand on perd le contrôle ou qu’on sent qu’on est sur la pente vers la perte de contrôle. Il y a moyen de travailler en amont également pour limiter les risques que ça n’arrive.  La méditation, peut encore une fois être utile, mais ce n’est pas fait pour tout le monde, je te l’accorde.

Alex soupira et se gratta le crâne.  Il ne voulait pas irriter Alessandro inutilement et ne savait pas comment poser la situation convenablement, une fois de plus.

-J’ai la conviction que le moyen le plus efficace de se maîtriser est d’apprivoiser son loup. Je sais que ce n’est pas évident. Je ne l’ai pas vécu, je ne peux pas le comprendre, mais si tout le monde me dit unanimement la même chose, je le crois sans problème. Donc euhm… je vais te poser une question et je te promets que je ne jugerai pas ta réponse. Je ne suis pas ici pour ça. Quelle est ta relation avec ton loup? Il t’effraie toujours? Tu l’enfermes quelque part en toi? Tu écoutes ses instincts et ses conseils? Tu le laisses guider tes pulsions? Tu lui fais confiance?

Alex sourit une nouvelle fois à Alessandro en lui envoyant un regard de petit chiot qui craindrait de n’avoir fait une bêtise. S’il mourrait ainsi, il se trouverait bien bête.

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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyVen 31 Jan 2020 - 16:20

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- Non.

Voilà un refus direct et concis. Cela fait mal, mais Alex a le mérite de ne pas se planquer derrière des excuses vaseuses. Cela fait mal, car l’espace de quelques instants j’y ai cru. Je me traite de naïf et d’idiot. Comme si dévoiler quelques-unes de mes faiblesses allait changer mon image de brute. Brutal je le suis, le dernier à avoir goûté à mon imagination qui devient morbide sous la colère est le mentor de Tobias. J’ai laissé mio amico l’achever, mais à sa place j’aurais prolongé l’agonie de ce tueur sadique. Ce qu’il était n’excuse en rien mes actes ni ce que je projetai si Tobias ne l’avait pas éviscéré. C’est cette part de noirceur en moi qui fait fuir Alex. Son refus me blesse, mais je ne peux pas lui en vouloir de se protéger. Mes sombres pensées sont coupées par une main qu’il lève.

- Je refuse de t’aider, pas sous ces conditions, en tout cas.
- Cosa ?

Cormier et sa lenteur à exprimer même les idées les plus simples, comme s’il sortait ses mots d’un coffre à trois verrous, les passoires de Socrate. Sonny avait un jour tenté de m’en expliquer le concept. J’avais pris une claque quand j’avais résumé que déterminer ce qui vaut la peine d'être dit se résumait à se taire. Alex inspire profondément, visiblement inquiet de mon impatience légendaire. Il serait surpris de constater que je me suis un peu assagi. Un peu.

- Je te propose plutôt de t’aider non pas pour Andy, ou Charlie, ou qui que ce soit d’autre, parfaits inconnus ou amis, mais pour toi. Marché conclu ?

J’entrouvre les lèvres, mais au fur et à mesure que ses mots impriment ma cervelle, je me rends compte de la portée de tout ça. Je me contente de serrer sa main sans un mot, mais en souriant.

Alex me résume ce que je sais déjà, mais il faut bien poser le problème. Je l’écoute sans l’interrompre. Une ancre… Sonny l’a été un moment, il m’a tout appris, je le vénérais comme un père. Puis, il m’a viré de sa vie proche. J’étais devenu un Caporegime, un chef de squadra. Il ne pouvait plus se permettre d’avoir un lien privilégié avec moi. Le rude passage au monde des adultes a rendu mon loup plus féroce et peu enclin à faire à nouveau confiance. Ça et le manque d’encadrement de l’alpha à qui on m’avait confié à Phoenix font ce que je suis devenu. Ça et mon caractère volcanique aussi.

-  Le mantra se rapproche davantage de la méditation et demande plus d’investissement : il faut se l’approprier en se pratiquant à le réciter pour trouver son euh… sa sérénité. Ça a l’avantage de ne dépendre que de soi.
- C’est ce qu’il me faudrait, mais tu me connais rester calme cinq minutes à réciter un mantra alors que je suis sous le coup de la colère… C’est comme vouloir stopper un torrent à main nue. Je n’ai jamais trouvé de phrase qui me corresponde.

Personne ne m’a appris, ou ne s’est donné la peine d’adapter à ma personnalité. Alex poursuit son explication et mon oreille se fait attentive. Travailler en amont ?

- La méditation, peut encore une fois être utile, mais ce n’est pas fait pour tout le monde, je te l’accorde.
- Pourtant à ce que j’en sais, cela semble être le seul moyen efficace. Mais quand on tourne à la caféine et à la nicotine comme moi…

En réflexe, ma main cherche mon paquet de sigarettas et mon briquet. Je résiste à l’envie de m’en griller une. La discussion, pourtant amicale, me stresse.

- J’ai la conviction que le moyen le plus efficace de se maîtriser est d’apprivoiser son loup.
- J’ai hérité d’une tête de cochon…
- Je sais que ce n’est pas évident. Je ne l’ai pas vécu, je ne peux pas le comprendre, mais si tout le monde me dit unanimement la même chose, je le crois sans problème.
- J’ai eu le même raisonnement, mais à l’application…
- Donc euhm… je vais te poser une question et je te promets que je ne jugerai pas ta réponse. Je ne suis pas ici pour ça. Quelle est ta relation avec ton loup ? Il t’effraie toujours ? Tu l’enfermes quelque part en toi ? Tu écoutes ses instincts et ses conseils ? Tu le laisses guider tes pulsions ? Tu lui fais confiance ?
- Ma relation avec lui ?


Vastes questions qui me font m’asseoir sur la souche. De son côté, Alex n’est pas rassuré. Je lui lance un signe de la main : il n’a pas à s’en faire. Il en faut plus pour sortir l’animal. Je ne réponds pas tout de suite, car pour cela il me faut questionner le principal intéressé. Le loup écoute depuis le début, il lorgne le druide, le renifle. Il m’affirme ne pas avoir assez de liberté, qu’il étouffe. Je mets en mot ce qui résulte de cette discussion intérieure, sans filtre, sans chercher à arranger ce qui vient pour leur donner une suite logique.

- Il se sent en cage, une cage qui s’est un peu agrandie depuis que je connais Therencio. Oui, il me fait peur, car lorsqu’il sort, il est une bête féroce. J’ai peur qu’il prenne les commandes pour toujours. Il fait confiance à Therencio, mourrait pour lui. Avec Andy, c’est plus complexe. C’est l’homme qui est attiré par elle non le loup. Le puma j’imagine… Les pleines lunes sont moins dangereuses. Un t-shirt du bambino suffit quand il n’est pas là. J’ai lâché le loup que pour des actes d’une violence extrême. Je ne lui ai fait goûter que le sang. Ça change un peu avec Therencio, mais je ne fais pas confiance dans ses pulsions, peut-être parce que je les pense aussi sombres que les miennes.

Je regarde Alex, me moquant du trouble que peut lui apporter mes aveux.

- Je le tiens solidement attaché, car j’ai peur que nos deux forces combinées ne fassent apparaître un monstre.

Je ne nomme pas la bête que nous avons combattue dans les égouts. Je ne sais pas ce qui a perdu Sébastien Valet, mais j’ai peur que la même folie me guette.

- Emprisonner le loup n’est pas la bonne solution. Un jour, tôt ou tard…

Je soupire, regarde la photo trouvée dans les affaires de Charlie. Il s’est rangé, mais n’a pas oublié la bande pour autant. Civet s’agite dans sa cage, je me lève pour lui ouvrir sous le regard peu assuré du druide. Le lapin s’agite, le loup aussi, voilà une belle proie que je lui présente sous le museau.

- Autant se mettre en condition, car les mots resteront toujours des mots.

Je pose Civet sur la souche. En trois bonds, il se colle à son maître, oreilles baissées, l’œil torve. Je reviens m’asseoir en tailleur sur le Nemeton et laisse le fauve sortir. Il n’y a pas que le lapin qui frissonne. Subitement, j’ai honte de mon regard devenu bleu. Il me semble voir Alex esquisser un geste vers sa poche. J’imagine qu’il n’est pas venu ici seul avec moi sans défense. Un sac de sorbier est une solide défense si on a le temps de s’en servir.

- Je ne me vexerai pas si tu m’entoures de sorbier.

Ma voix est plus rauque. La poudre noire serait une nouvelle cage pour le loup, plus grande, mais geôle tout de même. J’entends les battements de cœurs agités de Civet, ceux d’Alex. Je suis transformé, mais encore loin d’avoir délié l’animal de toutes ses entraves. Je fixe Civet pose la photo sur la souche.

- Charlie est en danger, ses amis sont là.

Je parle au loup comme s’il était un être distinct de moi. Charlie est important pour lui, il le connaît depuis le début. L’ours était le seul à pouvoir rivaliser en force avec moi, mon garde fou, le garde loup.

- Maintenant, c’est lui qui a besoin de notre aide.

Je regarde Alex qui me surveille attentivement, sensible à la moindre contraction de mes muscles.

- Avec un but comme celui-ci, ça me semble plus facile.  Il veut aider, Charlie est son ami, un allié. Je vais lâcher les dernières entraves. Je n’ai aucun mantra sur lequel m’appuyer pour revenir, juste l'amitié qui me lie à Charlie. Ça va aller ?



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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyDim 9 Fév 2020 - 18:11



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Alors que la discussion prenait lieu, Alex tentait de noter mentalement les objections de l’oméga. Il s’efforçait de se dissocier des propos du loup-garou plutôt que de voir en les similarités de leurs défauts les raisons de leur haine mutuelle. Le druide aussi savait avoir la mèche courte et n’était enclin ni à réciter quelques mots pour focaliser son esprit, ni à méditer. Il avait également hérité d’une tête dure et d’un certain orgueil, bien qu’il tentait de le cacher plutôt que de l’afficher à la mode italienne.

