Le chat chapardeur [FT Derek]

La puma se glisse hors de sa couche, achève de se préparer lorsque le silence ambiant lui confirme qu'elle est la seule à être éveillée à cette heure avancée de la nuit. Elle noue ses cheveux blonds en un chignon dénué d'élégance, passe un simple jupon sur ses bas sombres. Dans le noir le plus complet, seulement éclairée par les rayons de lune dont elle a la vision à travers les vitres à la propreté douteuse de sa fenêtre, elle referme son corsage. Une longue veste de cuir brun dérobée à un ancien amant qui s'était révélé être mauvais payeur vient mettre un point final à cette parure dont on ne sait si elle est celle d'un vagabond ou d'une fille de joie. La fenêtre grince quand elle l'ouvre. Andy se fige, l'oreille tendue pour savoir si ses imprudences n'ont pas réveillé une de ses voisines ou encore son patron. Son souffle se meurt, elle attend alors une poignée de secondes sans même battre des cils. Ainsi figée sa silhouette devient pareille à une ombre spectrale. Un sourire mutin égaille ses traits lorsqu'elle saisit que nul ne viendra déranger ses plans d'évasion.

La prostituée se hisse avec souplesse dans l'encadrement de bois après avoir prit grand soin de relever ses atours pour éviter qu'ils ne transforment un saut agile en chute dangereuse. La porte de sa chambre s'ouvre la faisant alors sursauter.

-Andy qu'est c'que tu fais comme boucan en pleine nuit ?
-Je sors.

Le fait qu'elle se plaise à énoncer cette évidence sans chercher à la justifier ne convient pas au loup qui se dirige vers elle. La jeune femme saute alors sans crier gare, atterrissant sur ses pieds comme tout bon chat qui se respecte. Son rire éclate dans les airs, achevant de réveiller les autres filles qui vivent dans ce bordel, Alessandro fulmine dans le vent tandis que la jolie blonde lui annonce qu'elle sera de retour dans trois jours. Pas un de moins, peut être un de plus si elle fait une mauvaise rencontre. Il y a des affaires qu'une femme doit parfois mener à bien et ce sans avoir un homme sur le dos. La jeune femme caresse sa poitrine, s'assurant ainsi de la présence de cet argent gagné légalement même si la manière dont elle l'a acquit ferait grincer les dents de ceux qui vantent les vertus du droit chemin. Dans quelques jours cette dette sera réglée et son créancier ne pourra plus menacer sa liberté.

[...]

La belle blonde fuit, un peu de guingois après avoir réveillé les chiens d'un des fermiers du coin tandis qu'elle se faisait aussi discrète que possible. Un à un ses plans sont déjoués. Les bêtes du croquemort sont trop épuisées pour que l'envie d'en emprunter une soit une riche idée. Il n'aurait été guère plus malin de fouiller aux alentours du logis de l'adjoint. Cet homme n'est pas seulement sot, il juge également juste d'être saoul la plupart du temps. Hormis Maggie qui se plaît près de ce personnage vulgaire, Turner n'a que peu d'amis à Beacon Hills. Jean n'est pas en ville et ce dernier ne vient plus voir Andy depuis que le souvenir de sa femme s'est rappelé à lui. Le notaire est retourné auprès de celle qui tient les rênes de sa misère sexuelle sans un dernier au revoir pour celle qu'il nommait sa favorite. Les clients qu'ils soient ou non fortunés ont tendance à oublier que la douce pute qu'ils cajolent dans une chambre chauffée est elle aussi capable de se prendre au jeu des sentiments.

Andy n'est certes pas tombée amoureuse du français mais elle doit avouer que le confort que lui offraient les petits bonus tirés du portefeuille du notaire lui manque. Dans quelques semaines elle aura tout oublié de Jean qui s'est révélé être aussi décevant que les autres hommes qui visitent le bordel pour tromper leur ennui et leur femme quand ils en ont une.

Le soleil se lève, suivi par ceux qui travaillent et ont domicile au ranch des Hale. La belle blonde se déchausse, fronce le nez quand des fragrances dérangeantes liées à une nature contraire à la sienne se font sentir. Si elle a su s'habituer à Alessandro, elle ne tolère que très peu les autres loups qui habitent les environs. Avec la rosée du matin leur odeur se transforme en celle de chiens mouillés. Pieds nus et après avoir abandonné ses souliers près d'une barrière, la jeune femme se faufile entre deux bâtiments. Se fait toute petite avant de finalement faire son apparition dans une écurie. Elle se fige lorsque non loin d'elle on appelle. Tend la main vers l'animal qui lui fait face, une jument qui semble suffisamment docile pour ne pas la fuir. Souriante la puma se saisit d'une poignée de foin, désolée de ne pas avoir su dégoter nourriture plus attrayante.

-Je sais qu't'aurais préféré une carotte. On aurait toutes deux préféré une chouette car..

La blonde sursaute et met fin à son murmure quand près d'elle, bien trop pour que cela soit raisonnable, des bruits de pas se font entendre.

C'était une fausse alerte, mais la peur de se faire prendre pousse la puma à agir plus vite encore. Si la douceur n'aide pas la jument à venir à elle, Andy va devoir user de force pour que l'animal se plie à ses désirs. La jolie blonde s'approche de ce qui va devenir sa monture durant les prochains jours, affiche un sourire de fausset tout en craignant que l'animal ne lui porte un mauvais coup. Certes elle guérirait plus vite que ne le font les humains mais en cet instant la jeune femme ne peut se permettre de perdre une miette de son précieux temps en sottises. La jument finalement peu farouche se laisse caresser, accepte la selle que la puma a dérobé précédemment. Andy finit bien vite juchée sur le dos de l'animal. Les deux demoiselles ne cachent rien de leur peur quand la porte de l'écurie s'ouvre avec fracas.

Sans réfléchir plus longtemps, la puma encourage l'animal à prendre la fuite tandis que le propriétaire de la jument s'exclame et lance l'alerte. Andy juge cette voleuse douée de nombreux talents si cette dernière est parvenue à emprunter un cheval sans que personne ne vienne la déranger.

La féline presse l'animal, resserrant ses jambes autour de la jument lorsque cette dernière s'effraie à la vue d'une simple barrière. Sans qu'aucun incident ne puisse se produire, la jument saute et atterrit élégamment sur le plancher des vaches. Dans leur dos on s'agite, on s'énerve mais on ne prend pas encore le goût de leur courir après. Andy sourit, fière de son méfait qui s'avère plus aisé qu'elle ne l'aurait cru au premier abord. Ici on ne fait pas de cadeau aux voleurs, qu'ils jettent leur dévolu sur une poule, un cheval ou encore ce que contiennent les coffres forts de la banque. Andy ne souhaite pas voir la corde ceindre son cou délicat, préférant les bijoux élégants que de charmants hommes pourraient y passer.

La jument ne se perd pas en distraction, fonce droit devant obéissant ainsi à celle qui s'en est fait la propriétaire pour les jours à venir. Dans leur dos on s'agite, Derek Hale venant de se réveiller après le choc causé par la vue d'une inconnue qui n'en est pas une juchée sur le dos d'une de ses bêtes. Andy s'esclaffe, amusée par cette farce qu'elle souhaite bon enfant qu'elle est en train de jouer au loup qu'elle croise régulièrement au saloon. Si Alessandro la voyait dans une pareille posture, nul doute qu'il crierait après sa protégée en exprimant une colère qui ne trouverait vie que dans le vide. La puma même si elle sait mimer la soumission lorsque l'instant le demande, n'écoute généralement les dires des hommes que lorsque ces derniers lui conviennent. Elle agit ainsi, imposant des règles qui sont siennes en usant de douceur pour que cette peine convienne à ses proies qui bien souvent ressemblent à des petites souris dans son esprit mutin.