Toutefois, tous deux partageaient également des qualités qu’ils savaient apprécier chez l’autre. Leur intelligence et leur capacité de réflexion, notamment. Le druide laissa tout le temps au lycanthrope pour sonder l’interrogation qu’il lui avait fichu en pleine poire. Alex respecta ce silence, accueillant avec réconfort le geste de la main du commerçant. Alors qu’il attendait, il ne savait pas que faire de ses bras qu’il croisa devant son torse, décroisa, laissa pendre comme un macaque, joignit dans son dos, laissa de nouveau pendre comme deux poids morts. Alex se sentait idiot, se disait qu’il n’y paraissait certainement rien d’anormal et qu’il n’avait qu’à arrêter d’y penser. Sauf que le silence, aussi apaisant soit-il, ne rendait ses monologues intérieurs que plus alourdissant, et entre une esquisse de liste d’épicerie et un détail d’un film qu’il venait de saisir, le druide continuait de se demander pourquoi, oh pourquoi, il ne parvenait pas à présenter une posture naturelle. Jusqu’à ce que Alessandro ne le sauve de sa torture intérieure.

La prise de parole de l’italophone vint également corroborer les soupçons d’Alex. Non seulement se détachait-il de la bête intérieure mais l’avait-il enfermée. Impossible alors de faire la paix avec cette partie de lui-même, ou de l’apprivoiser. Les mentions de Therencio vinrent confirmer les déductions antérieures du druide.  Le Therence qu’il avait rencontré, étudiant rebelle au caractère fort semblait savoir attirer les surnaturels à lui, mais également les mettre dans sa poche. Si Alex pouvait comprendre la première partie, qui lui était également familière, la seconde le mystifiait. Comment un humain pouvait-il parvenir à apaiser un wendigo ou un oméga tempétueux aussi naturellement était inexplicable à ses yeux.  Cela tombait donc sous le sens qu’il s’agisse de la même personne. De là à expliquer, ou permettre de comprendre, leur lien de filiation, par contre, il y avait toujours une marge.

Alex écoutait Alessandro lui parler de ses peur, celle de perdre définitivement le contrôle du loup et ensuite de faire des ravages auprès des gens qu’il aimait. Ça n’était pas formulé ainsi, mais ça ne prenait pas non plus la tête à Papineau pour le comprendre. Le mafieux admettait également n’avoir laisser son loup ne connaître que la violence et le sang, craignant que les instinct du loup ne soient aussi  destructeurs que ceux de la facette humaine de sa personne. Alex soutint le regard qu’Alessandro vint lui chercher, tentant d’imprégner un peu de douceur à la compassion qui avait arrondi ses sourcils. Visiblement, l’adage voulant que la première victime d’un coléreux était celui-ci n’était peut-être pas sans fondement.

- Je le tiens solidement attaché, car j’ai peur que nos deux forces combinées ne fassent apparaître un monstre.

L’empathie disparue toutefois rapidement lorsque le sicilien prononça le nom maudit. Celui qu’Alex entendait trop souvent pour parler de ses congénères surnaturels. Les sourcils immédiatement froncés comme le maillet d’un juge, Alex leva la main vers le visage d’Alessandro avec rapidité. Malgré un mouvement qui aurait pu laisser croire à une gifle, le druide se contenta de pointer un index accusateur.

-Tu es beaucoup de choses, Amaro, mais je ne te laisserai pas dire que tu es un monstre, ou que t’en seras un. Ni maintenant, ni jamais. Ni toi, ni personne d’autre, ou alors tu me les envoies! Si tu acceptes d’employer ce mot, tu acceptes de le devenir, éventuellement. Les mots ont un pouvoir qu’on néglige trop. Si tu veux anéantir cette éventualité, ne la laisse pas exister, et cherche des solutions qui te permettront d’arriver à tes fins.

Alex fit une légère pression sur l’épaule de son némésis, lui offrant un sourire un peu timide, mais qui recouvrait tranquillement la tempérance dont il avait fait preuve jusqu’alors.

- Emprisonner le loup n’est pas la bonne solution. Un jour, tôt ou tard…

C’était effectivement la conclusion à laquelle Alex avait voulu que son homonyme arrive par lui-même.  Il ne pouvait pas se permettre de lui dire simplement quoi faire : Alessandro devait faire le cheminement par lui-même.  Cette fois encore, le druide laissa au lycanthrope le temps d’intégrer leur échange, le chemin qui l’y avait emmené et la destination qu’il voulait atteindre.  Il ne pipa mot lorsque la photo le replongea dans ses souvenirs, ni lorsqu’il se rapprocha de la caisse de Civet, bien qu’il ne puisse retenir un mouvement nerveux et protecteur envers celui-ci. Il observa les gestes du bellâtre qui tenait le lapin et le déposa sur le nemeton, et se contenta d’un sourire fier plutôt que de souligner que ce n’était pas là la façon d’agir d’un monstre. Alex ne se pencha pas pour caresser l’animal de compagnie lorsqu’il vint se blottir contre ses mollets, préférant montrer à l’homme en face de lui qu’il ne considérait pas que le lapin ait besoin d’être rassuré.

Alex préférait également garder un œil sur celui qui venait d’affirmer qu’il était temps de passer de la parole aux actes, tirant un sourire ironique, cette fois, au scientifique.  Le visage du charmeur se tordit de douleur, sinon de la déformation qu’engendrait la métamorphose et Alex ne put retenir un frisson qui lui traversa de l’échine à la joue gauche qui tressaillit involontairement d’un air dédaigneux. Le regard bleu qu’Alessandro avait jadis utilisé dans l’optique d’intimider le druide prenait une dimension différente. Celle d’un lourd passé qu’il pouvait être difficile pour le lycanthrope à accepter. Le druide soutint le bleu glacial alors que, par réflexe davantage que par volonté, il cherchait sa petite besace de sorbier. Son geste se figea lorsque le loup-garou le dénonça au druide qui en prit conscience, gêné.

-J’ai confiance en toi : je ne crois pas que j’aurai besoin de m’en servir. Par contre, je préfère être prêt à nous enfermer, Civet et moi, en cas de nécessité. Tu n’as pas besoin d’être retenu et enfermé constamment.

Alex lança un regard entendu au métamorphe qui siégeait sur la vieille souche. L’homme se parlait à lui-même et, lorsqu’il s’adressa au druide, celui-ci sentit presque de l’inquiétude, ou un manque d’assurance, chez celui qui incarnait la confiance et avait désormais une apparence suffisamment intimidante pour peupler les cauchemars d’enfants. Alessandro craignait que l’absence de mantra, ou d’ancre, ou de méditation, ne pose problème. Loin de vouloir prendre avantage de la vulnérabilité passagère du lupin, Alex tenta plutôt de l’encourager, reprenant les paroles d’Alessandro en les modifiant légèrement pour insinuer son point.

-Tu veux aider, sans me blesser.  Charlie est ton allié et ton ami. Cette amitié te servira d’ancre, pour aujourd’hui. On pourra te trouver un mantra ensemble un autre jour, bientôt.  Tu me sembles calme, tu as une ancre, et je suis là pour t’aider. Tout ira bien. Concentre-toi sur le positif.

-Vas-y
, exigea le druide. À ses pieds, Civet couina. Alex inspira profondément, tentant de guider le loup-garou.

-Tu es la même personne, l’homme et l’animal à la fois. Les deux faces d’une même médaille. Il faut que tu trouves le bon équilibre entre ces deux parts pour qu’elles soient sereines et harmonieuses.  Souviens-toi que la nature est cruelle, mais elle n’est pas maligne. L’animal en toi est pareil et n’a pas la volonté de causer du mal,  seulement de se défendre, ou de se nourrir. Je crois que ce que tu crains du loup, c’est ce que l’homme lui permettra de faire, avec sa puissance.

Le biochimiste se sentait sur le point de partir en tous sens et tenta de remettre la bride à son esprit, et lui donner un semblant de direction.  

-Je pense que tu dois considérer ces deux facettes comme unies et indivisibles; que tu cherches la cohésion plutôt que la dualité.  C’est elle qui donne l’impression que tu rejettes le loup, que tu n’acceptes toujours pas complètement cette partie de toi-même. Je ne le vis pas, mais ce que j’ai compris de mes conversations avec mes amis loup-garous, c’est qu’en combattant cette part de toi-même, le loup, c’est toi-même en entier que tu combats.  Tu ne pourras qu’être tourmenté aussi longtemps que tu te feras la guerre à toi-même.

Le druide n’était pas certain de parvenir la lueur qui glissa dans le regard du lycanthrope et il releva les deux mains pour le calmer, ou se rassurer lui-même.

-On fait équipe, là.  Je suis ici pour t’aider.  On est pas des ennemis, dans cette affaire. Je t’ai dit que je te fais confiance.

Alex monta sur la souche.  Privé de la protection de l’humain, Civet fila dans sa caisse par petits bonds. Le laborantin avança la main vers le surnaturel qui était désormais à proximité, et ouvrit le bras pour lui offrir une étreinte qu’il espérait brève, si Alessandro l’acceptait, du moins. Ainsi, il comptait lui prouver sa sincérité en se plaçant dans une position vulnérable, mais également démontrer qu’il ne voyait pas en le lycan une bête sauvage ou un monstre.

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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyMar 18 Fév 2020 - 22:20

click Alessandro & Alex
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Je scrute Alex, surveille le tressaillement de ses paupières, la danse de ses sourcils, ses lèvres qu’il mordille dans l’hésitation. Je crains de le blesser, d’une part je ne le souhaite pas et d’autre part, malgré mes confidences, je crains de paraître incontrôlable à ses yeux. Le respect dans les yeux de ses « ennemis » a plus de valeur que dans celui d’un ami plus tolérant.

- Tu es beaucoup de choses, Amaro, mais je ne te laisserai pas dire que tu es un monstre, ou que t’en seras un. Ni maintenant, ni jamais. Ni toi, ni personne d’autre, ou alors tu me les envoie !

Les battements de mon cœur marquent ma surprise. Je suis heureux qu’Alex ne puisse pas les entendre. J’étais persuadé qu’il me considérait comme un être monstrueux. L’inverse me surprend et me touche.

- Si tu acceptes d’employer ce mot, tu acceptes de le devenir, éventuellement. Les mots ont un pouvoir qu’on néglige trop. Si tu veux anéantir cette éventualité, ne la laisses pas exister, et cherches des solutions qui te permettront d’arriver à tes fins.

Le druide appuie ses dires d’une pression sur mon épaule agrémentée d’un fin sourire. Jamais, je n’ai imaginé pourvoir parler ainsi avec lui. En le découvrant ici à mon arrivée à Beacon Hills, j’aurais pu l’ignorer. Or, j’avais tenté une approche, tenu le battant d’une porte qui n’avait pas trouvé de main pour s’en saisir et entrer. J’avais de ses nouvelles par Charlie. Je ne demandais rien à mon ancien camarade de gang, mais avec son flegme habituel, l’ours lâchait quelques infos entre deux salades. Des choses anodines : « Alex est enrhumé », « il va mieux », « son boulot le contrarie »… Je n’ai aucune idée si Crowley faisait la même chose à mon sujet. Mais j’appréciais de simplement savoir. C’est pourquoi ce retour de sollicitude me touche. Je me moque de savoir ce que les gens pensent de moi, à quelques exceptions près. Ne pas être un monstre à ses yeux m’aide à ne pas l’être aux miens.

Ma remarque quant à son geste imperceptible vers sa poche n’était pas pour le prendre en faute, mais simplement que j’acceptais cette mesure de sécurité légitime.

- J’ai confiance en toi : je ne crois pas que j’aurai besoin de m’en servir. Par contre, je préfère être prêt à nous enfermer, Civet et moi, en cas de nécessité. Tu n’as pas besoin d’être retenu et enfermé constamment.

S’enfermer lui et non moi… Tout un symbole, un geste de paix aussi.

- Vas-y
- Merci…

Je me laisse guider par sa voix. Le loup est en attente, un peu comme sur le départ d’une course. Cela me fait peur, il entend les battements affolés du cœur de Civet. La frayeur de la proie est la musique de la victoire. Je me sens à l’étroit, je retire ma veste pour la poser à côté de moi et replonge dans ce dialogue intérieur guidé par la voix paisible d’Alex.

- On fait équipe, là. Je suis ici pour t’aider. On n’est pas des ennemis, dans cette affaire. Je t’ai dit que je te fais confiance.

Je laisse le loup apparaître à nouveau, mon écoute a dévié du lapin qui est parti se cacher dans sa cage à ce que dégage le druide. Je ne sais pas quel éclat passe dans mon regard, cela lui fait lever les mains. Je me rembrunis, j’ai des progrès à faire, semble-t-il, pour paraître moins menaçant le loup mis en avant. Toutefois, l’animal apprécie ce qu’il entend du druide, son cœur qui bat un peu plus vite que la normale, mais rien d’affolé ni d’affolant. Sa voix qui reste calme, chaude et rassurante, loin des échanges acerbes qui sont les nôtres habituellement. Si lui me fait confiance… Je vois son bras qui esquisse un geste amical, il n’en faut pas plus pour le tactile que je suis.

Je me penche, passe mon bras sous le sien pour cerner son dos et l’attirer à moi. Sa chaleur, son odeur, et sa confiance libèrent en moi comme un nœud au fond de mon cœur. Je libère un peu plus l’emprise sur l’animal agrippé à Alex comme s’il était un phare dans un océan d’encre.

Rien. Pas de colère, pas de fureur ni d’envie de casser quelque chose… ou quelqu’un. Je ne me suis pas rendu compte que j’avais fermé les yeux ni que je serrais Alex d’aussi près. Je le libère de mon étreinte avec une grimace gênée. Impossible de sourire les crocs plein la bouche. Je serre son épaule en dernier contact avant de le lâcher.

Sans la rage qui me hante quand je suis ainsi, le loup libéré de toutes contraintes, je découvre un tas de sensations : des sens encore plus affûtés qu’à l’ordinaire et cette souche qui pulse d’une aura douce, mais insondable. Je regarde Alex sans filtre sur mon visage ou mon regard. Peut-être voit-il l’enfant que j’étais avant d’être mordu, avant de bosser pour la Famiglia, avant de perdre ce père que je croyais le mien.

- On va trouver Charlie ensemble. Reprends Civet, il faut que nous soyons tous les trois en contact. Enfin, je crois. J’en sais trop rien. Une intuition.

Pendant qu’Alex se redresse et va reprendre son lapin, je me saisis de la vieille photographie d’un temps que Charlie ne voulait pas oublier puisqu’il l’avait toujours en sa possession. Quand Alex me rejoint sur la souche, je lui propose de me tenir la main, de l’autre, il porte Civet et moi cette image du passé.

(…)

Nous sommes de retour à la cabane d’Alex, une carte de la région étalée sur la table basse. La magie du Nemeton, je ne sais pas comment appeler ce phénomène, nous a apporté des images, des flashs de ce que Charlie a pu voir. J’ai revécu sa chute de moto, la douleur qu’il a sentie sur la jambe qui s’est retrouvée coincée entre la route et son engin. Le black-out qui a suivi, le réveil brutal ensuite.

- Y avait un emballage de papier froissé au sol avec une inscription…

Je ferme les yeux, tente de revoir l’image, c’est Alex qui retrouve le nom de l’épicerie en premier. Il cherche l’adresse sur internet, je visualise l’indication qu’il me donne sur la carte.

- On va là-bas et on improvise. Une odeur peut-être. Leur planque ne doit pas être loin de cette boutique. Et pas à côté de ce supermarché, sinon ils y seraient allés.

Je montre le magasin, le supermarché et du doigt cercle une zone probable où peut être retenu notre amico commun.

- Prends un pot de miel, il semblait éprouvé…

Je tais les images et sensations perçues sur le Nemeton. Alex a eu sensiblement les mêmes. À la suite de ça, toutes inimitiés entre nous étaient rangées au fond d’un placard.

(…)

Alors que nous remontons en voiture, je me tourne vers lui.

- Alex ? Ça te dérange si je te prends comme ancre le temps que je trouve quelque chose de plus personnel ? Ça marche plutôt bien !

Je le lui prouve en me transformant sans crainte de déraper, alors que je suis pourtant inquiet pour Charlie. Ceux qui le retiennent ne sont pas des enfants de chœur. Or je devine qu’Alex va vouloir le sortir avec le moins de violence possible d’un milieu qui ne connaît que cela comme loi.  




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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyJeu 27 Fév 2020 - 19:25



Une association improbable


Feat. Alessandro Amaro






Ni les rouflaquettes sauvages qui encadraient le visage d’Alessandro, ni les quatre incisives en réalité augmentée qui dépassaient de son sourire, menace généralement suffisante pour qu’un humain lambda ressente sa vie en danger, ni ses yeux bleu surréel n’intimidaient le druide. Résolu, il observait son homonyne en sentant son sang pulser contre sa tempe plus rapidement qu’à son habitude. L’excitation, l’expectative de voir leur expérience bien se dérouler – une fois n’était pas coutume à Beacon Hills – et la joie coupable, en quelque sorte, d’avoir su dompter, ou plus humblement apprivoiser, le criminel se mêlaient dans ses artères. Artères qui redirigèrent rapidement tout le sang du corps de l’intellectuel dans ses lobes d’oreilles et ses joues alors qu’il se retrouvait coincé contre le torse du sicilien. Il ne s’était pas attendu à une telle réaction de sa part, il devait bien l’avouer, et se demandait combien de temps il pourrait tenir avant de n’avoir à supplier le lycanthrope pour un peu d’air. Cette proximité soudaine avec le Don Juan avait quelque chose de troublant. Non pas que de nouveaux sentiments se soient réveillés chez le laborantin, mais plutôt que jamais il n’aurait pu imaginer un univers dans lequel les deux hommes auraient pu se retrouver ainsi, pour former une accolade amicale. La surprise passée, Alex tapota le dos du métamorphe par automatisme, de manière presque robotique. Il fallut qu’il tente de bouger le menton, à la recherche d’un peu d’air qui ne sentait pas le parfum dispendieux ou la cigarette, pour que la pression du surnaturel ne s’amoindrisse et qu’il ne le lâche enfin. Tous deux gênés, ce qui ne permettait pas à Alex d’apprécier cette rare vision de l’oméga qui n’était pas en situation de parfait contrôle et parfaite confiance, ils se retrouvèrent un moment en face à face comme deux abrutis qui ne savaient quoi faire, outre s’échanger un sourire – du moins c’était ce qu’Alex devinait de celui qui lui faisait penser à la Bête d’un classique Disney – timide.

Alors que la pression sur son épaule se résorbait, Alex continuait d’observer le loup-garou, profitant de cet instant de calme où ils ne tentaient pas chacun de tirer la couverture de leur côté. Le scientifique ignorait si c’était la remise à zéro de leur relation, ou encore les traits métamorphosés du bellâtre, mais il semblait émaner quelque chose de bien moins calculateur, bien moins prédateur, même, oserait dire Alex, dans l’expression d’Alessandro.  Comme si l’inexpérience de sa partie lupine illuminait son visage d’une sorte de candeur innocente, ou d’une naïveté impressionnable qu’il ne lui connaissait pas et le rendait plus humain, d’une certaine façon.

Ils étaient prêts. Alex alla fouiller dans son sac à dos pour en sortir un t-shirt que Charlie lui avait si souvent emprunté qu’il l’avait porté plus souvent que le canado-américain, notamment lorsque, ici même, ils s’étaient juré un lien d’émissaire. Il l’enfila directement par-dessus sa chemise, trop prude pour se changer devant Alessandro, et trop orgueilleux pour risquer les railleries en allant derrière un arbre. Surtout, il n’avait pas vraiment de temps à perdre. Il sortit le thermos qu’il avait préparé, et en but la moitié avant de le tendre à Alessandro. L’infusion à l’intérieur était la même qu’il préparerait un jour pour Brian.