Riche de cette avance certaine qu'elle a su prendre sur le propriétaire du ranch en le surprenant de cette manière, Andy ne réduit pas la cadence pour autant. Elle n'est pas aussi agile que ne l'est le loup qui a dû partir à sa poursuite, risque donc de se voir bien vite rattrapée. Mais c'est sans compter sur la jument qui s'épuise, visiblement mécontente de partir en balade sans qu'on ait jugé bon de lui demander son avis. L'animal renâcle, les yeux de la puma s'illuminent d'un vert inhabituel. En tout cas ces nuances le sont aux yeux des humains. La féline feule sur sa monture indisciplinée. Dans son dos des sabots cognent contre le sol, une mélodie inquiétante qui ne fait que gagner en puissance tandis que le loup s'approche d'elles.

Andy caresse sa veste de cuir du bout des doigts. Puis sort une arme, petite, mais pas moins létale d'une de ses poches.

Si le loup devient inquiétant, la puma n'hésitera pas à régler ce problème avant qu'il ne puisse lui causer du soucis.

Sandro devra alors attendre bien plus que trois jours pour revoir sa protégée.

Le loup paraît doué de bon sens et Andy est certaine que Hale a aperçu son arme lorsque ce dernier cesse de vouloir la rattraper. Il se contente de la suivre, callant le rythme de sa chevauchée sur celle de la féline. La belle blonde pourrait sourire mais elle se sait dans de beaux draps, ses actes, ce vol dont elle se montre coupable ne restera pas sans conséquences. Cette accalmie ne durera pas éternellement. Toute cette histoire aurait pu connaître une fin heureuse si Derek ne l'avait pas prise sur le fait alors qu'elle était en train de commettre son méfait. Loin d'être apaisée par ce sursit que lui offre le loup, la puma souffle, ses sourcils se froncent tandis qu'elle regarde droit devant elle tout en espérant qu'un heureux miracle vienne la sortir de cette mauvaise passe. Curtis a intérêt à être au rendez-vous car Andy ne veut pas risquer de perdre la vie pour du vent. Des mois que l'homme la harcèle avec de longs courriers couverts d'une écriture désordonnée pour quémander un paiement en échange de ce service qu'il lui a rendu il y a des années. Ces missives dérangeantes Andy a prit l'habitude de les brûler pour que personne ne mette la main dessus.

Sandro a apprit à lire récemment, une des filles de l'étage parvient elle aussi à déchiffrer des mots simples. La tranquillité de celle qui se protège d'un lourd passé ne tient qu'à un fil. Entièrement offerte au long cheminement de sa réflexion, la puma serre les dents quand à l'horizon apparaît la silhouette des premières bâtisses de Calico. Une ville dans laquelle on a prit une vilaine habitude : Celle de juger après avoir pendu. Craignant pour sa vie Andy se mord les lèvres, se dissimule derrière ses longs cheveux blonds qui se sont défaits de son chignon de fortune lorsque Derek l'alpague. Arrivé à sa hauteur le loup note l'urgence de la situation.

Andy ne sait quoi lui répondre. Une audacieuse provocation lui brûle la langue, une foule de reproches suivraient et elle doute que sa rancœur ne sache rendre l'éleveur plus coopératif. Andy se contente de montrer son arme à son assaillant, garnie d'une unique balle qu'elle s'était pourtant promit de réserver à Curtis si ce dernier se montrait peu aimable. La furie blonde gronde sourdement, souffle avant de crier sur le loup.

-Tu n'aurais rien perdu si tu étais resté chez toi !

Enfin rien de plus qu'une jument qui aurait retrouvé le confort de son écurie quelques jours après cette escapade improvisée. Mais ça Derek l'ignore et il ne se gène pas pour le faire savoir à la fille de joie devenue femme en colère. Saisissant que cette situation ne la mènera à rien de bon, craignant de goûter la potence, la jeune femme met fin à ce jeu qui n'amuse plus personne. Sans crier gare elle intime la jument empruntée à se mettre à l'arrêt. Son regard devenu noir se stoppe sur le loup qui l'a imité.

-Je te la ramène dans trois jours. Croire en cette parole donnée par une prostituée serait une des choses les plus futées que tu feras de ta vie.

Si ses propos tendent vers la provocation la plus pure, son cœur confirme ses dires tant la cadence avec laquelle ce dernier bat entre ses côtes trahit la justesse de cette annonce. Elle ne souhaitait pas causer de tords à celui qui ne s'est jamais montré méchant ou encore hautain envers elle lorsqu'ils se croisent au saloon. Sous-estimer une femme qui vend son corps et ses attraits naturels pour survivre ne dérange pourtant pas certains des hommes qui vivent à Beacon Hills. La prostituée peu honteuse de son sort ne s'en plaint pas car elle sait que cette vie qu'elle mène aurait pu être bien plus rude si elle avait laissé une destinée dictée par ses ainés agir à sa place. Comme de nombreuses femmes, elle a eu un fiancé qui avait pour principal défaut de ne pas être tendre. Un puma auquel ses parents ont voulu la marier de force. Fatalement la future épouse s'est couverte d'écarlate pour fuir une vie qui jamais n'aurait su la rendre heureuse.

-J'ai une dette à rembourser. Un ami a décidé que les services rendus par le passé pouvaient valoir leur pesant d'or. Je dois le rejoindre. Si tu veux garder un œil sur ta jument suis-moi.  

Visiblement Derek ne veut pas se plier à cet arrangement que lui propose la puma. C'est fâcheux car la féline ne tolère que très peu ces hommes qui semblent trouver juste de lui dicter une conduite qui ne convient qu'à eux. Certes cette jument ne lui appartient pas et il est également vrai qu'elle n'a pas jugé utile de quémander une quelconque autorisation avant de l'emprunter à son propriétaire, mais ces problèmes ne sont pas ceux de la prostituée en cet instant. Elle aussi elle aurait trouvé plaisant de pouvoir rester à Beacon Hills, de ne pas avoir à quitter le saloon en pleine nuit en faisant preuve d'une discrétion toute relative. Alessandro va lui faire part de son désaccord lorsqu'elle reviendra, Andy n'a nul besoin d'avoir un autre loup sur le dos.

C'est donc sans un mot qu'elle intime à la jument de reprendre la route. Sans jeter le moindre regard au loup, elle contourne ce dernier et sa monture sans se soucier de son avis. L'impertinente prostituée opte pour le trot. Elle ne sèmera pas Hale une fois de plus. À défaut de se montrer conciliante elle se plie toutefois aux règles de la courtoisie en usant de raison. Bien vite les voilà arrivés à Calico, une ville plus grande que ne l'est Beacon Hills. Mais cela ne rend pas pour autant ses habitants plus civilisés. Sans s'attarder sur les regards que portent sur sa personne certains passants médisants, la blonde cherche à retrouver cet endroit où elle a déjà trouvé refuge il y quelques années. Elle est comme perdue tant ce lieu a changé en si peu de temps et elle n'ose demander son chemin. Elle a rendez-vous dans un saloon mal famé dans lequel les femmes, même celles qui sont de joie, ne pointent pas le bout de leur charmant nez sans craindre le pire.

Lorsque Hale lui demande ce qu'elle cherche la puma soupire puis souffle, son maigre orgueil soudainement écorché. Andy lève finalement les yeux au ciel, priant pour qu'on la débarrasse au plus vite de ce poids qui vient bousculer ses plans avant de grommeler une réponse.

-Chez Singer.

Un saloon miteux où l'on ne vient que pour s'enivrer, se battre et parfois chercher une mort prématurée. Les gaillards qui finissent à la potence y ont bien souvent été pour prendre leur dernier verre avant que la justice ne leur soit tombée dessus. La féline hoche la tête, satisfaite qu'une entente entre elle et le loup ait su être trouvée si facilement. Hale n'est pas le pire exemplaire de mâle qu'on puisse trouver à Beacon Hills, loin de là. Il semble être capable de faire preuve de compréhension si ce n'est d'intelligence. Sans avoir l'audace de vouloir être vue comme l'égale d'un homme, la fille de joie apprécie tout de même le respect, même sous ses formes les plus simplistes.

Derek la mène à bon port, commentant les actes de la puma surtout lorsqu'elle s'apprête à attacher la jument en prenant soin de le faire de la meilleure des manières pour que personne ne vienne dérober l'animal.

-C’est là, attache bien MON cheval !
-Tu t'répètes chéri.

Elle entre seule dans ce saloon qui n'en mérite pas le nom, se dirige vers une table isolée sans s'attarder sur les commentaires graveleux dont on la gratifie. Affichant une expression des plus blasées elle se contente d'attendre Curtis qui ne devrait pas tarder à pointer le bout de son nez crochu.

La jeune femme a perdu pied et n'est plus douée de raison. Elle tente toutefois de redonner à sa situation un semblant de normalité tandis qu'elle s'essaie à renouer ses cheveux défaits en un simulacre de chignon. Ses longs cheveux blonds mouillés de larmes collent à son front rendu poisseux par la sueur et la détresse, de lourds sanglots agitent toujours son être frêle. Dans l'obscurité elle tressaute, se refusant à regarder la porte de cette remise dans laquelle on l'a rangée pour mieux pouvoir revenir jouer avec elle. Jamais elle ne sortira de cet endroit, en tout cas pas tant qu'elle n'aura pas été capable de retrouver un peu de bon sens. Mais en cet instant son corps est trop prostré dans l'horreur qu'on lui a fait subir, son esprit salit par ces outrages dont elle a été la cible. Il serait aisé pour elle de forcer cette porte, mais l'être brisé qu'elle est ne se sent pas capable de produire un pareil exploit.

La puma sursaute et ses sanglots redoublent d'intensité lorsqu'un coup est donné contre la porte de sa nouvelle prison. Elle se tait, sa respiration se figeant lorsque le nouvel arrivant l'interpelle. Son esprit lui joue des tours car Hale doit depuis longtemps avoir repris la route qui le mène à son ranch. La porte s'ouvre et la lumière vient étourdir la jeune femme prostrée à même le sol. Les sanglots qui jamais ne s'étaient réellement taris reprennent leur incessante ritournelle. Andy serre les cuisses pour camoufler tout du massacre sanglant qui a eu lieu plus tôt, soupire lorsqu'une fine couverture lui est tendue pour mieux dissimuler sa vertu malmenée. Certes la prostitution n'est pas un milieu dans lequel la douceur règne mais jamais Alessandro ne laisserait une des filles dont il assure la protection souffrir d'une pareille brutalité.

La puma se cache derrière ses longs cheveux qui dissimulent tant sa terreur que son trouble. Jamais elle n'aurait songé que Derek soit encore dans cette ville où les hommes sont fous, mais il est pourtant revenu pour l'aider. Elle ouvre la bouche, mais ne sait prononcer les mots qui suffiraient à traduire cette gratitude que lui inspirent les actions de l'éleveur. Incapable de réagir, elle entend plus qu'elle n'écoute les dires de celui qui déjà s'en va.

La porte se ferme. Andy s'écroule, de lourdes larmes roulant sur ses joues déjà bigarrées par sa détresse. Elle ne sait combien de temps s'écoule avant que le loup de refasse son apparition, elle fixe cette arme qu'il lui a laissé, songeant au pire et parfois même au meilleur. Il lui semble que Derek a promis son frais retour dans cet endroit qui pue le foutre, le sang et la peur. La puma sent qu'au fond d'elle une part de son être souhaite une révolte mais elle n'a ni la force ni le courage de laisser à l'animal le contrôle de ses actes. Elle se saisit de l'arme, la serrant contre elle comme certaines femmes cajolent leur premier né avant de bien vite se lasser de la reproduction et de ses conséquences.

À plusieurs reprises la blonde a vu les flots de sang mensuels disparaître et à chaque fois elle a su se débarrasser de ce qui se nichait au sein de ses entrailles avant que cela ne puisse devenir un problème. Parfois seule en usant de longues aiguilles dédiées habituellement au tricot, parfois avec l'aide d'un barbier. Une catin avec un bébé dans les bras cela fait mauvais genre. Happée par de moroses songes, la jeune femme sursaute une fois de plus quand Derek revient. Elle souffle, grogne plus qu'elle ne donne réponse à l'homme avant de finalement se hisser sur ses jambes tremblantes pour parvenir à ouvrir la porte à celui qui semble ne lui vouloir que du bien. Tassée sur elle même, la féline tend un de ses maigres bras pour se saisir du cache-poussière. Sa fierté s'est fait la malle, son insolence a prit le même chemin. Ne reste que le trouble et une reconnaissance mêlée à la crainte.

Andy mire le sol, honteuse. Ses pieds à présent nus sont l'unique spectacle dont elle supporte encore la vue. Elle ne connaît pas la sœur de Derek mais elle doute que cette dernière accepte de faire entrer une catin dans ses fréquentations. La féline n'est pas loquace et peine à se montrer amicale avec les personnes qui sont du même sexe qu'elle. La blonde renifle avant de lever un regard abasourdi par l'horreur sur son sauveur.

Sa bouche s'ouvre, le silence est alors brisé par un fluet brin de voix.

-En croupe... S'il te plaît...

Elle se hisse avec peine sur le cheval de Derek sans jamais oser un regard sur les deux corps qui encombrent le dos de la jument. La féline entoure d'un de ses bras la taille de celui qui est venu lui porter secours alors qu'elle avait dérobé une de ses juments plus tôt dans la journée. La blonde ferme les yeux, mouillant de larmes le dos de celui qui pourrait devenir un ami si elle parvenait à s'ouvrir au monde. À force d'être trop souvent déçue, blessée par les représentants de la gente masculine la jolie blonde s'est fermée à ces derniers. Elle ne tolère réellement qu'Alessandro avec qui elle est devenue amie, échange parfois quelques mots avec Barney, Derek, monsieur Rapier ou encore le barbier de leur ville. Si dans sa petite chambre elle est celle qui tient les rênes des échanges qu'elle a avec ses clients, le reste du monde l'effraie plus qu'il ne lui donne envie de le découvrir.

Généralement femme forte la puma n'est plus que poupée brisée. Sa voix s'égare, elle murmure.

-Merci. D'être venu.

Elle pourrait s'excuser, après tout ce qui lui est arrivé est en partie de sa faute. Victime mais également rendue coupable par sa propre audace, la jeune femme ne sait où se placer dans toute cette histoire. Elle n'ose imaginer son retour à Beacon Hills, craignant la colère d'Alessandro lorsque ce dernier aura eu vent des mésaventures qu'elle a subit. Une prostituée terrifiée par les hommes ne sert à rien, pas même à faire joli.