-Bois le reste. Ça devrait nous permettre de détacher nos esprits du monde physique et faciliter notre connexion avec le Nemeton.

Le druide avait tenté de retrouver quelque chose qui aurait pu lier Charlie à Jenny, lors de ses fouilles, mais il avait séché. Soit il n’y avait pas vraiment de memento chez le zoomorphe peu matérialiste, soit Alex ne l’avait pas trouvé, soit il ne l’avait simplement pas reconnu, ne pouvant pas réalistement connaître leur relation aussi bien que les siennes. Avec douceur, fermeté et habitude, Alex saisit Civet par-dessous et le tira à son torse. Ils avaient suffisamment l’habitude de se genre de contention pour savoir que le museau coincé au creux de son coude, les yeux cachés, Civet devrait rester calme et en confiance.

-J’espère que tu n’as pas trop d’attentes. Ce n’est pas Hollywood : pas d’incantations en latins, de gestes démesurés ou de stépettes* mystiques; pas d’effets spéciaux et de feux d’artifices ou je sais pas quoi. Vois plutôt ça comme un cours d’introduction à la méditation.

Un clin d’oeil chafouin envers l’impatient fumeur plus tard, Alex ajustait sa prise sur son lapin pour compenser le bras qu’il avait tendu vers le loup-garou. Il ferma les yeux, sachant que son rôle ici serait celui de contact et de guide auprès du nemeton. Alex parvint à trouver les lignes d’énergie tellurique sans trop de mal, et s’y accrocha solidement pour lancer sa question silencieuse. Les premières images n’étaient pas celles qu’il recherchait et avant d’être étourdi par un flot d’informations inutiles, il sentit une pression du lycanthrope, sans parvenir à déterminer si elle s’était faite dans son esprit ou sur sa main, qui lui permit d’affirmer plus clairement ce qu’il cherchait à connaître.

Le genou d’Alex avait fléchi, et Civet avait tressaillit, lorsqu’ils s’étaient retrouvé sous la moto de leur ami. La lumière tamisée de sa geôle, des voix confuses traversaient son crâne comme des voitures croisées sur une autoroute. Quelques images s’imprimaient légèrement plus longtemps dans le crâne des apprentis-mediums, et lorsqu’il rompit le contact, Alex tenta de s’y accrocher, comme on le fait avec un rêve pour éviter qu’il ne s’évapore dans les limbes. C’était peut-être pour cela que les lettres sur le bout de papier lui étaient revenues à la mémoire plus rapidement qu’à son allié.

Affairés entre l’ordinateur portable et la carte papier, ils tentaient de recouper l’information qu’ils avaient. Au moins, s’ils ne se trompaient pas, ils avaient la confirmation que l’ursidé était retenu prisonnier et en mauvaise posture. Alors que le druide se préparait à réfléchir et se préparer à mille milliards d’éventualités, Alessandro se montra plus volontaire et détermina qu’il valait mieux ne pas tergiverser et agir immédiatement. Il avait évidemment raison. Ils ne pouvaient prévoir toutes les éventualités, et encore moins s’y préparer.  Ce que le druide craignait, par contre, c’était de se retrouver face à des gens armés. Il ne pourrait rien contre eux.  Ça ne serait pas quelques coups d’arts martiaux qui changeraient beaucoup au final. Comment expliquer cela à l’italien.

Une trousse de premiers soins accompagné d’une bouteille d’alcool à friction, ainsi qu’un pot de miel d’hibiscus – cuvée spéciale qui n’était toujours pas entamée – et quelques feuilles prirent la place du thermos et du t-shirt dans le sac du druide, qui eut un peu de mal avec la fermeture éclair. Il n’avait pas osé demander à son partenaire d’aventure s’il avait une arme à feu sur lui, assumant que c’était toujours le cas, sauf peut-être sous la douche.

-Ce sont sûrement des chasseurs, s’ils sont parvenus à garder Charlie au plancher. Tu feras gaffe. Je resterai derrière pour pas être dans tes pattes, si ça te dérange pas.

Après, peut-être que les ours-nappeurs étaient ouverts à l’idée de parlementer. L’alternative diplomatique semblait être une excellente option pour le biochimiste, qui n’avait pas l’habitude de se débarrasser de corps et ne voyait pas comment les autorités ne remarqueraient pas la disparition des voyous ni n’en seraient inquiétées.

L’improbable duo s’installa dans la voiture et, alors qu’Alex bouclait sa ceinture, son invité lui posa une question aussi surprenante que le ton lui paraissait léger, comme s’ils étaient vraiment en train de devenir amis. Il se contenta de hausser les épaules pour lui répondre en souriant, le sourcil rieur.

-Je pensais que c’était implicite. Si je t’aide à trouver une solution définitive, ça inclut de te fournir les solutions temporaires. Et puis, je dois avouer que je préfère ta compagnie comme ça. C’est gagnant-gagnant! admit-il à l’intention de celui qui s’était sereinement transformé à ses côtés.

Alex s’était garé sur une rue transversale, à quelques dizaines de mètre de l’épicerie, selon les recommandations du chef des opérations. Il saisit un veste à capuche sur la banquette arrière et la passa à Alessandro. Elle serait certainement trop petite, mais il pourrait au moins dissimuler son visage s’il avait besoin de se transformer.

-Je te laisse chercher son odeur, je vais tenter de voir si je peux retrouver le véhicule qui l’a percuté… Ou d’autres indices.

Ce fut Alessandro qui désigna une mini-fourgonnette aux vitres opaques, dans une ruelle. Le druide ne manqua pas de faire remarquer d’un ton moqueur que c’était sa tâche, et non celle du lupin.  Ils s’en approchèrent avec prudence et Alex souligna les grafignes sur la portière droite, environ à la bonne hauteur pour correspondre à celles du panneau de signalisation. L’entrée de leur repaire ne devait pas être très loin et, comme pour corroborer son intuition, Alex remarqua un truc qui brillait au sol, à demi recouvert par un sac de plastique usagé.  Le druide se pencha pour ramasser la petite chaînette et sentit son estomac se retourner en reconnaissant la constellation que le cuisinier ne retirait jamais. Là encore, il gardait probablement même sa chaîne sous la douche. Le laborantin tendit le bijou à son allié et désigna la porte la plus près du regard, l’interrogation transcrite sur son faciès entier malgré sa blémeur. Était-ce là que ces criminels retenaient leur ami? Alex sentit l’angoisse monter en lui, ou peut-être était-ce de la panique. La différence était trop mince pour qu’il ne porte attention à un mot. Son rythme cardiaque c’était accéléré, une impression de creux lui grugeait les vicères et le sang semblait décidé à évacuer ses extrémités. À preuve, les mains glacées qui saisirent les avant-bras d’Alessandro.

-Tu peux me servir d’ancre? réclama-t-il à mi-voix.

*:

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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptySam 7 Mar 2020 - 11:00

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« Un'associazione improbabile. »C’est étrange de faire équipe avec Alex, depuis le début de la journée nous nous parlons comme d’anciens amici ou presque. Je souris au blouson qu’il me tend, mais ne fais pas de remarque sur le fait que la transformation me fait gagner quelques centimètres en carrure et que son vêtement va terminer déchiré au mieux, s’il ne me gêne tout bonnement pas dans mes mouvements.

- Je te laisse chercher son odeur, je vais tenter de voir si je peux retrouver le véhicule qui l’a percuté… Ou d’autres indices.

J’ai enfilé le blouson malgré ma réticence et cherche l’odeur de mon amico. Mon regard est attiré par une fourgonnette où plutôt par sa plaque d’immatriculation. Les deux trous supplémentaires me prouvent qu’elle a été ramassée sur un autre véhicule. Je hèle Alex. La carrosserie présente des éraflures qui correspondent au panneau de signalisation éborgné. J’entends son cœur s’emballer alors qu’il ramasse quelque chose au sol. Je reconnais le bijou, c’est la chaîne qui ne quitte jamais le cou de Charlie, preuve supplémentaire que nous sommes sur la bonne voie, preuve aussi que notre amico ne devait pas marcher tranquillement quand il est passé par là. Alex me surprend en me saisissant les avant-bras de ses mains glacées. Il est angoissé et craint que nous arrivions trop tard.

- Tu peux me servir d’ancre ?
- Évidemment. On va le retrouver. Entier.

J’évite de promettre, enlever Charlie n’est pas une mince affaire, un exploit que je ne mets pas sur un coup de chance. Sinon cela voudrait dire que la vigilance de mon cuisinier s’est érodée à ne plus fréquenter le milieu. Je pose une main sur l’épaule d’Alex et serre doucement. Un sourire rassurant et je me retourne vers la porte du bâtiment le plus proche. Deux niveaux poussiéreux avec plusieurs fenêtres condamnées par des planches. Quelques tags, beaucoup de déchets sur le trottoir attenant et une serrure qui brille de neuf. Une planque. Celle que nous cherchons, il n’y a pas de doutes. Un bref reflet vers le toit me met en alerte. J’entoure Alex de mes bras et commence une petite comédie à l’intention de celui qui nous surveille.

- Je t’avais dit que ce supplément chantilly n’était pas raisonnable mon amour ! Tu es tout pâle.

J’ai pris un timbre de voix un peu fausset à la frontière de l’exagération. J’embrasse Alex sur la tempe et fais des manières peu viriles voguant sur les préjugés homophobes. Les modèles sociétaux sont si ancrés que mon excès semble naturel. Endormir la méfiance, faire croire à des faiblesses de notre part, enfumer pour mieux leur mettre bien profond par la suite. Mais si jouer la comédie m’est naturel, ce n’est pas le cas d’Alex.

- Adosse-toi au mur, ça va passer. Prends mon mouchoir, mon cœur en sucre !

Au regard ahuri d’Alex, je lève les yeux vers le toit et plonge sur ses lèvres, mes doigts entre nos deux bouches pour éviter qu’il ne me repousse brutalement. Je lui chuchote que nous sommes surveillés et me décale pour qu’en haut on croie à un baiser prolongé.

- Je vais appeler un médecin ma brioche en sucre. Tu es blême.

Le malaise d’Alex n’est pas feint, je me retiens d’esquisser un sourire. Je sors mon téléphone, fais semblant de composer un numéro et simule tomber sur une mise en attente. Pendant ce temps, je m’inquiète du pseudo état d’Alex, l’exagération d’une fausse inquiétude en accent de fond. Mais pendant que je lui caresse les cheveux ou la joue, j’écoute. J’estime qu’ils ne sont pas plus de cinq.

Sous couvert d’embrasser à nouveau mon « amoureux », je me rapproche d’Alex alors que j’avais fait quelques pas simulant une discussion avec un médecin, mais jaugeant de la meilleure manière d’entrer dans le bâtiment.

- La serrure est neuve, mais le battant en bois ne résistera pas à un de mes coups de pied. Tu me suis en restant dans mon dos. Cela ne se fera pas sans violence. Tu en es conscient ?

Mes avant-bras reposent sur ses épaules, mon front est collé au sien, mais mon regard n’a rien d'amouraché. Je veux être certain qu’il ne sera pas un poids mort dans cette opération où frapper le premier et fort est une nécessité qui fait loi. Notre survie en dépend.


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Alex Cormier

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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyMar 17 Mar 2020 - 23:01



Une association improbable


Feat. Alessandro Amaro






Il y avait eu suffisamment de câlins, démonstrations affectueuses et autres contacts physiques pour la journée, aux yeux d’Alex.  Aussi, le druide ne se contenta-t-il d’un sourire faiblard pour exprimer sa grattitude à celui qui commençait peut-être à passer pour plus qu’un amalgame de défauts à ses yeux. Pour éviter de laisser des traces de son moment de faiblesse, le laborantin relâcha son emprise. Il préférait également ne pas ficher une engelure au loup. Même si il en guérirait naturellement, mieux valait ne pas lui donner de raison de se fâcher ou d’occasion de blâmer le canadien pour quoi que ce soit. La situation était déjà suffisamment tendue.

Ils retrouveraient Charlie, en bon état. Naturellement. L’ours-garou avait connu pire et en était toujours ressorti sans problèmes. Aujourd’hui ne pouvait être différent. La main sur l’épaule du manitobain sembla être suffisante pour ramener des couleurs à ses joues et rendre son sourire un peu plus crédible. Pendant que le mafieux inspectait les alentours, Alex en profita pour passer la petite chaînette autour de son cou, afin de conserver le pendentif en sécurité. Il n’avait pas sitôt refermé le fermoir sur sa nuque que le prédateur le câlina de nouveau.  Immédiatement, le corps du scientifique se tendit et il dut se retenir à grandes peines pour ne pas relever le genou dans les bijoux préférés de la puma. Alex avait à peine eu le réflexe de placer ses mains entre leurs estomac pour repousser son agresseur que celui-ci s’adressa à lui. Le druide ne savait pas ce qui était le plus déstabilisant entre les propos d’Alessandro ou le ton qu’il avait utilisé.

Sidéré, Alex assista au baiser contre son front en silence, comme s’il n’avait plus les moyens d’être un acteur dans cette scène. Alessandro était-il réellement en train de le flirter? Tout cela n’était-il qu’une mise en scène destiné à le tromper, et à tromper une fois de plus la professeur de yoga? Comment Charlie avait-il pu accepter d’avoir un quelconque rôle de complice dans toute cette histoire. Alex était furieux.  Il était hors de lui de s’être laissé avoir par le petit jeu de l’ancienne coqueluche de leur lycée. De savoir qu’elle fricotait toujours dans le dos d’Andy. De s’être inquiété de Charlie pour rien. Et malgré la colère qui le submergeait, il sentait qu’il avait perdu tout contrôle sur le moindre de ses muscles. Sa peur était plus forte encore que sa rage, et elle le tenait immobile. Que lui arriverait-il? Serait-il retrouvé dans trente-treize bennes à ordures différentes?

Alex paniquait, et devenait irrationnel. Une faible voix, celle de la conscience, probablement, le lui murmurait. Il devait tenter de s’y accrocher, et de se calmer. Difficile de se calmer quand un molosse avait fait une incursion indésirable et non consentante dans son espace privé, dans sa bulle d’intimité. Il devait mettre l’accent sur les éléments rationnels qui lui prouvaient qu’il avait tort. Déjà, pourquoi la voix d’Alessandro était-elle soudainement différente. Était-ce là sa véritable façon de parler, ou une imitation de ce qu’il imaginait être attirant pour le druide? Forçait-il constamment son accent de padrino? Cette révélation potentielle était à s’en scier les jambes. D’un autre côté, Alex ne comprenait pas pourquoi il se faisait parler de chantilly et de mouchoir, ni depuis quand Alessandro s’inquiétait de sa diète ou pire, lui donnait des surnoms affectueux à en attraper le diabète.

Enfin, ses sourcils réagirent alors qu’il fut poussé contre le mur. Premiers muscles à accepter l’autorité de son cerveau. Premiers répondants en temps de crise, comme la Gendarmerie Royale du Canada. Les sourcils se gonflèrent d’incompréhension, tentant de se montrer intimidant en retour, pour persuader le fauve de s’éloigner et de garder ses distances.  Pour toute réponse, le lycanthrope leva les yeux au ciel. Pas dans une mimique exaspérée qui lui était familière, en tant que destinataire usuel de celle-ci, mais plutôt littéralement, comme si il s’y trouvait quelque chose. Toutefois, avant même que le laborantin n’ait eu le temps d’amorcer un geste pour voir ce qui s’y tramait, son sang se glaça. Les mains du sicilien, de chaque côté de son crâne, lui restreignirent les mouvements alors qu’il s’avançait pour l’embrasser. Paniqué, Alex voulut appuyer contre le ventre du barman, fermant les yeux en un réflexe futile de retarder, ou oblitérer le contact humide sur le point de s’imposer à lui.

Un moment de flottement perça dans l’esprit du canadien alors que le seul contact était sur la commissure de ses lèvres. Pourtant, il sentait le souffle de l’italien, et sa présence tout près de son visage.  Comment diable était constitué ce loup-garou, ou comment embrassait-il? Lorsque finalement l’explication lui fut partagée, Alex grogna de soulagement et comprit qu’il devait également jouer le jeu. Toujours inconfortable dans cette position de rapprochement, il parvint tout de même à incliner légèrement le front vers celui de son ennemi passé et fit glisser ses mains tremblantes de l’abdomen au dos du mafieux, dans une posture qu’il s’imaginait plus affectueuse que défensive.

- Je vais appeler un médecin ma brioche en sucre. Tu es blême.
- C’est pas nécessaire, mon… chou.  Je suis juste un peu barbouillé. Tu t’inquiètes trop.

Alex tentait bien de jouer le jeu, mais au vu de son inaptitude, il préféra désormais se taire. L’italien était manifestement plus habileté à jouer la comédie. Certainement plus habitué et expérimenté, également. Les lèvres pincées, il laissa Alessandro lui passer la main sur le visage en alternant les déclarations de son personnage et les silences attentifs. Le druidon n’était plus si néophyte qu’il ne se doutait pas que son acolyte profitait de ce répit pour écouter. Il regarda le lupin faire des ronds à quelques mètres devant lui, son portable collé à son oreille et parlant seul. Alex jaugea que le mieux qu’il pouvait alors faire était de regarder vers le sol en se tenant le ventre, histoire de simuler un malaise gastro-intestinal tout en cachant son visage.  Lorsque le sicilien revint à lui, simulant un nouveau baiser, le laborantin ne s’empêcha pas de le fusiller du regard et de l’accuser d’y prendre un malin plaisir.

Les explications de l’expert en bagarres virent le rythme cardiaque du biochimiste s’accélérer rapidement. Il n’était pas dans ses habitudes, estimait-il, d’user de violence, mais il craignait surtout de n’être qu’un boulet et de tout faire déraper; que le sauvetage de Charlie ne tourne en un réel fiasco par sa faute. Un coup d’oeil au sol à leurs pieds, et il rendit son regard sérieux, presque téméraire, au mafieux.

-Je peux rester à la porte pour surveiller la sortie, aussi. Charlie sera content qu’on arrive, et j’ai aussi hâte que toi de le revoir, mais je veux pas être dans tes jambes* non plus. Je suis prêt à ton signal… À toi les honneurs.

Le druide attendit le signal de l’entrepreneur en béton pour se décaler légèrement et laisser la voie libre à Alessandro. Il entendit la porte céder alors qu’il se ruait sur une benne dont il lui semblait avoir vu dépasser une batte. Il la saisit et un instant plus tard, il se retrouvait également à l’intérieur, une arme digne de cluedo à la main.  Alessandro s’était déjà enfoncé à l’intérieur du bâtiment, ne voulant sans doute pas gâcher son effet de surprise.

Maintenant qu’il était à l’abri, le son des tirs en provenance des faîtes cessa et fut remplacé par des ordres beuglés. Alex profita de ce répit pour s’inspecter et s’assurer que l’absence de douleur indiquait effectivement qu’il s’en était miraculeusement tiré indemne.  Pour le moment. Sans perdre plus de temps, il alla se caler dans un recoin qui lui permettrait un bon angle pour frapper un coup de circuit si l’on tentait de rentrer à sa suite, sans que sa présence ne soit trop aisément trahie.

Pourquoi diable avait-il accepté de venir s’installer dans ce maudit trou perdu avec son père?