Ils arrivent devant le bureau du shérif et soudainement la féline a peur que Derek ne lui demande de le suivre pour expliquer ce qui lui est arrivé.    

  Derek n'a guère été longtemps avec le shérif, mais ce moment a cependant paru bien long à la puma. Elle se tend lorsque sur sa personne s'arrêtent des regards qu'elle devine lourds de sens. On la juge, elle femme de petite vertu engoncée dans une sinistre situation. Certains doivent se douter de ce qui a pu arriver à la belle blonde, de nombreux hommes ou encore femmes doivent songer que ce n'est là que de sa faute. Après tout les atours légers que porte Andy trahissent tout de sa vie. Sur ses mollets halés se dessinent de longues griffures, quelques tâches décorent ses bas filés. Derrière ses longs cheveux blonds la féline se cache. Lorsqu'elle perçoit que la conversation entre le croquemort et l'éleveur de chevaux touche à sa fin, son souffle s'apaise enfin. Elle souhaite quitter cette ville, oublier tout de ce qui a pu s'y passer. Oublier tout de ce passé qu'elle dissimule aux autres pour ne pas avoir à payer le prix de ses erreurs.

Elle en veut à Curtis, le hait trop en cet instant pour songer à être triste en pensant à la fin prématurée qui semble avoir été celle de celui qui lui avait tendu une main salvatrice quelques années plus tôt. Elle reste sur le cheval de Derek, incapable de se mouvoir tandis que dans son esprit se rejoue l'horreur qu'elle a vécu il y a moins d'une heure. Devant juger à juste titre que la prostituée est dans l'incapacité de se mettre en action, Hale agit pour deux. Une fois que le loup s'est mit en selle il ne faut que peu de temps pour que la puma passe ses fins bras tremblants autour de la taille du brun. Elle s'accroche à cet homme dont elle a ruiné la journée comme s'il était un des derniers points fixes qu'elle ait encore dans ce monde où il est si aisé de perdre la vie ou pire encore. Elle souffle, longtemps. Souffrant en silence tandis que la cadence s'accélère.

Sans un mot elle se laisse porter, son corps n'est à présent guère plus réactif que celui d'une poupée de chiffon. La chaleur qui tend a devenir oppressante, ces larmes qui dévalent toujours ses joues sans qu'elle ne sache comment les empêcher de couler, rien n'est doux en cet instant pour la féline si ce n'est la chaleur de ce corps qu'elle presse contre le sien. Andy se fige, calle sa respiration en suivant le rythme de ce cœur dont elle ne loupe aucun battement. Elle somnole, épuisée.

Pour s'éveiller de manière brusque grâce à la voix de Derek qui maugrée au sujet de cette journée qui s'est retrouvée gâchée par la faute de la féline. La jeune femme se mord la langue pour ne pas s'exprimer en usant d'un ton qui pourrait être qualifié d'insolent. Elle marmonne finalement un bref remerciement du bout des dents.

La rivière se révèle être un petit étang. L'endroit paraît calme, la jeune femme se contente d'opiner du chef à l'intention de Derek quand ce dernier lui explique qu'il connaît un coin à anguilles. Le regard d'Andy retrouve un peu de sa vitalité suite à cette mention faite de la nourriture. Elle n'a rien mangé depuis la veille, son ventre vide était toutefois parvenu à se faire oublier pour laisser place à des troubles plus cruels encore. Elle ôte le cache-poussière qu'on a fait cache-misère pour ce triste jour. Le lourd vêtement s'écrase au sol dans un son mat, aplatissant sous lui l'herbe verdoyante. La féline ôte les derniers remparts de tissu qui couvrent son corps après s'être assurée que le loup était trop loin pour la surprendre ainsi dénudée. Tout en remontant un de ses bras le long de sa poitrine pour cacher ses mamelons et les protéger de la fraîcheur de l'eau, la puma se laisse aller. Elle s'assied au fond de l'étang avant d'entreprendre de se frotter pour mieux se débarrasser de ce qui est venu la souiller.  

Parfois elle se fige, aux aguets lorsqu'il lui semble entendre Derek. Puis se rendant compte qu'il n'en est rien, elle achève de nettoyer ce qui doit l'être. Quand elle sort enfin de l'étang Andy laisse durant un tendre instant de grâce le soleil réchauffer son corps, réveiller son cœur. Une fois sèche elle retrouve ses atours, délaissant ses bas filés pour conserver ses chevilles dénudées. De ses pieds nus elle foule le sol, puis attend patiemment le retour de son sauveur. Hale n'est pas encore revenu, un regard aux chevaux rassure la puma qui se dit que jamais le loup ne laisserait ses bêtes esseulées.

Andy s'en va alors à la recherche de minces bouts de bois et d'herbes sèches. Elle trace un cercle au sol de la pointe du talon. Rapidement se met en place un squelettique foyer qui ne demande qu'a être embrasé. Alors que la féline en est à se demander comment un tel miracle va pouvoir se produire, Derek pointe le bout de son museau. À la vue des prises faites par Hale, l'estomac de la blonde se met en éveil.

Elle se lève, forçant le trait d'une humeur légère tout ce qu'il y a de plus factice. Puis s'approche de celui qui sort de l'étang.

-Je n'ai pas de quoi allumer le feu.

La puma ne mentionne pas ses craintes, l'horreur qui encombre ses pensées moroses ou encore ce qui s'est passé avant que Derek ne la trouve. Personne n'a envie d'en savoir plus et la jeune femme ne veut plus y songer. Elle se tient droite et raide sur ses jambes graciles qui tremblent encore un peu, observant celui dont elle n'aurait su espérer le retour. À force de se croire capable du pire, Andy a finit par oublier que certains pouvaient faire le meilleur. D'une voix tremblante, elle murmure une ébauche de repentir.

-Je te pensais parti de Calico. Personne n'aime cette ville. Je serais partie et j'ai tendance à croire les gens aussi peu fiables que moi. Je suis navrée d'avoir rendu ta matinée inutile. 

Lorsque Derek lui demande d'oublier ce qu'il s'est produit, la puma se renferme sur elle même et regrette tout des maigres efforts qu'elle met en place pour se sortir de ce marasme dans lequel la mésaventure qu'elle vient de traverser l'a plongée. Elle baisse les yeux, trouvant un grand intérêt à ses pieds qu'elle décide de fixer pour ne pas avoir à faire face à cette situation dans laquelle elle se retrouve à cause de sa propre imprudence. Sans doute Andy aurait-elle pu briser ces hommes qui n'en méritent pas le nom lorsque ces derniers ont montré les premiers signes d'une hostilité avérée mais elle n'a su bouger. Comme prisonnière de son propre corps, incapable de se débattre ou encore de hurler pour qu'on daigne lui venir en aide. La féline n'a su que pleurer, silencieusement par crainte d'attirer sur elle le courroux de ceux qui la salissaient, en attendant que le pire ne se fasse.

Derek s'affaire sans interférer dans le chagrin de la prostituée qui renoue avec un mutisme total dont elle espère qu'il saura la protéger. Rapidement une douce odeur de nourriture se fait sentir, la jeune femme incapable de prononcer le moindre mot se contente d'observer le loup. Savourant tout de ce silence ambiant, la puma saisit cependant la perche tendue par celui qui pourrait devenir un ami si elle sortait plus souvent du saloon. Derek même s'il se montre parfois maladroit se rattrape comme il le peut et Andy décide de le suivre. Un doux sourire aux reflets d'innocence habille les lèvres de la catin lorsque devant eux s'impose un arbre couvert de fruits colorés. Cette vision suffit à remettre un peu de baume au cœur de la puma qui ne met que peu de temps avant de trouver une solution pour ramener le plus de fruits possible près de leur feu.