*:

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Alessandro Amaro

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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptySam 21 Mar 2020 - 20:58

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Comme prévu, le bois autour de la serrure cède facilement. Je m’élance sans tarder, une arme dans chaque main. Un mec dans la pièce du bas, il s’écroule avant d’avoir eu le temps de terminer de décoller ses natiche du canapé miteux où il était avachi. Je l’ai cogné avec mon arme en plein milieu du front. Ma force de frappe fait qu’il ne se relèvera jamais. Cela s’agite à l’étage, je file dans l’escalier, tire sur le premier que j’aperçois. Il chute et descend l’escalier en roulant. Si ma balle ne le tue pas, sa chute le fera. En haut, un concile à bulle s’organise, mais pressés par l’urgence et la surprise, ils s’organisent mal. Je déboule dans une vaste pièce. Un type est planqué derrière la porte, pas de chance pour lui j’entends son cœur battre. Je me sers du battant que je claque fort sur lui deux fois pour le faire tomber. Une balle vole près de mon oreille, je me suis baissé à temps.

C’est là que je tilte, cette pièce est en fait un laboratoire clandestin. Je ne comprends toujours pas l’intérêt d’enlever Charlie, il n’y connaît rien en synthèse chimique. Ils sont deux, trois si on compte celui à terre à qui j’écrase le poignet du pied pour lui faire lâcher son arme. Pendant que l’un des types vise la tête de Charlie, l’autre me tient en joue.

- T’es en retard pour le taf Crowley.

Un rapide regard me montre qu’il me semble être en un seul morceau. Il est solidement attaché avec des chaînes, ceux qui le retiennent ont donc une idée de sa force.

- Vous m'avez piqué mon cuisinier les mecs. Je suis furax, les clients sont furax.
- Donne-nous la formule !
- Cosa ?


Je sens la présence d’Alex dans mon dos. J’espère qu’il va y rester pour ne pas leur offrir une nouvelle cible.

- Donne-nous la formule !
- De quoi tu parles ?

Je vais les descendre, mais j’aimerais connaître la raison pour laquelle ils ont pris Charlie.

- La drogue que tu synthétises et qui marche sur les surnaturels ! Donne la formule ou l’ours y passe.
- Si je parle, tu vas nous descendre après.

Une idée de Sonny cette merda. Et quel autre endroit que Beacon Hills pour la tester… ma réticence n’avait pas suffi. J’ai la liberté que l’on veut bien m’accorder. Je répugnais à me mouiller sur le commerce des stupéfiants, c’est ce qui avait eu la peau de mon padre, celui qui avait eu la bonté d’élever le fils d’un autre et qui s’est fait refroidir sous les ordres de ce même mec. Je voyais dans ce retrait un hommage à celui qui m’a donné son nom. Même ça, on me le refuse. J’imagine que l’un d’eux est un surnaturel, ou un ami à eux qui leur auraient demandé de se poser en concurrent. Seulement, fabriquer une substance qui contourne les barrières d’un surnaturel n’est pas donné à tout le monde. La situation est dans une impasse et le danger que Charlie se prenne une balle en pleine tête bien réel.

- Vous vous rendez compte que vous avez kidnappé un cuisinier ! De toute façon Crowley est pire qu’une bourrique, il ne vous donnera aucune de ses recettes, dût-il avoir une arme collée sur la tempe et…

Deux coups partent, parler, noyer le poisson et être suffisamment rapide. J’ai visé d’abord celui qui menaçait mon amico puis celui qui me visait. Il a eu le mauvais réflexe de regarder son pote avant de me tirer dessus.

- La voie est libre. Ça va Charlie ?

Cinq cadavres et assez de produits pour faire flamber l’immeuble. Alex s’est précipité sur son colocataire. Je m’attends à ce qu’il me reproche les morts, sans parler de l’information qu’il vient d’avoir sur mon trafic de drogue. Je crois que mon ancre temporaire va vite se rétracter.

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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyVen 29 Mai 2020 - 22:18



Une association improbable


Feat. Alessandro Amaro






Alex avait attendu dans son alcôve, ce qui n’avait probablement pas été plus de deux minutes mais lui avait paru être des heures. Il se sentait ridicule, et stupide, avec sa batte. Ou peut-être stupide, et ridicule. L’importance relative des adjectifs n’était pas sa principale priorité pour le moment. C’était les coups de feux venant de l’intérieur qui lui firent réaliser la faiblesse de son plan. Et il se doutait bien que, s’il devait lui arriver quelque chose, Alessandro privilégierait son cuisinier au druide récalcitrant qu’il était.

L’attente, donc, c’était terminée sur un long silence, après qu’une porte n’ait claquée à l’étage. Soit les tireurs embusqués étaient rentrés, soit ils voulaient le faire croire. Une fois sa respiration calmée, le laborantin observa ses alentours et opta pour un plan de fuite.  Un moment plus tard, il avait bloqué l’entrée derrière lui de sorte à ce que quiconque voudrait passer cet obstacle ait à créer un sacré raffut.  Ou soit au minimum fort embourbé. Il sprinta ensuite dans la direction qu’avait empruntée Alessandro, priant toutes les divinités de ne pas se prendre une balle.  L’avantage d’être à la suite du loup-garou, c’était que le chemin était facile à retrouver. Il suffisait de la jouer à l’oreille.  Et, de manière un peu plus sidérante, de suivre les corps inanimés.  Le biochimiste se demandait si il ne devrait pas appeler les premiers secours, ou au moins vérifier si l’un des hommes était vivant.  Certes, dans les films, personne ne se souciait de le faire, mais c’était la vraie vie, bordel!

Les coups de feu avaient cessé, et il restait à déterminer s’il s’agissait d’une bonne ou d’une effroyable nouvelle. Du bas de l’escalier, des voix parvinrent à Alex, qui en déduisit qu’Alessandro négociait. Entre autre parce qu’il avait reconnu le timbre normal de sa voix, pas la parodie fluette des dernières minutes. Lentement, Alex se hissa dans l’escalier, en faisant bien attention de ne pas faire irruption dans la pièce. Les paroles se firent plus claires et le druide fut confus. Bearnapper Charlie contre une formule? Ce n’était pas comme si il était réputé pour ses connaissance mathématiques. Alex avait même dû l’aider à faire ses déclarations d’impôts des deux dernières années.

La vérité sidéra Alex, dont le pouls ralentit, comme s’il s’était épaissi en un sirop loin d’être aussi délicieux que celui de son pays natal, alors que ses sourcils s’agglutinaient en une boule de désapprobation. Les yeux prêts à jeter des maléfices à tout va, le canadien avala cette révélation particulièrement amère : on avait enlevé son colocataire parce que son employeur faisait de la contrebande de drogue surnaturelle!  Cette bourrique italienne se rendait-elle seulement compte de la cascade d’implications que l’invention d’une telle substance pouvait avoir? Les conséquences? Qu’arriverait-il si un loup-garou, trop défoncé, n’oubliait pas de rentrer ses griffes et ses yeux, mais trouvait amusant de se déplacer en pleine ville avec l'attirail complet du lycan, juste parce que son intoxication lui faisait voir des papillons géants ou des quenouilles maléfiques?

Alex ne put retenir un hurlement lorsque les deux coups de feu retentirent. La surprise, et le sursaut qui l’accompagnait, avait presque fait perdre l’équilibre au druide, qui se raccrocha à la main courante. Le temps de refermer ses yeux pour récupérer son sang-froid et Alex eut une indication de son ex-presque-nouvel-ami que la voie lui était libre. Aussitôt, il émergea de l’escalier et s’élança sur son ami pour le prendre dans ses bras. Finalement, il avait n’avait atteint son quota de câlineries qu’envers le mafieux. Le sicilien traduisit l’inquiétude du canadien en interrogeant Charlie sur son état, et l’ours se contenta de grogner un bon coup avant de leur reprocher d’avoir pris leur temps.

- On n’a pas tous tes capacités, rappela un Alex froissé, alors qu’il cherchait à déterminer comment défaire ses chaînes.

Il s’arrêta net lorsqu’il réalisa qu’il fallait une clé et qu’elle se trouvait probablement sur l’un des cadavres. Il était hors de question que le citoyen exemplaire qu’il était - parmi les gens ici réunis du moins - ne se salisse les mains de la sorte. Peut-être étaient-elles dans un tiroir d’un des meubles? Ça, le druide pouvait l’explorer sans ternir sa conscience.

- Je vais voir si la clé est dans l’un des tiroirs, avertit-il son ami avant de le laisser en plan. Avec un peu de chance, Amaro comprendrait ce qu’il attendait de lui.

Derrière le laborantin, Charlie bougonnait pour la forme, reprochant à son patron de ne pas lui avoir laissé de dents à casser. Malgré l’odieux de l’affirmation, cela eut le mérite de tirer un sourire à Alex. Son ami était donc visiblement en bon état. Suffisamment, à tout le moins, pour être lui-même.

Une fois libéré de ses chaînes, Charlie se massa les poignets pendant qu’Alex observait d’un oeil connaisseur le laboratoire clandestin. Il vérifia quelques flasques mal identifiées, déplaça quelques composés dangereux dans leur proximité actuelle et s’abstint de tout commentaire à l’égard de l’oméga. Alessandro devait très bien se douter de ce à quoi le druide pouvait penser. L’ours ne semblait pas trop s’en soucier, alors qu’il interrogeait ses deux amis.

”Vous êtes potes, maintenant?”

- Non ! trancha Alex, avant de réaliser l’impolitesse de sa rapidité de réponse et de se reprendre. Pas encore. On part de loin, mais on s’est entendus pour que je lui serve d’ancre, le temps qu’il en aura besoin.

Charlie, malgré l’absence de promesse ou même, soyons honnêtes, d’espoir, semblait enchanté. La relation entre les deux Al était un champ miné de différends qui n’étaient pas toujours glorieux ou matures. Si la plupart du temps, il n’y avait pas un réel fautif, les cas où il s’en trouvait effectivement un, le blâme alternait de l’un à l’autre. Et aujourd’hui semblait mettre en lumières les fautes du lupin davantage que de son allié du moment. C’était l’occasion parfaite de laisser sa chance au coureur et de voir si ses propos avaient été vides ou non.

- Tu comptes faire quoi, Aless’?