De manière insouciante et presque souriante la jeune femme soulève son jupon qui se meut alors en un parfait baluchon de fortune. Avec Derek ils récoltent un grand nombre de ces merveilles que la féline devine juteuses à souhaits. Lorsqu'ils retrouvent l'étang c'est pour surprendre un renard opportuniste qui s'apprêtait à dérober le reste de leur repas. L'animal conscient de se trouver face à plus forts que lui déguerpit en les voyant arriver.

Les ventres se remplissent, la puma ne prononce pas un mot, encore incertaine de savoir ce qu'il est ou non bon de dire dans un pareil moment. Le loup respecte son mutisme, Andy se repose en profitant des doux rayons solaires qui caressent sa peau nacrée. Elle ne pleure plus désormais. Toutefois elle sursaute lorsque l'éleveur bouge trop vite ou qu'un bruit imprévu se fait entendre. Les récents évènements l'on rendue plus craintive qu'à l'accoutumée et la féline habituellement dotée d'un fort caractère peine à reprendre pied avec la réalité. Même si sur ses lèvres se dévoile un sourire pudique, son regard se fait encore fuyant. Sur elle s'est abattue l'horreur qui a fracassé son assurance et sa joie de vivre par la même occasion. Andy ne sait de combien de temps elle aura besoin pour être capable de renouer avec la normalité de son quotidien.

Toutefois elle se sent prête à monter seule la jument qu'elle a emprunté à Derek plus tôt dans la journée. En silence il reprennent leur chevauchée, le voyage pour retourner chez eux étant bien plus calme que ne le fut leur balade matinale. Lorsqu'à l'horizon apparaissent les premières fermes de Beacon Hills Derek fait une proposition à la féline. Il ne faut que peu de temps à la jeune femme pour faire un choix qui lui semble être plus dicté par ses craintes que par son cœur.

-Alessandro doit être fâché. En tout cas il avait l'air de l'être cette nuit quand il est entré dans ma chambre alors que je sortais par la fenêtre.

Andy ne veut pas avoir à donner d'explications à celui qui n'est pas qu'un simple patron. L'italien est son ami. Un loup au passé secret qui tolère que la puma ne lui dise pas tout au sujet de sa propre histoire. Mais aujourd'hui elle craint que son ami ne lui demande les raisons de sa fugue nocturne, qu'il ne quémande plus d'informations que la féline est prête à lui en donner. La jolie blonde observe celui qui lui a probablement sauvé la vie du coin de l'œil, sa bouche s'ouvre et d'une voix timide elle répond enfin à la proposition de ce dernier.

-J'aimerais ne pas rentrer tout de suite au saloon.

La gorge nouée par l'émotion Andy ne sait comment réagir face à la gentillesse de celui dont elle a bouleversé la journée. Son regard s'embue une fois de plus, honteuse la jeune femme camoufle tout de son trouble. Derek est un drôle de gaillard, bourru d'apparence mais qui semble en vérité plus tenir de l'ours en peluche que du loup. Comme il l'a lui même déclaré un peu plus tôt il n'est pas "les gens", mais la bonté a comme toutes choses ses limites. Il aurait pu juger et ce sans que la féline ne lui en veuille qu'il avait fait assez pour aider son prochain et que le moment n'était plus à la charité. Andy inspire, son nez rougit à force d'avoir trop reniflé se retrousse.

Bien vite ils arrivent au ranch de la famille Hale. La prostituée tente de se faire toute petite ou encore invisible pour ne pas attirer sur elle l'attention de ceux qui travaillent et vivent ici. Elle n'est qu'une vulgaire voleuse de chevaux après tout et le sort habituellement réservé à ces derniers n'est pas le logis et le souper. Fort heureusement pour elle ils ne croisent que peu d'âmes et ces quelques personnes sont trop occupées pour daigner s'inquiéter de sa présence dans cet endroit. La féline descend de la jument, ose un murmure à l'intention de celui qu'elle voit comme un sauveur.

-Ta sœur aurait-elle une tenue que je pourrais lui emprunter ou même lui acheter ? J'ai de l'argent, j'allais à Calico pour régler une dette. Ils... Ils ont dit que mon ami était mort et cet argent ne lui servira plus à présent.

Elle ne veut point être plus redevable envers la famille Hale qu'elle ne l'est déjà. 

Ils n'ont guère le temps d'échanger plus longtemps sur ce sujet qui de toute façon n'est pas de ceux qui intéressent Derek. Un homme, ou plutôt un loup, vient vers eux en usant d'un pas pressé qui n'augure rien de bon. Même si la vie du ranch ne concerne pas la féline elle se sait toutefois coupable de la longue absence du maître des lieux. Sans s'attarder sur ce regard dédaigneux qui glisse sur sa personne sans que cela suffise à la blesser, la jolie blonde écoute d'une oreille distraite la raison de cette agitation qui habite le pauvre homme qui leur fait face. Une bête semble en difficulté et le retour de Hale était aussi attendu que la pluie après une trop longue période de sécheresse. Quand Derek annonce à son vis à vis que sa présence devra se faire attendre un peu plus la puma presse le pas pour suivre son sauveur tant elle devine son temps précieux.

C'est à présent un bébé hurlant et rouge comme une tomate qui les accueille. Les cris de cet enfant décidément trop jeune pour que la féline puisse s'imaginer apprécier sa compagnie broient les tympans de cette dernière. C'est sans quitter le bambin des yeux que la puma salue la femme qui le tient entre ses bras d'un bref hochement de tête. Si la prostituée peine déjà à se montrer sociable en temps normal, toutes ces catastrophes qui s'enchaînent ne sont pas faites pour se marier en douceur avec son propre état. L'enfant, une fille visiblement, refuse de manger et se complaît à hurler pour rappeler à tous sa situation de braillarde affamée.

Avant que la féline n'ait pu saisir ce qui était sur le point de se produire, voilà que Derek récupère son bébé pour le coller entre les bras soudainement redevenus tremblants de celle dont on aurait jamais eu l'idée saugrenue de lui demander de s'occuper d'un enfant. Sans rien y comprendre Andy bataille avec ce petit être qui semble se moquer de ces nouveaux bras auxquels on l'a confiée. Prenant gare à ne pas briser l'enfant, ou pire encore la faire chuter, la puma dépose sur son hôte un regard perdu tandis que ce dernier distribue des ordres à la volée.

-Et quand tu t’es trouvé une robe, je te remercie de desseller Églantine et de la remettre à l’écurie.
-Mais... Derek je ne sais pas m'occuper d'un bébé ! Et qui est Églantine ?

Derek s'en est allé sans perdre de temps à écouter les questionnements sans sens de la blonde. Hélène répond à la prostituée en usant d'un ton peu courtois mais il serait difficile d'en tenir rigueur à cette femme dans cette situation.

-La jument. Celle que vous avez volé.

Il semble à Andy que Lisbeth hurle plus fort encore qu'elle ne le faisait déjà, comme si une chose pareille était possible. La féline a en effet parlé sans réfléchir à ces dires qu'elle était en train de prononcer.

-Suivez moi, on va faire en sorte que vous puissiez vous rendre utile.

Andy serre le bébé contre sa poitrine, doucement dans sa gorge remonte un ronronnement sonore qui parvient à faire son effet. La petite renifle, hoquetant plus qu'elle ne sanglote. Par des gestes hésitants la puma tente de bercer cette enfant qui se révèle plus facile qu'il n'y paraît. Elle aime les ronronnements, un comportement amusant de la part de ce qui semble être une petite louve. Andy suit Hélène dans la bâtisse principale.

[...]

L'enfant s'est endormie tout contre la puma après avoir lutté contre cette fatigue qui devait l'accabler à force d'avoir tant pleuré. Andy est parvenue à nourrir cette petite sous le regard ébahi d'Hélène qui n'était jamais bien loin. Elle a apprit que la maman des enfants n'était plus de ce monde, ayant perdu la vie en donnant naissance à sa dernière enfant. La blonde caresse les quelques cheveux de la petite fille du bout des doigts, puis enfin se lève pour la confier à celle qui saura lui faire retrouver le confort de son berceau. La féline épuisée par cette journée chargée en émotions dévastatrices s'offrirait elle aussi le luxe d'imiter le bébé s'il n'y avait pas tant à faire alors que déjà Hélène parle de la préparation du  repas. Andy demande après la sœur de son hôte qui saura lui vendre quelques atours. Ensuite elle ira desceller la jument.

[...]

Il y avait dans sa besace plus d'argent que prévu. Andy s'est efforcée de ravaler sa surprise en faisant cette découverte. Nouvellement vêtue d'atours qui sont à présent siens, la belle blonde sort de l'écurie et s'apprête à rejoindre Hélène qui lui a demandé de revenir rapidement. En effet la jeune Lisbeth ne devrait pas tarder avant de se réveiller et ici on a su trouver une utilité à celle qui avait peur de seulement encombrer par sa présence la vie de ses hôtes.

Tout en espérant que Derek ne rencontre pas de soucis de son côté, la belle blonde entre dans la bâtisse pour y retrouver Hélène et le bébé. Bébé qui sans surprise est une nouvelle fois en proie à un terrible chagrin.

[...]

La nuit est tombée, Derek n'est toujours pas revenu. Il va bien mais ce n'est pas le cas de la vache et de son veau dont on ne sait pas encore s'ils verront demain. Les plus grands enfants de Derek sont allés près de lui pour visiter le veau et dire bonne nuit à leur père. À présent ils dorment et Andy est bienheureuse de quitter la maison pour aller porter son souper à son sauveur. En effet les hommes sont revenus et ne cachent rien de la désapprobation qui les habite lorsque leurs regards glissent sur la prostituée.

Resserrant le châle autour de ses frêles épaules d'une main tout en tenant une gamelle fumante dans l'autre, la puma s'impose sur le seuil de l'étable. Elle peine à dissimuler cette inquiétude qu'elle éprouve pour son ami.  Quand ce dernier l'invite à le rejoindre, elle suit ses conseils en relevant son jupon. Puis sourit timidement avant de donner des nouvelles de sa dernière née à Derek.

-Elle a mangé. Deux fois et dort à présent.

Hélène s'est montrée gentille avec la féline, lui avouant qu'elle trouvait que cette dernière était douée avec les enfants. C'est à ce moment là qu'Andy a fait mention de son métier à celle qui semblait tout ignorer d'elle. Une catin avec un bambin cela fait mauvais genre et la puma ne souhaite pas se trouver un mari dans un futur proche ou même lointain. Elle a déjà subit les foudres d'un piètre fiancé qui serait devenu un bien mauvais mari si elle lui en avait donné l'occasion. Ce mariage arrangé semblait plaire à tout le monde sauf à celle dont on offrait la main sans s'inquiéter de son consentement.

Andy s'approche de Derek, couvant du regard ce dernier avant de s'intéresser à la vache et son petit. Sans craindre de se salir elle s'assied à même le sol après avoir tendu son repas à son hôte. S'installe alors un doux silence, la puma se contente de tendre une main hésitante vers le veau après que Derek l'ait autorisée à le toucher. Seuls les respirations se font entendre, puis les mastications de celui qui prend enfin le temps de se remplir l'estomac. Andy ne sait combien de temps ils demeurent ainsi, plongés dans une douce quiétude. Elle ose un clin d'œil, puis un sourire en coin qu'elle destine tout deux à son ami.

-C'est une gentille petite, avec un fort caractère. Je suis navrée de ce qui est arrivé à ta femme.  

Elle devine le sujet sensible, après tout il faudrait être bien sot pour ne pas comprendre que la perte de sa femme et de la mère de ses enfants par la même occasion puisse impacter un homme. Jamais elle n'a surpris le loup à venir au saloon pour se payer les services charnels que celui-ci propose. Idyllique dans ses songes la féline imagine donc Derek avoir été un mari fidèle aux charmes de sa défunte épouse. De sa voix éprise d'une soudaine hésitation qui ne lui ressemble habituellement pas, la féline questionne le veuf.

-J'aimerais revenir voir Lisbeth. Si tu m'y autorises bien sûr.

Derek paraît surpris par la requête de la prostituée. Et Andy doit bien avouer que jamais elle ne se serait cru capable de prononcer de telles paroles. Il faut dire que ces dernières 24 heures sont pleines de surprises, certaines bonnes, d'autres beaucoup moins. La jeune femme croyait en se levant au beau milieu de la nuit qu'elle retrouverait un ami, réglerait quelques dettes dues à un sombre passif dont elle ne voulait pas que l'ombre ternisse son actuelle existence. Rien ne s'est passé comme prévu, elle ne pensait même pas devoir aller jusqu'au ranch du loup pour venir y emprunter une monture. Il était son plan B. Ce dernier en la poursuivant a dérangé ses projets avant de lui sauver la vie.

Se retrouver avec un bébé dans les bras n'était clairement pas au programme de cette journée, mais ces coïncidences ne sont pas aussi mauvaises que la jeune femme ne l'avait cru au premier abord. S'attacher à ce petit être n'est que folie car la puma sait que son mode de vie n'est pas ce qu'il y a de plus recommandable. Se prendre ainsi d'affection pour ce qui représente tout ce qu'elle craint est un danger en soi car cela pourrait la pousser à repenser cette vie qui hier encore lui semblait être presque idyllique. Après tout la vie se montre douce avec elle depuis qu'elle a posé sa valise au saloon. Alessandro est un homme bon qui prend soin de celles qui peuplent l'étage de cette bâtisse. Jamais il ne permettrait qu'on ne leur cause du tord. Quand Andy devra conter à son ami sa journée elle sait que ce dernier aura bien du mal à cacher sa colère après ceux qui ne sont plus et sans doute celle qui n'a su se défendre malgré les armes que sa nature lui a données.

Un homme approche pour prendre la relève auprès de la vache et son petit, Andy ne se fait pas prier pour quitter les lieux. Sans chercher à écouter cette discussion qui ne l'intéresse que très peu, elle songe à ce qu'aurait pu être sa vie si elle avait exaucé les souhaits de ses parents. Sans doute serait-elle morte depuis bien longtemps sous les coups d'un piètre époux. Ses choix, même les plus douloureux, sont ceux qui lui ont permit de conserver la vie sauve. Jusqu'à aujourd'hui elle se contentait de suivre un instinct qui ne lui avait jamais fait défaut. La jeune femme soupire avant de redresser la tête lorsque son ami la rejoint.