Alex avait même fait l’effort d’un petit surnom cool, amical et tout ce qui pouvait laisser suggérer qu’il ne le transformerait pas en carpette pour chalet de ski. Ou en capuche pour druide, mais ça c’était plus généralement les coyotes. Plus petits, moins lourds pour le cou, tout ça…

Amaro comptait brûler l’édifice, évidemment. Peut-être s’agissait-il de sarcasme, ou d’un humour douteux concernant les stéréotypes sur la mafia. Alex ne pouvait toutefois pas se permettre de ne pas le prendre au sérieux.

- Mais! T’as pensé à la pollu...

Le druide se tût de lui-même, conscient que ce ne serait pas avec ce genre d’argument qu’il pourrait même espérer faire sourciller Alessandro. De toute manière, Alex faisait surtout allusion au portrait général. Au-delà de ce jour. Il était clair que l’entrepreneur ne se retirerait pas du marché des substances illicites pour un si léger contre-temps.

- Je parlais de la drogue. J’espère vraiment que tu es aussi bon à ton job que tu le dis, et pas juste à jouer du flingue. Je suis certain que tu es conscient des risques qu’il y a à doper des créatures surnaturelles. Qu’elles risquent bien plus de s’afficher au grand jour, et qu’ensuite ce sera bonjour les persécutions et les chasses aux sorcières. Dis-moi juste que tu y as pensé et que tu as un plan de contingentement, ou peu importe comment il faut dire ça!

Le regard sévère, malgré sa supplication, le druide vrillait les yeux du mafieux. Il n’était même pas question de le sermonner. Simplement de s’assurer que les scénarios qu’il se dessinait n’étaient pas réalistes.

Charlie partagea son opinion : évidemment qu’Alessandro était le meilleur. Et les flics risquaient pas de se rameuter, vu les coups de feux? Si le premier commentaire laissa le manitobain perplexe, le second suffit à lui donner l’envie de déguerpir. Un instant plus tard, sans même avoir attendu la réponse d’Amaro, Alex prenait la poudre d’escampette sans se soucier guère plus longtemps de savoir si le bâtiment ou le quartier entier prendrait feu.

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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptySam 30 Mai 2020 - 22:10

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- Je vais voir si la clé est dans l’un des tiroirs.

Je lève les yeux au ciel, puis questionne Charlie du regard. Du museau, il m’indique celui qui est le plus à même d’être le chef de la bande et donc le dépositaire de sa délivrance. Charlie râle sur le temps qu’on a mis pour le retrouver.

- T’as beaucoup manqué au Pink ! Je t’assure que je me suis inquiété rapidement ! Mais si tu veux, pour la prochaine fois, je te colle une puce GPS sous la peau comme pour les chats de luxe !

Un poing montré sous mon nez me donne le fond de la pensée de l’ours. Je fouille les corps pour choper les portefeuilles, pour les cartes d’identité d’une part et l’argent : j’ai horreur du gaspillage. Cela finira dans le bocal à pourboire du Pink. De son côté, Alex fait le tour de ce laboratoire improvisé.

- Vous êtes potes, maintenant ?
- Non !

Je jette un regard au druide, sa promptitude est vexante, mais limpide sur ce qu’il pense toujours de moi. Je lui tourne le dos et continue d’éplucher les portefeuilles. Je serre les dents, furieux d’être affecté par ce rejet. Le cheminement qui nous avait conduits ici m’avait semblé nous rapprocher, mais ce n’était que l’illusion du moment : il avait besoin de moi.

- Pas encore. On part de loin, mais on s’est entendus pour que je lui serve d’ancre, le temps qu’il en aura besoin.

Je soupire, comment pense-t-il me servir d’ancre s’il me rejette à la première occasion ? Faut-il que je lui fasse un cours sur ce lien qui doit être basé sur la confiance ? Je rassemble les portefeuilles dans un sac de papier avec une alliance comportant une inscription et une gourmette nominative. Je préfère laisser le moins d’indices possible à la criminelle. Une fois les identités relevées, je donnerais mon butin à Ryan qui s’affairera à les détruire consciencieusement.

- Tu comptes faire quoi, Aless’ ?

Remonter la filière et les écrabouiller ? Pourquoi me pose-t-il une question dont il n’a pas envie d’entendre la réponse ? Je remarque que c’est la première fois qu’il utilise mon prénom. Mieux ! Un surnom, à la place d’Amaro. Est-ce la présence de Charlie qui atténue sa rudesse habituelle ? Ce gars est une vraie girouette. Un temps amical et aidant, le moment suivant presque agressif et distant. J’avais entrouvert une porte, admis une faiblesse de contrôle. Ça m’apprendra à baisser la garde ! Je réponds donc du tac au tac à l’objecteur de conscience.

- Je vais cramer l’immeuble. Je n’ai peut-être pas fait des études scientifiques comme toi, mais je connais la propriété des produits chimiques qu’il y a ici.
- Mais ! T’as pensé à la pollu...

Sul serio !? Je m’apprête à brûler des cadavres et ce qui lui importe c’est la pollution !

- Je parlais de la drogue. J’espère vraiment que tu es aussi bon à ton job que tu le dis, et pas juste à jouer du flingue.
- De quoi tu te mêles ?
- Je suis certain que tu es conscient des risques qu’il y a à doper des créatures surnaturelles. Qu’elles risquent bien plus de s’afficher au grand jour, et qu’ensuite ce sera bonjour les persécutions et les chasses aux sorcières. Dis-moi juste que tu y as pensé et que tu as un plan de contingentement, ou peu importe comment il faut dire ça !


Alex me fixe sans ciller. Son regard est si limpide que j’ai du mal à ne pas baisser les yeux. Bien évidemment, il n’y a rien de prévu de tout ça ! Est-ce qu’on s’inquiète qu’un toxico soit pris de folie et se saisisse d’une arme pour tirer dans la foule ? Non ! Et les grands messieurs qui m’ont plongé contre mon gré dans ce trafic raisonnent en narcotrafiquants de base : peu importe les actes de ceux qui consomment. Mais je dois bien avouer que les points soulevés par Alex posent problème. On m’a demandé de tester une formule sur les surnaturels, quelque chose qui pourrait les rendre accros sans entrevoir les perspectives d’une perte de contrôle. J’allais répondre non à Alex quand Charlie clame que je suis le meilleur dans mon domaine. Je n’ai pas le cœur de le contredire, surtout devant le Canadien qui ne passe pas une seconde sans juger le moindre de mes actes. Charlie évoque l’idée que les flics ont peut-être entendu les coups de feu échangé. Cela a le mérite de faire déguerpir Alex sans qu’il demande son reste. Je montre la sortie à Charlie.

- Va m’attendre avec lui et veille à ce qu’il ne se barre pas sans moi, on est venu avec sa voiture.

(…)

J’ai usé d’un système à retardement, l’incendie se déclenche alors que nous sommes déjà à plus d’un kilomètre de là. J’ai laissé la place avant au cuisinier pour qu’il puisse étendre ses jambes et prendre ses aises après sa captivité. Il ne présente même pas un contrecoup sur ce qui lui est arrivé. Ce qui lui importe le plus est de manger et voir Civet. L’ours n’est pas idiot ni stupide, c’est son tempérament qui le rend ainsi, détaché du stress. Sur le siège conducteur, c’est une tout autre histoire. Alex passe plus de temps à regarder si on ne nous suit pas à travers le rétroviseur que la route devant lui. Charlie énumère ce qu’il va se cuisiner, tandis que je regarde le paysage défiler plongé dans mes pensées. Ce qu’a dit Alex est une réalité que je ne peux pas ignorer, mais la came c’est comme les daubes fabriquées en Chine. L’important est de faire du chiffre, pas de la qualité. Mais ici, ce schéma pourrait se retourner contre moi.

- Alex ? Tu bois de l’alcool alors que tu sais que c’est mauvais pour ton corps. Pour le plaisir, parce que ton humeur en a besoin. Et ne me fais pas croire que tu n’as jamais tâté à l’ivresse. L’alcool à petite dose permet de se donner du courage, brise les réticences, favorise le lien social. À forte dose, il te permet d’oublier ta peine, noyer ton chagrin ou t’endormir dans un sommeil sans rêves. Un surnaturel n’a pas le droit à ça, même pas à une légère euphorie. On reste prisonnier de notre raison, de nos craintes ou de notre chagrin. On n’a aucune échappatoire. Tu n’imagines pas ce que donneraient certains, rien que pour une légère ivresse, te sentir léger. Cette drogue permettrait cela : anesthésier des sens qui sont déjà exacerbés.

Je vois déjà ses contre arguments : pas besoin de boire pour s’amuser, l’ivresse est dangereuse, etc. Mais alors que font ces bouteilles d’alcool chez lui ? Alex réplique, creuse sur le fait que l’on risque de dévoiler le monde surnaturel au grand jour avec des conséquences désastreuses. Je sais qu’il a raison, mais je n’ai pas le choix.

- Alors, aide-moi ! Tu as les connaissances nécessaires. Je suis bien placé pour le savoir : pas besoin d’une substance qui fasse planer comme un rail de coke, mais rien que la sensation d’ivresse,quelque chose de contrôlable. Le produit serait un succès et satisferait toutes les parties en jeu.

La formule actuelle fonctionne, mais elle empoissonne son consommateur. Un des élèves de Tobias en avait subi les conséquences. Je n’avais pas eu le courage de lui avouer que ce qu’il avait balancé aux toilettes chez lui était fabriqué sous ma direction. Il avait l’air d’y tenir à cet Isaac.




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Alex Cormier

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MessageSujet: Re: Un'associazione improbabile || Feat Alex   Un'associazione improbabile || Feat Alex EmptyJeu 18 Juin 2020 - 16:22



Une association improbable


Feat. Alessandro Amaro






Bien que les clés attendaient sagement dans le contact, Alex n’avait pas planifié les tourner sans que le bon moment soit venu. Celui où il ramènerait les deux surnaturels à sa charge à bon port. Ou celui où il devrait déguerpir pour sauver les fesses de quiconque se trouverait à bord.  En vérité, il n’était pas certain qu’il aurait la force morale de laisser un homme derrière et cherchait déjà des excuses pour indiquer aux éventuels policiers qu’il avait vu de jeunes gangsters fuir par la rue. Qu’il s’était recroquevillé dans la voiture en entendant les coups de feux et était trop sous le choc pour appeler la centrale d’urgence. Rien qui ne lui semblait crédible et, surtout, rien que Charlie viendrait corroborer de son propre gré : il avait plutôt tendance à chercher le conflit auprès du corps policier, pas à l’éviter.