Côte à côte, ils progressent vers la maison. La prostituée ne cache rien de sa surprise lorsque cette fois c'est Derek qui énonce une proposition que toute personne censée jugerait immédiatement comme étant déraisonnable. Confier un bébé à une catin qui vient de démontrer qu'elle peinait déjà à s'occuper d'elle même ? Si au fond d'elle la puma n'est pas loin d'accepter elle n'ose y penser trop longtemps, craignant là que ce soit la fatigue due à cette rude journée qui ne fasse parler le loup et non sa raison.

Certes la détresse de l'autre est compréhensible, Derek est père de nombreux enfants et sa dernière née est liée à la fin de cette femme dont elle tient son prénom.

-...À toi de montrer que tu es plus qu’une catin et une voleuse de chevaux.

Le soucis est là car Andy n'est pas certaine d'être autre chose. Elle n'a pas honte de son métier qui n'est à ses yeux pas pire qu'un autre. Cette offre que lui fait le loup semble malgré tout assez fondée pour que la jeune femme accepte d'y songer plus longtemps, la nuit portant paraît-il conseil. Deux dollars par jour ce n'est pas rien et elle aurait à sa disposition le reste de ses journées pour pouvoir vaquer à ses autres activités. Reste à savoir si Alessandro donnerait son accord pour tout cela, mais Andy ne doute pas de pouvoir s'arranger pour obtenir ce précieux sésame. Alessandro est comme tout les autres hommes non-dénué de points sensibles sur lequel il peut être aisé de faire pression. Elle sourit en songeant à cette manière que le loup a eu de jouer au beau pour s'attirer les bonnes grâces de la femme de Jean. Hautcoeur était certes riche et bien vêtu mais également doté de manières qui n'étaient guères éloignées de celles de l'adjoint Turner.

Et puis si la douceur ne suffisait pas il reste toujours aux femmes l'art de la dispute pour obtenir ce qu'elles désirent.

Andy ne donne pas la moindre réponse au père de Lisbeth, se contentant de lui souhaiter bonne nuit lorsque ce dernier la laisse en plan sur le perron après ce qui fut une rude journée.

-Bonne nuit Derek. Et encore merci.

[...]

Les bébés, ces êtres étranges qui étaient jusque là totalement étrangers à la féline se révèlent surprenants. Lisbeth a usé de son charme tant que de ses cordes vocales pour réussir à tirer Hélène puis Andy de leurs lits avant même que le soleil ne daigne se lever. Malgré son épuisement la prostituée s'est levée pour secourir celle qui était en train de lutter contre un bébé affamé refusant de s'alimenter. Avec une facilité déconcertante la puma est parvenue à donner la moitié d'un biberon de lait à l'enfant avant de se rendormir sur un rockingchair, Lisbeth endormie tout contre sa poitrine.

C'est l'agitation de la maison qui éveille pour la seconde fois la jolie blonde lorsque les hommes se mettent en mouvement pour aller travailler. La vache n'a pas survécu à cette nuit et cela représente désormais une charge de travail non négligeable pour tout ceux qui vivent ici. La féline baille puis se lève tout en prenant garde à ne pas réveiller celle qui dort sereinement entre ses bras. La tâche n'est pas aisée et Lisbeth surprend celle qui s'échine à en prendre le plus grand soin en ouvrant un œil avant de bien vite le refermer.

Andy ne peut alors pas s'empêcher de repenser à la proposition que son ami lui a fait quelques heures plus tôt. Elle se plait dans cette maison, avec cette petite tout contre elle qui accepte sa compagnie. Elle pourrait prendre goût à cette vie.

La jeune femme s'attable devant une tasse de café qu'Hélène a eu la gentillesse de lui servir. Bientôt elle devra retourner en ville, justifier devant Alessandro son absence et retrouver une vie dont elle n'est plus vraiment sûre qu'elle sache la satisfaire. Il y a deux jours encore tout était si simple alors qu'aujourd'hui il paraît si ardu à la jeune femme de se montrer insouciante. Cette enfant tout contre elle a besoin de câlins et d'affection, mais ici elle est aussi vue comme étant celle qui a prit la vie de sa mère en venant au monde. L'enfantement est dangereux et ôte la vie à un grand nombre de femmes sans que personne ne sache comment lutter contre cette fatalité. Une belle image de cette misère ordinaire qu'est leur vie.

[...]

Après avoir déposé Lisbeth dans son berceau et s'être offert le luxe d'un brin de toilette, la jeune femme sort pour tenter de retrouver celui qui lui a promit une discussion ce matin. Les hommes s'agitent et la belle blonde en profite pour visiter les lieux sans toutefois s'approcher des écuries. Sa fraîche réputation de voleuse de chevaux ne joue pas pour elle dans cet endroit et elle aura besoin de temps pour parvenir à s'en défaire. Lorsque Derek revient vers elle, ce dernier lui paraît être plus épuisé encore qu'il ne l'était la veille si cela est possible.

-Bonjour Derek. J'aimerais accepter ton offre, même si elle me semble folle.

Dix années à éviter de se retrouver avec un bébé dans les bras pour se laisser berner par ce charmant embarras avec tant de facilité, il semblerait que la vie de la féline soit en train de prendre un nouveau tournant.

-J'en parlerais avec Alessandro. Au début il refusera sans doute, mais il finira par céder. Il est meilleur bougre qu'il ne peut le paraître.

Derek est prêt à aller rencontrer Alessandro pour lui parler de cette proposition que la féline a déjà acceptée sans s'enquérir de l'avis de l'homme pour lequel elle travaille déjà. Si certains pourraient voir dans ces étranges manières une forme de tromperie, la puma estime simplement que la faim peut justifier de nombreux moyens. Si cette décision peut sembler avoir été prise sur un coup de tête, la jeune femme veut se donner la possibilité de peut-être, un jour, regretter ce choix si les conséquences se révélaient être trop lourdes à porter. Elle ne peut s'empêcher de sourire quand le plus jeune des fils de Derek déclare vouloir venir lui aussi au saloon.

Cet établissement n'est pas un lieu fait pour convenir aux jeunes enfants. Le grabuge y est certes rare car Alessandro veille au grain, mais les dires de certains consommateurs manquent parfois de courtoisie. Les rustres de Beacon Hills le sont toutefois moins que ceux de certaines villes voisines. Andy songe aux mauvaises rencontres faites la veille, cherchant par la même occasion ce qu'elle va bien pouvoir dire à Alessandro au sujet de son absence. Ce dernier doit être furieux et la féline sait qu'elle ne va pas pouvoir échapper à une mise au point avec lui.

-Tu viendras quand tu sauras monter seul à cheval. A Bientôt Andy.
-Au revoir Derek. À bientôt Arthur.

La féline même si elle se sent bien dans cet endroit sait qu'est maintenant arrivé pour elle le moment où elle se doit de retrouver le saloon. Derek se dirige vers l'écurie, Arthur quant à lui part retrouver son jeu, toujours armé de son pistolet en bois. Cette image fait soupirer la puma qui trouve que cet enfant est encore bien jeune pour vouloir imiter les adultes sur ce point. Leur vie rude pousse les marmots à ne pas s'attarder dans l'insouciance de l'enfance. Resserrant son nouveau châle autour de ses frêles épaules, la puma se dirige vers la ville sans pour autant donner à ses pas une cadence empressée. Elle n'est soudainement plus vraiment sûre que son bonheur puisse se trouver au saloon. Ces sentiments incongrus qui agitent le cœur mais surtout la cervelle de la prostituée ne sont pas fait pour lui plaire et elle espère bien vite savoir s'en débarrasser avant qu'ils ne puissent lui causer un quelconque chagrin.

Quand elle se retourne pour voir si elle aperçoit encore celui qui fut son sauveur puis son hôte et qui ne tardera pas avant de devenir son employeur, elle ne peut s'empêcher d'agiter la main pour répondre au salut de Derek. Un doux sourire égaille ses traits, une expression qu'elle affiche encore lorsque après une longue marche la petite ville de Beacon Hills apparaît devant elle.

Approchant du saloon, elle ravale alors cette expression de bonheur simple pour lui préférer une de ses consœurs plus blasée. Elle ose encore espérer ne pas trouver Alessandro sur son chemin et ce même s'il lui semble impossible que ce dernier ne soit pas dans ce lieu dont il est le propriétaire. Le loup sort rarement, encore moins depuis que l'institutrice n'est plus en ville. Cette femme armée de ses manières de poupée et de son opulente poitrine aura su faire tourner nombre de têtes en ville. Mais malheureusement pas celle de son époux. Andy inspire avant de pousser les battants de bois de la porte du saloon, se faisant aussi petite qu'un souriceau pour mieux sursauter lorsque son nom est prononcé sans douceur.

Vexée de ne pas avoir su passer entre les mailles du filet, elle lève un regard plus noir qu'il ne devrait l'être sur les hommes qui se trouvent derrière le bar. Barney baisse bien vite les yeux quand Alessandro alpague la fugueuse qui vient enfin de retrouver le chemin de la maison.

-Bonjour Alessandro, tu as l'air fatigué. Bonjour messieurs.

Les hommes accrochés à leurs verres saluent à leur tour celle qui généralement ne leur offre que peu d'attention. Insolente, la féline opte pour l'attaque en espérant qu'elle se révèlera être la meilleure des défenses dont elle puisse disposer en cet instant. Elle a dans sa besace suffisamment d'argent pour louer une chambre chez la vieille Betty si tout cela devait mal tourner.

-Je t'avais parlé de trois jours. J'ai réussi à être plus rapide que prévu.

Si elle s'était naturellement attendue à ce que retombe sur elle toute la frustration que son départ a pu faire naître chez Alessandro, il n'en est rien. Ce dernier se contentant de serrer les dents avant de lui annoncer que sa corvée l'attend, avec en surplus les frusques de Barney. Certes elle sait qu'elles ne seront pas les plus propres qui lui eu été donné de nettoyer, car leur propriétaire a une forte tendance à fuir à la vue d'un morceau de savon, mais la puma estime qu'elle s'en sort bien. Elle comme son patron ont de forts caractères et cette situation aurait pu sans mal dégénérer. La présence de clients dans le saloon doit être ce qui pousse Alessandro à conserver une certaine mesure, à moins que l'absence de la jeune femme ait su faire naître une pointe d'inquiétude chez ce dernier.

Souriante mais pas trop pour ne pas remuer le couteau de son insolence dans cette plaie encore ouverte, la prostituée ne se fait pas prier avant de partir dans les étages pour retrouver sa chambre et son travail. Elle a prit une journée sans prendre le soin d'avertir celles qui partagent sa vie, il se peut qu'une dispute éclate entre elles dans les heures à venir.

[...]

La prostituée mire le plafond de sa petite chambre en songeant à cette nuit qu'elle a passé chez celui qu'elle voit déjà comme un ami. Si son escapade à Calico s'est mal déroulée, elle ne regrette cependant pas grand chose du contenu de ces deux dernières journées riches en émotions. Alessandro lui fera la tête pendant encore quelques jours, puis cette histoire sera oubliée car ici on a guère le temps de s'attarder sur le futile. Les filles sont quant à elles trop curieuses au goût de la féline qui n'a su éviter leurs questions.  Si Rebecca a bien vite cessé de se mêler ainsi de la vie privée de son amie, ce ne fut pas le cas de Maggie qui s'est montrée bien trop intrusive aux yeux de celle qui n'avait de toute façon rien à dire aux autres filles qui font vivre cet établissement. Elle n'a de comptes à rendre à personne, pas même à Alessandro dont elle juge qu'il n'est pas concerné par sa vie privée. Son passé renferme de lourds secrets et elle devait s'assurer que rien ne viendrait troubler la quiétude de son actuelle existence.

Curtis est mort. Un triste évènement mais finalement une belle coïncidence car cela assure le silence éternel de son ancien ami à la prostituée. Sans regret elle songe à celui qui l'a hébergé contre un paiement en nature, le seul dont elle disposait, lorsqu'elle était à la rue.

Andy soupire avant de se retourner entre ses draps. Elle aurait aimé pouvoir toucher quelques mots à Alessandro de cette proposition que lui a faite Derek. Mais le loup revanchard lui a fait comprendre sans user de courtoisie ni de sympathie qu'il n'avait pas la moindre minute à lui accorder. La belle blonde souffle la bougie qui illumine encore sa chambre d'une douce lueur avant de chercher le sommeil. La fatigue ne met que peu de temps à la cueillir. Lisbeth s'est réveillée trop tôt la nuit dernière.

La féline espère que l'enfant dort à cette heure avancée de la nuit.

[...]

Il est encore tôt, mais la jeune femme sait qu'elle doit se montrer avant neuf heures chez l'éleveur pour pouvoir s'occuper de la petite louve. Sans quitter Alessandro du regard elle laisse ce dernier se servir un second café. Lorsque le moment lui semble être venu, la féline prend la parole sans attendre qu'une permission ne lui soit octroyée.

-Bonjour. Je m'excuse pour mon départ précipité.

Pas de réponse de la part du loup sinon une respiration plus lourde que les autres. Le cœur d'Alessandro joue une étrange mélodie à laquelle il manque l'assurance paisible de l'habitude. Sans s'en soucier Andy quémande tout en sachant qu'un refus de la part de son ami sera jugé comme étant inacceptable. Dans sa chambre sa besace est déjà prête pour un départ. S'ils se disputent aujourd'hui c'est leur collaboration qui touchera à sa fin. Andy n'a pas le temps d'être patiente ni diplomate ce matin.

-Monsieur Hale, enfin Derek, m'a proposé du travail.

Un emploi respectable aux yeux de l'église. Jugeant qu'il est trop tôt pour le préciser, Andy se tait. Souriante et plus avenante qu'en temps ordinaire, elle précise.

-Il a besoin d'une gardienne pour sa plus jeune fille. Tout les jours. De neuf heures à midi. Cela me permettrait de travailler à deux endroits à la fois.

Le silence reprend ses droits et s'étire. Alessandro réfléchit et l'exercice ne paraît pas si simple pour celui qui se retrouve avec un grand nombre d'informations à relier. Quand enfin le loup desserre les dents pour donner son accord la féline doit se faire violence pour ne pas laisser sa joie éclater au grand jour. Mesurée, elle sourit, ne s'autorisant pas à râler quand son patron arrose son café d'une longue lampée de gnôle. Elle quitte sa chaise, se hisse sur la pointe de ses pieds déjà chaussés de talons bas avant de faire claquer ses lèvres dénuées de maquillage sur une des pommettes de son ami. L'homme grogne pour la forme.

-Merci t'es un chou ! Derek viendra te parler dans quelques jours. Je serais de retour pour treize heures et j'ai déjà changé tes draps.

Sans s'attarder plus longtemps dans le saloon la féline sort et prend la direction du ranch de son ami. Là bas Lisbeth doit déjà l'attendre.