Heureusement, l’arrivée relativement rapide – mais jamais assez au goût du druide qui parvint néanmoins à se taire – de Alessandro permit de taire ces scénarios dans l’esprit beaucoup trop imaginatif du canadien, et de quitter les lieux aussi rapidement que possible. Charlie avait eu l’intelligence de ne pas mentionner la requête de son patron concernant un départ inopportun d’Alex et empêcha ainsi une nouvelle querelle. L’ambiance dans la voiture restait tendue. Il n’y avait eu aucune explosion derrière eux lorsqu’ils avaient quitté la ruelle, ce qui d’une part était attristant quand on avait vu autant de films d’action que les colocataires, et rassurant à la fois puisqu’ils n’auraient pas le poulailler aux trousses.

La conduite d’abord brusque, elle redevint plus fluide et naturelle alors qu’ils s’éloignaient de l’endroit où Charlie avait été récupéré. Il fallut plusieurs minutes avant qu’Alex ne desserre son emprise sur le volant, s’apercevant qu’il ne sentait plus le bout de ses doigts, à partir de ses jointures livides. Dans le rétroviseur, la route défilait à l’envers, et la bourgade qu’ils venaient de quitter ne serait bientôt plus qu’une masse à l’horizon. Les véhicules allaient et venaient derrière la tercel, tantôt courtois, tantôt casse-cous. Alex se laissait dépasser par les plus rapides et observait la plupart prendre diverses sorties sur la route mais, surtout, il en profitait pour lancer des coups d’oeil furtif au passager arrière, à la recherche de ce qui pouvait bien passer à travers le crâne du lycanthrope. La liste de l’arctothrope, par-dessus la musique qui passait à la radio, avait sa manière de calmer Alex. Comme si le monologue de Charlie était d’autant plus rassurant que son ton était naturel et calme.

Le druide ne savait pas quoi faire de leur petite aventure. Était-il officiellement devenu un criminel, ou un paria, ou un simple imbécile qui s’était laissé embarquer dans une histoire à laquelle il n’aurait jamais dû se mêler?  La révélation de l’existence d’une drogue surnaturelle était troublante, et si Alex se croyait déjà choqué par celle-ci, ainsi que par l’enlèvement de son proche ami, il n’était pas prêt pour ce que Alessandro lui dit ensuite.

Le laborantin écouta ce que le sicilien lui disait, sans oser lui répondre. Devenu bourgogne de se voir ainsi sermonner, Alex se demanda si Charlie avait laissé entendre les mêmes chose à Alessandro qu’à Jenny. Plus longtemps Alex gardait le silence, plus il se sentait jugé, cerné, au pied du mur. Il avait juré à son ex qu’il n’avait aucun problème, qu’il ne buvait pas autant que son coloc l’avait dit, ni seul. Que Charlie avait simplement voulu le charrier, simplement. Mais elle avait insisté, lui avait laissé cette fichue carte, lui avait offert de l’accompagner à l’adresse écrite dessus, à la main. Qu’il y avait des rencontres hebdomadaires et qu’il n’y avait aucune honte à y avoir. Il avait insisté, dit que non, il n’y avait pas de problème. Jenny avait changé d’approche, mentionné que Charlie et elle commençaient à s’inquiéter, qu’elle avait voulu intervenir avant qu’il ne soit trop tard, au cas où. Elle avait forcément menti quand elle avait dit qu’elle le croyait. Ne venait-elle pas de dire, quelques instants auparavant, que l’alcool était la drogue la plus meurtrière au pays, puisqu’elle était culturellement acceptée et banalisée? Lorsqu’elle était partie, Alex n’avait rien trouvé de mieux à faire pour se calmer les nerfs que de se servir un verre de Jacks. Il l’avait sifflé et était à la moitié du second quand il s’arrêta et le vida dans l’évier de la cuisine, dégoûté. Il s’était senti minable, pathétique, et seul.

Ce sentiment revenait avec le discours que lui tenait Alessandro et cette fausse-morale sur les bienfaits de l’alcool. Sur ce sommeil prétendument serein, entrecoupé aux deux heures de réveils en sursauts, de sueurs froides, ou chaudes, de gorges desséchées, de mictions nécessaires au milieu de la nuit. Ce fameux courage qui tenait bien plus de la témérité, qui transformait la lecture des indices corporels avec un optimisme irréaliste. Ce sentiment de vide, si apparenté à de l’oubli, et qui le devient si suffisamment de verres et de chances s’accumulent dans la même soirée. Cette insouciance irresponsable, cette déresponsabilisation divine et toujours la bienvenue, qui ne rend le retour à la réalité que plus froid et dur encore, comme si l’on tombait en pleine face sur un plancher de glaces éternelles.

Le biochimiste ne tint pas longtemps, et après le troisième regard en biais à Charlie – assassin, celui-là, d’avoir ainsi été trahi – il ne put tenir le silence plus longtemps. Au diable montrer l’exemple! Au diable la maturité!

Alex ouvrit la bouche et, entre ses dents serrées, rappela les dangers de l’éthanol.  Comme un automate, il répéta les mots que Jenny lui avait dits. Mots qu’il aurait oubliés s’il avait eu la conscience aussi tranquille qu’il ne l’avait prétendu. Le plaisir ne provient pas de l’alcool, mais de l’occasion. Les gens saouls deviennent des gens cons. Alessandro n’est-il pas le mieux placé pour le savoir, passant ses soirées à servir et observer une faune assoiffée. L’italien contrecarra, demandant ce que faisaient les bouteilles dans la cabane. l’idée de transmettre le blâme à l’ours bavard parut tentante pour un moment, mais cela n’aurait que tout envenimer, et Alex prit plutôt la tangente et changea de sujet.
- Je suis conscient que je ne sais pas ce que c’est que d’être à votre place, mais au moins je le sais. Vous ne savez pas la chance que vous avez de pas avoir besoin de ça!

Il répéta ce qu’il avait déjà dit : que l’on parlait ici de surnaturels, et qu’il valait mieux pour eux-mêmes qu’ils restent discrets. Personne n’avait besoin d’une chasse aux sorcières. Cela n’eut pas l’effet escompté.

- Alors, aide-moi !

Alex était estomaqué. Les yeux gros comme des boutons, la bouche entrouverte, il resta presque deux secondes entières à observer Alessandro dans le rétroviseur, à l’écouter poursuivre dans son idée. C’est en ramenant la voiture dans sa voie d’un coup de roue que Charlie ramena Alex sur terre. Ce traître de mafieux! Ce manipulateur hors-pair! Il avait mené Alex dans sa barque sans rencontrer la moindre résistance, et lui proposait désormais ce que le laborantin considérait avec horreur comme un poste dans son organisation.  Le pire, c’était le choix cornélien en face duquel il laissait le druide.  Il bluffait les lignes de la morale et de la légalité en déposant tout le poids de cette décision, tout l’impact des ramifications de cette décision, sur les épaules d’Alex. C’était un coup bas, ou une tentative de rapprochement? Ils devaient déjà s’entraîner ensemble, et vu d’où Alessandro partait, cela leur laissait déjà amplement le temps de faire connaissance.

Sans persifler la moindre insulte, le moindre commentaire cynique, la moindre petite attaque, nada, Alex laissa passer quelques minutes. Charlie restait silencieux et penaud du côté du copilote, soulagé lorsque le conducteur répondit enfin à l’offre surréelle du copain d’Andy.

- Je ne sais même pas comment répondre à ça! Si je dis oui, j’encourage l’abject de ce commerce, si je dis non je suis horrible de pas prendre mes responsabilités de druides et encore plus de risquer des vies probablement pas si innocentes. Si je dis peut-être ou n’importe quoi entre, tu vas y voir un oui en sursis et te dire que j’attends juste d’être convaincu. C’est plus compliqué que ça : je sais pas si j’ai une tête de branleur, ou si tu penses que je passe mes journées à chasser des papillons à dos de licorne, mais j’ai déjà deux boulots, en plus de devoir surveiller cette fucking forêt parce que mon enfoiré de père a décidé que ce serait plus drôle de crisser son camp et me laisser ça aussi sur les bras. Donc je sais pas. Je sais pas si j’en ai envie; je sais pas si je devrais; je sais même pas si je pourrais le faire! Et pis t’as idée du temps que ça prend à développer, des drogues et des médicaments, dans une industrie qui engage des milliers de gens à temps plein rien que pour ça?

Non, définitivement, jamais il n’y arriverait. Et ce dilemme risquait de l’empêcher de dormir pour des nuits entière. Pour le moment, ils étaient arrivés au Pink.  Alex se gara devant le bar et passa sa main derrière l’appui-tête de Charlie pour regarder Alessandro en pleine face. Ils établirent la date de leur première rencontre d’entraînement pendant que l’ours sortait sur le trottoir pour saluer son ami convenablement.

- Et merci de t’être inquiété pour Charlie. On a l’habitude de parfois ne pas se croiser pendant des jours, je sais pas combien de temps j’aurais mis à... Il n’y avait pas de mot pour désigner à quel point Alex était un mauvais colocataire. Au fait, conseil d’ami : ne perd pas trop d’énergie à essayer de me convaincre ou à me pousser dans une direction : je suis contraireux et ça risque juste de se révéler contre-productif...

Un sourire aux lèvres, Alex s’étira pour prendre la main qu’Alessandro lui offrait.  Quelques dizaines de minutes plus tard, il était de retour à la cabane et tentait de déterminer le meilleur cours des choses possible pour réparer, ou remplacer, cette porte d’entrée.

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